L’unité de gestion par objectif (UGPO) du tourisme tunisien est la structure de la mise en application de l’Etude stratégique de Roland Berger qui a été réalisée en 2009 et présentée début 2010. Ses objectifs principaux sont l’augmentation du nombre d’entrées de touristes pour atteindre 10 millions en 2016 et le doublement des dépenses par touriste.
Timidement annoncée, pas encore lancée officiellement, elle démarre au ralenti et bute déjà contre bon nombre d’obstacles.
A quoi sert l’UGPO? Quels sont les moyens dont elle dispose? Quels sont ses obligations de résultat et quel est son timing? Qu’en pensent les professionnels?
L’UGPO a pour mission de mettre en œuvre, sur une période de 5 ans, les 160 mesures qu’a préconisées l’étude Roland Berger. Une étude sur laquelle tous les intervenants, dans le cadre d’une approche participative qui mêle l’ensemble des professionnels du secteur privé et les administrations concernées, adhèrent.
Un directeur général a été nommé, des commissions composées et des réunions assez régulières et au rythme soutenu sont enclenchés. Seulement, au bout de quelques semaines d’exercice, la machine qui n’a pas encore fini son rodage, grince. Défaillances de présidences de commissions, commissions non constituées, démissions, absentéisme, aucune action n’est enclenchée…
Censée porter la restructuration du tourisme tunisien, l’UGPO est portée «fifty-fifty» par les professionnels via leurs fédérations et l’administration tunisienne. Seulement sans ressources ni volonté politique, le secteur est loin de se remettre en marche, si tant est que l’on convient de l’UGPO est censée porter l’innovation, la mise à niveau, la restructuration d’un tourisme qui reste vital pour l’économie tunisienne.
A l’eau les promesses des partis politiques…
Au lendemain du 14 janvier, tous les partis politiques voulaient faire de chaque cm2 du pays une destination touristique. Les ministres du Tourisme des gouvernements de transition qui se sont succédé ont mis tour à tour la stratégie 2016 au placard, sous prétexte qu’elle n’était pas assez révolutionnaire, pour ensuite l’en ressortir.
Qu’en ont-ils fait? Quels moyens lui ont-ils donnés? A part l’alibi politique, qui se soucie de la restructuration d’un secteur à 99% privé? Qui œuvre à changer l’image du secteur accusé de couler les banques et de plomber la destination par un mauvais service et le bradage des prix? Qui travaille sur la reprise en préparant l’avenir? Ridha Saïdi, ministre chargé des Affaires économiques dans le gouvernement de Hamadi Jebali, avait tout résumé en disant: «Le tourisme n’est pas la priorité du moment!».
Or, pour faire réussir cette transition, le pays a besoin de ressources et ceux du tourisme pèsent. Indépendamment des bilans financiers et politiques, puisqu’à chacun ses chiffres, ses arguments et tactiques, concrètement, les constats d’échec sont lourds.
La FTH fait peu…
Assistés, les professionnels du tourisme observent, résistent et souffrent. Si une partie d’entre eux manigance, beaucoup semblent peu engagés pour sauver leur propre secteur. Aux dernières élections de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), seuls 20% des promoteurs du parc hôtelier se sont impliqués dans les élections d’un nouveau bureau censé défendre leurs intérêts.
A l’exercice du pouvoir, les partis politiques de la Troïka ont réalisé la difficulté de la tâche! Ettakatol s’est délesté du portefeuille au profit d’un candidat indépendant qui s’est donné pour mission, presque uniquement, de sauver la saison, déclarant à qui veut l’entendre qu’il quittait son poste à la fin de l’année après les élections. Or, le calendrier politique du pays est encore loin d’être mis au point. Pour le moins que l’on puisse en dire, l’actuelle gouvernance resterait à la tête du tourisme pour encore au moins un an! C’est-à-dire chapotant 2014!
L’étude de la stratégie 2016, pas un sésame, mais…
Du côté de l’administration du tourisme, le constat est tout autant terrible. Dans les couloirs, on chuchote que pas moins d’une quinzaine de nominations de directeurs centraux sont en «stand by». Pour ne citer qu’un exemple, est-il admissible qu’un département aussi stratégique que celui du «Markteing» soit vacant depuis le 1er mars 2013? Terribles constats et une grosse interrogation: Où va le tourisme tunisien?
La stratégie 2016 du tourisme tunisien a été payée un million de dinars par les contribuables. Est-ce forcément le sésame qui va secourir le secteur? Pas forcément. Mais elle a au moins un mérite: elle est prête et l’on s’accorde sur son pragmatisme et son immédiateté.
Abasourdi, le secteur plonge dans un attentisme stérile, à moins d’un miracle…
Aujourd’hui, le tourisme tunisien a besoin de rassembleurs et de nouveaux bâtisseurs, de concertation et de solidarité. Il doit redevenir une priorité pour tirer tous les autres secteurs qui en dépendent, comme le transport, l’artisanat…
Le tourisme a besoin qu’on y croit à nouveau et tous ensembles pour sortir de l’engrenage de notre incapacité à travailler ensemble!
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Tunisie-Consultation nationale : Le tourisme se donne une feuille de route