Halte à la corruption et à l’évasion fiscale. C’est le cri de guerre commun à Eva Joly et Sami Remadi. La société civile peut-elle mettre en échec l’internationale de la corruption et de l’évasion fiscale? Comment mettre à bas le bouclier des paradis fiscaux, qui maintiennent l’enfer de la précarité pour les peuples de la planète.
Comme dans tout combat de la vertu contre le vice, il faut avoir le souffle long. La société civile serait le troisième poumon de la communauté internationale dans cette nouvelle cause des peuples.
Eva Joly et sami Remadi ont joliment intervenu en tandem ce samedi 29 juin, sur le thème, sensible, de la corruption et de l’évasion fiscale. Sami Remadi appelait l’attention de tous sur l’ampleur du phénomène. Près de 100 milliards de flux d’aide vont vers les pays du sud. Il en repart presqu’autant sous forme de biens mal acquis à destination des paradis fiscaux.
L’argent noir, c’est une ponction sur les avoirs des peuples. C’est un manque à gagner privant les Etats de la manne fiscale, frustrant les citoyens de plus d’infrastructure et de plus de prestations sociales, donc de bien-être. Il constitue, par conséquent une violation aux droits de l’Homme.
Relayant son hôte, Eva Joly appellera l’attention de chacun sur la responsabilité collective pour participer à la traque du fléau, car le dispositif mondial de protection est insuffisant. La problématique ainsi soulevée comporterait donc un double fond. C’est à la fois une affaire de droit et une question d’engagement politique. Elle devient obligation citoyenne. La messe est dite. La lutte contre de la corruption devient la nouvelle cause des peuples.
La collectivité internationale se mobilise
La cause de la lutte contre la corruption a beaucoup avancé. Il y a eu une prise de conscience planétaire et la perception du phénomène a pris une dimension à l’échelle de l’humanité tout entière. Auparavant assimilée à une charge d’entreprise, pour raison de facilitation du business des multinationales, la corruption est devenue un moyen d’oppression des peuples par la précarité, par la dimension qu’elle prend à l’heure actuelle. On cite que les dirigeants de la Kaboul Bank en Afghanistan auraient détourné 900 millions de dollars US, soit 6% du PIB du pays. A l’échelle de la Tunisie, les avoirs du clan des BAT (pour Ben Ali – Trabelsi) avoisinent l’encours de la dette publique en devises.
La communauté internationale est en émoi et, depuis 1994, l’ONU a pris l’affaire en mains. Un dispositif de surveillance planétaire a été mis en place. Ainsi est né GAFI qui a des antennes nationales. Chez nous c’est le GTAF.
D’autres mécanismes sont venus plus tard. Ainsi en est-il de la liste de PEPS -Personnes politiques exposées- et qui sont sous surveillance. Pareil pour l’obligation de déclaration automatique des flux de transferts de cash, par les institutions financières. C’était nécessaire, mais est-ce suffisant?
Les défauts du système
Le système montre quelques signes d’efficacité. Des progrès sont palpables. L’affaire Jérôme Chuzac, ce ministre qui s’est fait interpeller par son banquier suisse sur ses dépôts, est une preuve que ça marche, dans certains cas. Mais le blanchiment et les flux financiers noirs représentent un business pour les institutions financières et leur coopération pourrait en pâtir.
L’internationale de la corruption use et abuse de ruses. Elle feinte en recourant aux prête-noms et autres sociétés écran pour détourner la dénonciation. Dans les trusts anglais, on ne connaît jamais le destinataire final des flux noirs. Mais il ne faut pas baisser la garde et continuer le combat.
Non au chantage au sauvetage des banques au prix de l’austérité!
La corruption, c’est aussi le détournement des fonds d’emprunt, ce qui constitue la dette “odieuse“. En Tunisie, l’audit public est en cours pour déterminer le montant en question. Les conférenciers considèrent que les peuples n’ont pas à payer pour les dictateurs ou, cas extrême, pour le sauvetage des banques privées. C’est le peuple islandais qui a montré l’exemple, en refusant d’éponger l’ardoise des créances toxiques -subprimes- des banques privées.
Le chantage au sauvetage des banques au prix de l’austérité ne passe plus. Les Islandais, stoïques, en ont payé le prix, essuyant une dévaluation de 60% de leur monnaie.
Les Américains, plus dociles, ont accepté, de payer dans le cadre du TARP 1.000 milliards de dollars pour redonner de la santé à leurs banques. L’endettement public américain en a explosé, réduisant les moyens de l’Etat au détriment des citoyens.
L’heure pour une gouvernance publique populaire a sonné. Les organisateurs considèrent que la société civile peut s’acquitter de cette mission. Cela est plausible.
Qu’en sera-t-il dans les faits? Il faut attendre pour voir.