Au terme de sa mission dans notre pays, Ursula Schulze Aboubacar, représentante de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), a lâché une véritable bombe (pour certains) en révélant, à une radio locale, que les réfugiés de Choucha -qui sont restés en Tunisie et qui n’ont pas pu être casés dans un autre pays d’accueil, car ils n’ont pas le statut de réfugié-, ont refusé l’offre du gouvernement tunisien d’intégrer la Tunisie parce qu’ils estiment que les Tunisiens sont «racistes et xénophobes».
De prime abord, il est permis de comprendre que ces pauvres réfugiés tchadiens, somaliens, soudanais…, venus se greffer aux essaims des réfugiés légaux qui ont fui la guerre civile en Libye dans l’espoir de rejoindre leur pays de rêve, les Etats-Unis ou l’Australie, cherchaient à travers ce refus à mettre la pression, à quelques jours de la fermeture définitive du camp prévue pour le 30 juin, sur l’UNHCR pour qu’elle leur trouve un pays d’accueil plus sécurisant et plus rémunérateur que la Tunisie.
Néanmoins, en recoupant ce refus avec des incidents discriminatoires à l’endroit des noirs qui ont eu lieu cette année en Tunisie, on est tenté de leur donner raison et d’accepter cette réalité: les Tunisiens sont, effectivement et dans leur majorité, racistes et xénophobes.
Pour ne citer que l’incident le plus récent et le plus marquant, plus exactement celui qui a eu lieu le 30 avril 2013, lorsqu’un immeuble de Tunis, habité par des étudiants d’Afrique subsaharienne a été “caillassé“ par des jeunes forcenés. Et lorsqu’un des étudiants noirs descend dans la rue pour les sermonner, il a été insulté et agressé… Pis, quand la police arrive sur les lieux, c’est lui qu’elle arrête le premier avant de le relâcher deux heures après. A l’origine de cet incident, une altercation entre un étudiant sénégalais et un chauffeur de taxi. Ce dernier a qualifié le premier de «guera-guera» qui signifierait (singe).
D’ailleurs, cet incident a ému leurs voisins et amené l’Association de défense des droits des Noirs (ADAM) à Tunis à organiser, le lendemain, c’est-à-dire le 1er mai, une manifestation, devant l’Assemblée nationale constituante pour protester contre cet acte discriminatoire -qui est loin d’être isolé- et pour revendiquer des lois devant protéger la minorité noire en Tunisie.
A noter que, en plus des noirs tunisiens, quelque 6.000 étudiants venus d’Afrique subsaharienne suivent des études dans des universités huppées en Tunisie. De ce fait en toute logique, la Tunisie a besoin de ces étudiants africains pour faire marcher les universités privées qui commencent à naître comme des champignons à la faveur de la forte demande d’un enseignement supérieur de qualité. C’est une véritable manne de devises.
Mieux, aux dires de beaucoup de Tunisiens, les étudiants africains venus du sud du Sahara seraient, dans leur écrasante majorité, pacifiques. Ils vivent presque en ghetto. Il est rare, pour ne pas dire impossible, de trouver un Tunisien accompagné d’une noire ou le contraire.
Dans ce même ordre d’idées, la délocalisation temporaire de la Banque africaine de développement a montré davantage cette face cachée du “Tunisien raciste“. La plupart d’entre eux ont senti ou ont été plutôt victimes d’actes racistes. Et on comprend aisément le soulagement qu’ils ont eu à l’idée de repartir en Côte d’Ivoire.
Par ailleurs, ces étudiants, en se déplaçant en petits groupuscules, avec leurs accoutrements africains, égayent et animent, de jour comme de nuit, les rues de Tunis et lui confèrent la dimension d’une capitale multiculturelle où il fait bon de vivre.
Conséquence, comme le disait si bien Maha Abdelhamid, co-fondatrice d’Adam, si le racisme à l’encontre des noirs était occulté au temps de Bourguiba et de Ben Ali, il est aujourd’hui dénoncé et condamné. L’idéal serait d’évoluer vers une prise de conscience salutaire dans l’intérêt des deux parties.