à Hanover, près de Baltimore (Photo : Robert MacPherson) |
[19/07/2013 07:30:02] Hanover (Etats-Unis) (AFP) Comme de nombreux Américains, Travis Lerol a été le propriétaire de nombreuses armes à feu dans sa vie, mais son “Liberator”, un pistolet à un coup, est unique: il l’a construit lui-même dans son garage, avec une imprimante 3D.
Mais “il n’a été capable de tirer qu’une seule fois, sur les 200 fois que j’ai essayé”, soupire cet ingénieur de 31 ans, interrogé par l’AFP chez lui à Hanover, près de Baltimore, dans l’est des Etats-Unis.
Le mécanisme de mise à feu, une sorte de tête d’épingle, “semble peu fiable. J’ai entendu dire que de nombreuses personnes qui avaient imprimé des Liberators avaient eu aussi des problèmes”, ajoute-t-il, en assurant qu’il voulait surtout “s’amuser. J’ai d’autres armes qui sont meilleures. Ca ne va pas les remplacer”.
Ressemblant vaguement à son homonyme, une arme parachutée par les Américains aux résistants français pendant la Seconde Guerre mondiale, le Liberator à un coup de calibre .380, en plastique, est la première arme à feu que l’on peut fabriquer à partir d’une imprimante 3D.
Son guide de fabrication avait été téléchargé 100.000 fois en mai dernier sur le site de Defense Distributed, une association qui milite pour la fabrication de ce genre d’armes en utilisant la technologie 3D.
Le département d’Etat qui contrôle les licences et exportations d’armes via un service spécialisé, le “Directorate of Defense Trade Controls”, avait fait supprimer la page. Mais les premiers téléchargements avaient été largement repostés sur la toile.
à Hanover, près de Baltimore (Photo : Robert MacPherson) |
“Je crois que le guide a été téléchargé au moins un million de fois”, estime Cody Wilson, l’étudiant en Droit de l’Université du Texas qui a créé Defense Distributed, dans un courriel à l’AFP.
Mais comme l’affirme M. Lerol, un des rares à avoir admis publiquement avoir fabriqué le pistolet, “beaucoup ne l’ont pas encore imprimé”.
Des recours en justice ont été menés à New York et en Californie pour faire interdire les armes en 3D et des propositions de loi sur les “armes indétectables” soumises à la commission judiciaire de la Chambre des Représentants.
“D’un point de vue purement constitutionnel, c’est une atteinte à l’égalité devant la loi, car la production individuelle d’armes est légale aux Etats-Unis”, assure M. Wilson.
Les armes à feu sont source de polémique dans le pays depuis le massacre en décembre dernier de l’école Sandy Hook de Newtown (Connecticut, nord-est) au cours duquel 20 enfants ont été tués.
Dans un pays où se comptent quasiment autant d’armes (300 millions estimées) que d’habitants (315 millions), et où les armes font plus de 30.000 morts par an, le droit de “porter des armes” est inscrit dans la Constitution.
“Les armes peuvent être fabriquées par des personnes qui ne disposent pas de licence pour le faire, tant qu’elles ne sont pas proposées à la vente ou à la distribution”, dit l’agence officielle (Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives, ATF) sur son site internet.
De fait, depuis longtemps, les amateurs organisent des “fêtes” pour monter des armes telles que le fusil d’assaut AK-47 à partir de pièces achetées sur le web.
M. Lerol, qui fait du tir sur cible, a déjà fabriqué deux Liberators avec une imprimante 3D de 1.300 dollars. Mais pas seulement. Il a aussi créé une théière chinoise, une chaussure plate à semelle en caoutchouc, des pièces d’échec et des pièces de fusil.
Ses amis l’ont un peu regardé de travers le jour où il a amené son Liberator au club de tir mais il n’en a cure : “les gens ont souvent peur des nouvelles technologies. Ils ne les comprennent pas et ils s’inquiètent des conséquences”, notamment terroristes.
“Cette arme n’est pas vraiment indétectable” dans les aéroports, assure-t-il. “Et je ne la vois pas utilisée par des malfrats. Il y a tant d’autres armes disponibles, bien meilleures”.