édical tenu par des bénévoles le 23 décembre 2009 à Londres (Photo : Leon Neal) |
[13/05/2013 11:06:48] LONDRES (AFP) Refonte de l’aide au logement, plafonnement à 1% par an de la hausse des prestations sociales, durcissement de l’allocation handicapés… : le Royaume-Uni met en oeuvre, en pleine austérité, une réforme en profondeur de l’Etat-providence, en faisant payer le prix fort aux plus vulnérables selon des associations et l’Eglise.
C’est “probablement la plus importante réforme” du système de prestations sociales dans le pays “depuis la Seconde Guerre mondiale”, estime l’Institut pour les études économiques (IFS), centre de recherches britannique indépendant.
L’objectif est d’économiser 21 milliards d’euros d’ici 2015, soit “la plus importante réduction de dépenses de toute l’histoire” de l’Etat-providence au Royaume-Uni, ajoute l’IFS.
Cette refonte, engagée en 2010 mais dont d’importantes mesures entrent en vigueur à compter d’avril 2013 jusqu’en 2017, s’inscrit dans le cadre de la politique de réduction du déficit public du gouvernement. Elle vise aussi à simplifier un système ultra complexe d’une cinquantaine d’allocations.
Elle doit également remettre “la justice” au coeur de l’Etat-providence, insiste le Premier ministre conservateur David Cameron, dénoncant le fait que vivre des aides sociales soit devenu “un choix de style de vie”.
“Nous voulons changer la culture pour faire en sorte que ce soit toujours payant pour les gens de retrouver du travail”, a expliqué le ministre du Travail, Iain Duncan Smith.
Avec le nouveau système, “l’aide accordée aux personnes qui retrouvent un travail ne chutera pas aussi rapidement qu’actuellement”, constate avec satisfaction Tim Nichols de l’organisation Child Poverty Action Group (CPAG), pourtant très critique de la réforme dans son ensemble.
Au final, neuf familles sur dix vont perdre de l’argent, assure-t-il cependant à l’AFP.
“Les foyers les plus pauvres seront les plus touchés”, prévient l’organisation Crisis, qui parle de réforme aux effets “dévastateurs” avec pour conséquences “de la misère, des pièces froides, des files d’attente encore plus longues aux banques alimentaires, des familles brisées, des loyers non payés et encore plus de gens sans abri”.
Réduction des aides au logement
Le chef de l’Eglise anglicane, Justin Welby, s’est associé au concert de critiques: “Les enfants et les familles paieront le prix de la forte inflation, plutôt que le gouvernement”, a-t-il regretté.
L’Etat a en effet mis fin à la sacro-sainte indexation des aides sociales sur l’inflation (2,8% actuellement sur l’année écoulée contre 3,5% l’année précédente), désormais plafonnée à 1% par an pendant trois ans. Comme les salaires des fonctionnaires, a souligné le ministre des Finances George Osborne.
Les habitants en HLM voient aussi leurs allocations logement réduites s’ils disposent d’un appartement jugé trop grand au vu de la taille de leur foyer. Une mesure décriée par l’opposition travailliste qui l’a surnommée “la taxe sur la chambre à coucher”.
Ainsi un parent divorcé n’est autorisé à disposer que d’une seule chambre s’il n’a pas la garde de ses enfants. Il perdra environ 60 euros par mois s’il a une pièce jugée désormais superflue.
Le budget du gouvernement destiné à aider les foyers modestes à payer leur taxe d’habitation a aussi été amputé de 10%. Trois millions de familles en Angleterre vont perdre en moyenne 160 euros par an, selon des chiffres officiels.
Au final, prévient CPAG, ces “réductions de dépenses qui contribuent à accroître la pauvreté infantile coûteront plus cher à la société sur le long terme”.
Le montant maximal des allocations perçues va également être limité à 2.500 euros par mois pour un adulte vivant avec enfants, quelque soit le nombre d’enfants à charge. Une somme qui paraît importante mais ne doit pas faire oublier le montant exorbitant des loyers à Londres, notent les organisations.
Par ailleurs, d’ici 2018, 500.000 des 3,2 millions des bénéficiaires d’une aide pour handicap seront inéligibles, selon des chiffres officiels.
Les deux-tiers des Britanniques soutiennent la réforme, en dépit des mises en garde des associations, selon un sondage publié début avril.
Un soutien que Tim Nichols attribue notamment à la stigmatisation de l’Etat-providence dans les médias, à partir de cas extrêmes. Comme ce père de famille de 17 enfants, Mick Philpott, sans emploi, condamné récemment à la prison à vie pour avoir tué six enfants dans un incendie, un drame sur fond de course aux aides sociales exploité par le gouvernement pour justifier sa réforme.