Selon Henri Guaino, “toutes les fortunes de France négocient leurs impôts”. Une déclaration “regrettable” selon Me Le Tacon, avocat fiscaliste chez Delsol qui revient sur ce qui est vraiment possible.
“Depuis l’affaire Woerth-Bettencourt, il y a une grande crispation des politiques et du ministère du Budget et des Finances beaucoup plus frileux à l’égard des solutions dérogatoires. D’ailleurs, à ma connaissance, il y a aujourd’hui beaucoup moins d’interventions politiques dans ce type de dossiers que par le passé. Ils craignent trop les retours de bâtons et d’apparaître à la Une du Canard enchainé ou de Médiapart. Et l’affaire Cahuzac ne va pas évidemment pas changer cette situation, bien au contraire. Désormais, ils réfléchissent à deux fois avant de donner un coup de main”, affirme Maître Le Tacon, spécialiste en droit fiscal chez Delsol avocats. (Sipa)
Henri Guaino a fait sensation lundi avec cet aveu confié aux téléspectateurs de l’émission Mots croisés” diffusée sur France 2 : “toutes les fortunes de France négocient leurs impôts”.
Maître Le Tacon, vous êtes spécialiste en droit fiscal chez Delsol avocats. Que pensez-vous de cette affirmation de l’ex-conseiller spécial de Nicolas Sarkozy. Vrai ou faux?
On le questionnait sur les possibles négociations entre Bernard Tapie et Claude Guéant et je pense qu’’il s’agissait surtout d’éviter de répondre à la question. A mon sens, c’est une déclaration caricaturale et regrettable car cela va encore entretenir des doutes sur les pratiques fiscales. Affirmer que des grandes fortunes puissent prendre rendez-vous avec l’administration fiscale pour négocier leur charge d’impôt et définir un montant forfaitaire, comme cela peut se faire parfois en Suisse, c’est totalement faux et ça n’a jamais existé. En France, l’administration fiscale ne négocie pas, elle applique les textes.
Henri Guaino n’a-t-il pas fait allusion à l’ancienne cellule fiscale de Bercy ?
Celle-ci a été supprimée par François Baroin en 2010 lorsqu’il était ministre de l’Economie et les dossiers sont désormais directement transmis aux services techniques de la Direction générale des finances publiques (DGFP). Mais cette cellule n’avait déjà pas pour objet de négocier les montants des impôts à payer par les grandes fortunes ou les célébrités, mais de traiter certaines demandes relayées par exemple par des parlementaires qui leur avaient été transmises par des avocats fiscalistes ou des contribuables qui connaissent directement les ministres ou les parlementaires.