Investissement en berne : le crédit d’impôt insuffisant selon des spécialistes

photo_1368691446228-1-1.jpg
ées dans une usine de Cycleurope à Machecoul, le 7 mars 2013 (Photo : Frank Perry)

[16/05/2013 08:04:51] PARIS (AFP) Volontiers présenté par le gouvernement comme sa mesure phare anti-crise, le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) n’est pas adapté pour aider les entreprises à relancer leur investissement dont le faible niveau grève la croissance, estiment des spécialistes.

Alors que la France est entrée en récession fin 2012 et enregistre un recul de son PIB de 0,2% au premier trimestre 2013 après un repli équivalent le trimestre précédent, le président François Hollande a encore cité mercredi à Bruxelles les mesures prises pour relancer la compétitivité des entreprises, au premier rang desquelles figure le CICE.

Ce crédit d’impôt doit permettre de réduire le coût de leur masse salariale en dessous de 2,5 Smic de 4% en 2014 puis de 6% en 2015. En rythme de croisière, les entreprises bénéficieront de 20 milliards d’euros de baisses de charge par an.

En le présentant début novembre, le gouvernement avait dit tabler sur la création de 300.000 emplois et un demi-point de croissance d’ici 2017. Il s’agissait notamment de permettre aux entreprises de libérer des moyens “pour l’investissement, la recherche et l’innovation, la formation et le soutien à l’export”.

photo_1368691511225-1-1.jpg
ésident François Hollande à Bruxelles le 15 mai 2013 (Photo : Thierry Charlier)

“Le coeur du problème de l’économie française, c’est le défaut de profitabilité des entreprises et leur faible capacité d’autofinancement de l’investissement”, affirme à l’AFP Jean-Christophe Caffet, économiste chez Natixis. “Il ne faut pas attendre que le CICE les redynamisent”, selon lui.

L’Insee a annoncé mercredi que l’investissement des sociétés non financières, enjeu central de la relance d’une activité atone en France depuis huit trimestres, avait poursuivi au premier trimestre 2013 une baisse entamée à la mi-2011.

“Il y a vraiment un ajustement de l’investissement qui s’est enclenché”, précise à l’AFP Cédric Audenis, chef du département conjoncture de l’Institut national de la statistique et des études économiques.

“Eviter les faillites”

Selon ces experts, le CICE ne devrait cependant pas donner la bouffée d’air financière nécessaire pour encourager les entreprises à prendre des risques et investir.

“20 milliards, ça ne suffit pas” pour reconstituer les capacités d’autofinancement des entreprises, constate Jean-Christophe Caffet, et “même si c’était suffisant, la demande anticipée par les entreprises est tellement faible qu’elles ne vont pas se remettre à investir tout de suite”.

Selon lui, son financement par une augmentation de la TVA qui touchera la consommation des ménages, autre moteur de la croissance française, risque en outre de “compenser un éventuel impact favorable à moyen terme par des effets négatifs à court terme”.

En revanche, affirme-t-il, le CICE “permet d’être un peu moins pessimiste dans la mesure où il soutient la trésorerie des entreprises”. “Cela peut permettre d’éviter les faillites donc les destructions d’emplois” dès 2013, grâce aux mesures de préfinancement prévues pour les petites entreprises, estime-t-il.

“Depuis cinq ans, le taux de marge des entreprises a beaucoup diminué et pourtant on n’arrive pas à identifier un effet sur l’investissement donc il n’est pas évident de dire que, puisqu’elles améliorent leur situation financière, elles vont investir”, confirme M. Audenis.

A l’inverse, c’est sur le réflexe d’embauche que le CICE peut avoir un effet réel, prévoit-il. En effet, le crédit d’impôt “revient à diminuer le coût du travail relatif par rapport au coût du capital: si un chef d’entreprise hésite entre acheter une machine ou embaucher cinq personnes, avec le CICE, il est plus incité à choisir la technologie plus intensive en travail que sans le CICE”, détaille l’économiste.

Le CICE est une “facilité plutôt de trésorerie et éventuellement d’investissement”, juge de son côté Jean-François Roubaud, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CGPME).

Mais a priori, “ce sera du financement à court terme parce que le souci des petites entreprises aujourd’hui, c’est leur survie à travers une trésorerie qui est difficile à avoir, des délais de paiement qui ne sont pas respectés (…), tous ces problèmes qui font que les entreprises investissent très peu”, explique-t-il.