Exception culturelle : la France inflexible face à Bruxelles

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çaise du Commerce extérieur, Nicole Bricq, donne une conférence de presse le 22 mai 2013 (Photo : Eric Piermont)

[14/06/2013 10:27:29] LUXEMBOURG (AFP) Les Européens vont avoir du mal à convaincre la France vendredi que l’exception culturelle sera préservée dans les négociations commerciales avec les Etats-Unis, que Paris menace de bloquer si le secteur audiovisuel n’est pas clairement exclu.

Réunis à Luxembourg, les ministres du Commerce des 27 doivent se mettre d’accord sur le mandat confié à la Commission pour négocier un méga-accord de libre-échange avec Washington. Ces décisions ont jusqu’ici toujours été prises à l’unanimité.

Les discussions s’annoncent très difficiles car la France veut à tout prix exclure le secteur audiovisuel des négociations, au nom du respect de l’exception culturelle qui se traduit concrètement par des subventions au secteur audiovisuel et des quotas de diffusion. Paris a brandi la menace d’un veto.

“La France ne vous surprendra pas. Elle refuse le projet de mandat, elle refusera tout mandat qui ne comportera pas une protection des services culturels et l’exclusion claire et explicite du secteur audiovisuel”, a assuré vendredi devant ses homologues la ministre française du Commerce extérieur, Nicole Bricq.

“C’est un principe de liberté qui est en jeu”, a-t-elle plaidé en soulignant que “les révolutions technologiques vont obliger nos créateurs, nos industries culturelles à repenser totalement leurs modèles de création et de diffusion”.

Paris craint de mettre en péril la création, la diffusion et le financement des films européens, d’autant plus que de nouveaux moyens de diffusion sont en train d’émerger (télévision sur internet, vidéo à la demande).

Si le Parlement européen, les ministres de la Culture d’une quinzaine de pays, et nombre d’artistes ou de producteurs prestigieux, de Costa-Gavras à Steven Spielberg, sont sur cette ligne, peu de capitales ont clairement manifesté leur soutien à Paris.

La Pologne, l’Italie, la Belgique, la Roumanie, l’Autriche partagent les préoccupations de la France, “mais tous ces pays ne sont pas prêts à afficher la même détermination”, a reconnu Mme Bricq.

L’inflexibilité de la France inquiète à Bruxelles, car les Etats-Unis pourraient à leur tour demander d’exclure des domaines sensibles comme les marchés publics, les services financiers ou le transport maritime.

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éma à Paris (Photo : Loic Venance)

“Commencer la négociation en enlevant des secteurs de la table serait une mauvaise politique” car “cela aurait un coût, pour protéger un secteur qui n’a pas besoin de l’être davantage” par rapport à ce que propose Bruxelles, estime une source européenne.

Pour infléchir la position de la France, la Commission propose aux Etats membres de revenir vers eux pour leur demander de nouveau leur accord lorsque les négociations avec les Etats-Unis se pencheront sur le secteur audiovisuel, ce qui serait une première.

La présidence irlandaise de l’UE a proposé de son côté, sans exclure la culture, de fixer des lignes rouges à ne pas franchir en ce qui concerne le secteur audiovisuel: protection des subventions et des quotas, et la possibilité de les adapter aux nouveaux modes de diffusion numériques.

Le ministre irlandais, Richard Bruton, a dit vendredi ne pas tabler sur un échec de la réunion. “Mais bien que nous soyons très conscients de la sensibilité de ce secteur, nous pensons qu’il faut trouver un accord aujourd’hui”, a-t-il ajouté avant le début de la réunion.

En cas d’échec des discussions, les dirigeants européens devraient reprendre la main lors de leur sommet à l’agenda déjà bien rempli à la fin du mois. Mais ce serait une nouvelle manifestation éclatante de la désunion des Européens qui affaiblirait leur position face aux Américains avant même le début des négociations.

Cela mettrait également en difficulté le Premier ministre britannique David Cameron, qui attend beaucoup d’un futur accord commercial avec les Etats-Unis et espère annoncer le lancement officiel des négociations lors du G8 qui se tient en début de semaine prochaine en Irlande du Nord.