A Berezniki dans l’Oural, l’avenir passe par la potasse

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Oural, le 28 mai 2013 (Photo : Eleonore Dermy)

[04/06/2013 06:24:05] BEREZNIKI (Russie) (AFP) A première vue, Berezniki est une ville de province russe typique, avec ses enfilades d’immeubles vétustes et ses cheminées d’usine. Mais sous ses fondements gisent de gigantesques réserves de potasse, un minerai de plus en plus convoité à travers le monde.

Cette ville de l’Oural, située à plus de 1.200 km à l’est de Moscou, s’élève sur le gisement de Verkhnekamsk, découvert en 1925 et dont l’exploitation s’est surtout développée après la Seconde guerre mondiale.

Ses réserves prouvées représentent 34,5% du total mondial, au deuxième rang derrière celles de la Saskatchewan, dans l’Ouest du Canada, selon les statistiques du Bureau géologique des Etats-Unis (US Geological Survey).

Alors que plusieurs dizaines de kilomètres de galeries ont déjà été creusées dans ses sous-sols, à 450 mètres de profondeur, une armada de mineurs et de machines-outils s’activent inlassablement, jour et nuit, pour briser la roche marbrée rose.

Cette dernière, broyée, est ensuite ramenée à la surface à l’aide de convoyeurs, afin d’être traitée pour en extraire le précieux minerai.

Réduite en poudre ou cristallisée sous forme de granulés, la potasse est employée comme engrais. Ce nutriment permet de doper le rendement des cultures et améliore leur qualité et leur résistance aux maladies.

De fait, à l’heure où la population mondiale ne cesse de croître et où les besoins en céréales des pays émergents explosent, la demande pour cet engrais n’est pas en passe de tarir.

Malgré tout, les grands groupes produisant ce minerai doivent adopter en permanence une stratégie d’équilibriste pour satisfaire la demande sans se retrouver en situation de surproduction, qui mènerait à une sévère chute des prix.

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Oural, le 28 mai 2013 (Photo : Eleonore Dermy)

Le russe Uralkali, qui exploite les cinq mines de la région et y emploie 11.800 personnes, a ainsi dû réduire sa production fin 2012 et tourne depuis au ralenti.

En cause, une météo défavorable et les incertitudes macro-économiques qui ont poussé les agriculteurs à marquer une pause dans leurs achats d’engrais, ainsi que le retard pris dans la signature de contrats avec l’Inde et la Chine, deux clients majeurs mais aussi redoutables en négociations.

Alors que les prix de ce fertilisant avaient bondi depuis la crise alimentaire de 2007-2008, ces deux pays ont cherché des alternatives et les producteurs de potasse ont vu les cours dévisser de 10% en 2012, explique le rapport Cyclope, Bible annuelle des matières premières.

Uralkali a cependant lancé la construction d’une nouvelle mine à quelques kilomètres de Berezniki, sur le bloc Oust-Iaïvinski. Dans une vaste clairière au milieu d’une épaisse forêt de sapins et de bouleaux, les travaux vont bon train pour forer des puits.

Ce nouveau site, qui atteindra une profondeur de 520 mètres, est destiné à terme à prendre le relais après la fermeture d’une autre mine.

Uralkali détient aussi une licence sur un autre bloc, celui de Polovodovski.

La modernisation des mines et la construction de nouveaux sites doivent selon les prévisions du groupe accroître d’ici à 2021 ses capacités de 19 millions de tonnes. Elles s’établissent actuellement à 13 millions de tonnes.

Un chiffre colossal qui laisse sceptiques certains analystes.

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Oural, le 28 mai 2013 (Photo : Eleonore Dermy)

“Actuellement, la tendance chez de nombreuses entreprises est plutôt à remiser leurs projets”, observe Boris Krasnojenov, analyste chez Renaissance Capital.

Mais chez Uralkali, on veut se montrer confiant.

“Jusqu’en 2018, l’état du marché sera très bon”, a pronostiqué la semaine dernière Vladislav Baoumguertner, PDG d’Uralkali, lors d’une conférence de presse.

Il a toutefois reconnu qu’il serait “plus difficile de pronostiquer ce qui se passera ensuite”, indiquant que les projets du groupe seraient mis en exploitation en 2021 uniquement si le rapport entre l’offre et la demande était “satisfaisant”.

Selon le PDG, cela dépendra en partie de la décision du géant minier anglo-australien BHP Billiton de mener à bien son projet de mine Jansen, qui accroîtrait considérablement ses capacités, faisant peser la menace d’une bulle sur le marché.