étaire au Trésor Maria Luis Albuquerque, en octobre 2012 (Photo : Patricia de Melo Moreira) |
[02/07/2013 11:37:31] Lisbonne (AFP) La démission surprise du ministre portugais des Finances lundi a mis a nu les difficultés de ce pays sous assistance financière à appliquer la sévère cure de rigueur qu’exigent ses créanciers internationaux, mais Lisbonne ne devrait pas pour autant changer de cap.
“Vitor Gaspar s’en va, l’austérité reste”, résumait mardi le quotidien économique Jornal de Negocios, au lendemain du départ de l’emblématique ministre des Finances, principal responsable de la mise en oeuvre du plan de redressement négocié il y a deux ans avec l’Union européenne et le Fonds monétaire international.
Dans sa lettre de démission, M. Gaspar a reconnu que son incapacité à atteindre ses objectifs budgétaires avait “miné (sa) crédibilité” et justifié sa décision par “une érosion significative du soutien de l’opinion publique” au plan d’aide international.
La cure de rigueur sans précédent qu’il a mise en oeuvre a provoqué une récession économique et un taux de chômage plus importants qu’anticipé. Le déficit s’élevait fin mars à 10,6% du PIB pour un objectif, déjà assoupli à deux reprises, de 5,5% à la fin de l’année.
Le gouvernement du Premier ministre Pedro Passos Coelho est donc de plus en plus isolé sur la scène politique nationale, comme en témoigne la quatrième grève générale organisée la semaine dernière par les syndicats ou l’appel des confédérations patronales à reconnaître l’échec d’une stratégie visant à restaurer à tout prix la crédibilité du Portugal aux yeux de ses bailleurs de fonds et des marchés financiers.
Jugeant que “beaucoup a été fait pour consolider les finances publiques”, la Commission européenne a aussitôt appelé Lisbonne à “maintenir le rythme des réformes et oeuvrer à élargir le soutien au programme”.
M. Gaspar sera remplacé dès mardi par sa secrétaire d’Etat au Trésor, Maria Luis Albuquerque, ce qui “ne viendra pas changer les règles du jeu”, a estimé David Schnautz, analyste à la Commerzbank.
Berlin “réconforté”
Le politologue Antonio Costa Pinto a affirmé également que “la marge de manoeuvre est si étroite qu’à moins d’un allégement décidé à l’extérieur, l’avenir des Portugais restera marqué par la sueur et les larmes”.
Pour Ricardo Santos, économiste à la banque BNP Paribas, la transition au poste des Finances devrait être “relativement paisible” dans la mesure où Mme Albuquerque, ancien bras droit de M. Gaspar, “était directement impliquée dans le retour du Portugal aux marchés”, un objectif essentiel pour que le plan de sauvetage soit conclu dans un an comme prévu.
A Berlin, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a regretté le départ de son “collègue et ami” Vitor Gaspar, jugeant toutefois “reconfortant de savoir que le Portugal gardera le cap et que Mme Albuquerque continuera le bon travail fait jusqu’ici”.
La nouvelle ministre des Finances “est peut être appréciée à Bruxelles, mais elle n’a pas de réel poids politique”, s’inquiétait en revanche le quotidien Publico, soulignant par ailleurs qu’elle est déjà fragilisée par sa gestion d’un dossier épineux concernant des produits financiers hautement spéculatifs souscrits par plusieurs entreprises publiques.
La démission de M. Gaspar intervient à un moment délicat pour le Portugal, qui s’est engagé à boucler une importante réforme de l’Etat d’ici l’arrivée le 15 juillet d’une nouvelle mission d’évaluation dépêchée par la “troïka” UE-BCE-FMI représentant ses bailleurs de fonds.
Puis, pour l’ensemble de la zone euro, “la démission du ministre des Finances portugais risque de relancer les craintes sur la capacité des pays périphériques européens à sortir de la crise”, ont considéré à Paris les stratégistes chez Crédit Mutuel CIC.
“Ce doute vient s?ajouter à ceux sur l?Irlande suite à la révision à la baisse du PIB la semaine dernière et la lenteur des avancées sur l?Union bancaire, sur l?Espagne, dont le taux de chômage reste à des niveaux insoutenables, et sur l?Italie, où le gouvernement tarde à détailler sa stratégie pour éviter un retour du déficit au-dessus de 3% du PIB”, ont-ils précisé dans une note d’analyse.