Une
certitude : à l’exception des Frères musulmans, les laïcs, progressistes,
libéraux, minorités… de tout le monde arabe ont bel bien accueilli, avec une
réelle joie, la déposition, le 3 juillet 2013, du président Morsi par l’armée
avec le concours d’une grande partie du peuple égyptien.
C’est de toute évidence un événement historique majeur qui va marquer pour
longtemps la région du monde arabe. Il vient rappeler la “révolution de juillet
1952”, lorsque le président historique d’Egypte, Jamel Abdennasser, avait
destitué, pacifiquement, le roi Farouk, et avait fondé la première République en
Egypte et consacré le rôle de l’armée en tant que cerbère des institutions du
pays et de sa stabilité, rôle qu’elle avait assumé pendant soixante ans.
Néanmoins, par delà ce soulagement, cette déposition du premier président civil
égyptien -même s’il est en fait embrigadé par une secte religieuse plus
disciplinée que l’armée- compromet, encore une fois, les espoirs placés par les
jeunes arabes dans les révolutions du printemps arabe, et leur corollaire,
l’espoir d’édifier pour la première, dans cette région, des démocraties
internationalement reconnues.
Conséquence: la démocratie arabe est encore une fois un projet politique renvoyé
aux calendes grecques, pour ne pas dire compromis à jamais, et ce au regard de
la destruction massive qui prévaut particulièrement en Syrie, en Irak et en
Libye. Il faudra plus d’un siècle pour que ces pays retrouvent la stabilité et
la voie du progrès.
Pis, rien n’exclut que d’autres pays, comme la Turquie, la Tunisie et le Yémen
puissent connaître le même scénario.
A l’origine de cet échec cuisant, trois éléments fondamentaux. D’abord, la
dimension fasciste de tous les systèmes politiques adoptés dans cette zone,
depuis le processus de décolonisation: le socialisme des années soixante, le
libéralisme et l’ultralibéralisme (1970-2011) et l’islam politique (2011-2013).
Aucun système n’a réussi à jeter les bases d’une démocratie pérenne et d’une
coexistence pacifique entre des citoyens aux convictions différentes. Chaque
système s’est comporté comme une entité clanique, comme si l’Histoire commençait
avec lui et comme s’il allait s’éterniser au pouvoir.
Mention spéciale pour l’Islam politique. Les religieux, qui ont accédé au
pouvoir grâce aux Occidentaux, se sont comportés dans leur pays comme des
éléphants dans des magasins de porcelaine. Grisés par le pouvoir et obsédés par
leur projet de restaurer leur Califat, ils ont œuvré à gommer les Histoires de
pays de plus de 3000 ans, à déstructurer les rouages des Etats, et, surtout, à
gagner du temps (report sine die des échéances électorales à des dates, à
aggraver l’insécurité et la précarité de la vie (cherté de la vie, pénuries,
chômage, pauvreté extrême…), avec en prime l’émergence d’essaims terroristes.
Vient ensuite l’absence de contre-stratégies arabes aux complots fomentés contre
les intérêts de cette région par les puissances étrangères, particulièrement des
Etats-Unis.
Et là, un élément d’Histoire s’impose. Les pays arabes, dont les ressources sont
utilisées, actuellement, pour financer des guerres auxquelles ils ne devaient
pas en principe prendre part (cas des guerres civiles en Afghanistan, en Irak,
en Syrie…), n’ont jamais été, depuis la dissolution de l’Empire ottoman,
souverains et maîtres de leurs décisions. Ils ont été hélas toujours aux ordres
d’une puissance étrangère.
Enfin, il y a la religion islamique qui ne serait pas compatible avec la
démocratie même si cela pourrait déplaire au président français François
Hollande qui, pour contourner l’expression de «l’islamisme fasciste» de son
ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, avait estimé, dans un souci de plaire aux
nahdhaouis et dérivés, le contraire lors de sa récente visite en Tunisie.
Effectivement, en revendiquant, constamment, l’application de la chariaâ et la
restauration du 6ème califat, les islamistes ont prouvé, après leur accès au
pouvoir, qu’ils n’ont aucune chance de contribuer, un jour, à un quelconque
processus démocratique.
La solution résiderait, à notre avis, dans l’exploitation de la deuxième
révolution de juillet 2013 en Egypte pour séparer la religion de l’Etat.
Les Occidentaux doivent tous leurs progrès à cette séparation salutaire. Les
pays d’Europe centrale et orientale (PECO) qui ont opté, récemment, pour la
démocratie, ont réussi, en un temps record, leur transition démocratique, parce
que justement il n’y avait pas cette de problématique religieuse.