épublique de Rennes, Thierry Pocquet du Haut Jusse, le 23 juin 2012 à Rennes |
[24/06/2013 16:24:28] Rennes (AFP) Sept personnes ont été mises en examen dans le cadre d’une vaste escroquerie à la Madoff concernant plusieurs centaines de victimes, a déclaré lundi le procureur de la République de Rennes, précisant que dix pays européens coopéraient à l’enquête.
“L’affaire est encore en cours et l’ensemble des éléments ne sont pas encore connus”, a insisté le procureur Thierry Pocquet du Haut-Jussé lors d’une conférence de presse. Ces informations avaient été divulguées en partie vendredi de sources proches du dossier.
Le 17 juin, une opération simultanée d’interpellations et de perquisitions a été menée dans dix pays européens visant “21 objectifs”, “tous remplis”, “14 en France et sept à l’étranger”, pour “escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé”, a expliqué le magistrat.
“Sur les 14 objectifs en France, sept ont été mis en examen” parmi lesquels quatre ont été placés sous mandat de dépôt, dont la tête du réseau, les trois autres étant placés sous contrôle judiciaire. Ces sept personnes sont toutes de nationalité française, a-t-il précisé.
Au plan français, environ 400 victimes ont été enregistrées pour “au moins 20 millions d’euros” mais il en reste quelques centaines d’autres à identifier. L’escroquerie s’est également développée à l’étranger, en particulier en Allemagne, a indiqué le magistrat.
“Il s’agit d’une escroquerie de très grande ampleur, sur un mode assez classique. Les démarcheurs faisaient miroiter des rendements mirifiques”, allant jusqu’à 30% par an, a précisé le procureur, ajoutant que l’essentiel des sommes allait sur des comptes aux Seychelles.
A l’instar de la cavalerie mise en place par l’Américain Bernard Madoff, condamné en 2009 à 150 ans de prison pour l’escroquerie de 20 milliards de dollars, “ceux qui réclamaient leurs intérêts étaient satisfaits par l’argent prélevé sur de nouvelles victimes”, a expliqué le procureur.
L’escroquerie aurait débuté en 2008. L’enquête a commencé au début de 2012 sur un signalement de Tracfin, la cellule gouvernementale chargée de la lutte contre les circuits financiers clandestins et le blanchiment de capitaux, qui avait repéré des mouvements de fonds anormaux sur le compte d’une personne dans le Calvados, a expliqué le directeur du SRPJ de Rouen, Philippe Ménard.
Une des premières victimes identifiées est un couple de la région lyonnaise qui avait “placé” 600.000 euros. Le montant moyen des contrats était de l’ordre de 50.000 euros. La mise initiale minimale était de 5.000 euros et le maximum pour chaque contrat de 300.000, a précisé M. Ménard. Le réseau s’est d’abord développé en Normandie, avant d’essaimer vers la Bretagne, l’Est, puis le Sud-est.
“Très peu de victimes avaient le sentiment de l’être. Certaines se pensent encore assises sur un tas d’or”, a souligné le procureur.
“La plupart du temps, il s’agissait d’argent qu’on ne peut pas placer officiellement”, a ajouté M. Ménard, et les épargnants étaient recrutés par l’intermédiaire de relations ou d’amis.
Des comptes bancaires de particuliers et de sociétés ont été gelés. Plusieurs biens immobiliers ont été saisis en France, de même que des bateaux et des véhicules de luxe, d’un valeur de revente actuelle estimée à 3 millions d’euros. L’un des mis en examen était déjà connu en Suisse pour une cavalerie.
Outre la France, les autres pays dans lesquels les opérations ont été menées simultanément en début de semaine dernière sont l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, l’Italie, Malte, la Suisse, Chypre, les Seychelles et le Portugal (archipel des Açores).
Cette affaire est l’occasion d’une “mobilisation et d’une coopération remarquables au plan européen”, grâce en particulier à Eurojust, agence judiciaire européenne basée à La Haye, où un centre de coordination a été mis en oeuvre pour cette affaire. “Le dossier commence”, a insisté l’un d’eux.