é du groupe pharmaceutique britannique GSK à Shanghai, le 1er juillet 2013 (Photo : Peter Parks) |
[24/07/2013 07:20:43] Shanghai (AFP) L’enquête pour corruption ouverte par Pékin contre le groupe pharmaceutique GlaxoSmithKline (GSK) rappelle aux firmes étrangères les dangers auxquels elle sont confrontées quand elles cherchent à se renforcer sur le marché chinois.
GSK est accusé d’avoir versé des pots-de-vins pour un total de presque 500 millions de dollars afin de doper ses ventes. Quatre cadres du groupe, de nationalité chinoise, ont été interpellés, tandis que le directeur financier de GSK en Chine s’est vu interdire de quitter le territoire.
“A mon avis, GSK n’est pas pire” que d’autres groupes, mais “je pense que dans leur cas, les révélations d’un +donneur d’alerte+ rendaient un peu plus difficile d’ignorer” leurs agissements, a commenté Ben Cavender, analyste du cabinet China Market Research Group.
Le versement de pots-de-vins par GSK en Chine avait en effet été évoqué plus tôt cette année par le Wall Street Journal, qui citait une source anonyme. Le groupe avait à l’époque démenti toute malversation.
Selon la police, des employés de GSK versaient de l’argent aux fonctionnaires, d’autres firmes pharmaceutiques, ainsi qu’à des hôpitaux et des médecins, notamment par l’intermédiaire d’agences de voyages.
“Le gouvernement chinois s’oppose fermement à la corruption dans les milieux économiques, sous quelque forme que ce soit. Toute entreprise, qu’elle soit chinoise ou étrangère, doit être punie selon la loi” le cas échéant, a assuré Shen Danyang, porte-parole du ministère du Commerce.
Mais pour les experts, il est peu probable que GSK soit le seul concerné par de telles pratiques, étant donné le manque de transparence du système médical chinois et les maigres revenus des docteurs.
é, le 4 juillet 2013, à Pékin (Photo : Wang Zhao) |
Le New York Times a ainsi rapporté que d’autres entreprises pharmaceutiques internationales avaient recouru aux services de la principale agence de voyage impliquée dans l’affaire GSK.
La police chinoise a également interrogé trois employés d’AstraZeneca, autre grand laboratoire britannique, et ont visité les bureaux du belge UCB, selon des déclarations de ces deux groupes, qui n’ont cependant pas spécifié pour quelles raisons ils étaient visés.
Les autorités avaient annoncé début juillet leur intention d’enquêter sur 60 compagnies pharmaceutiques en vue de contrôler les tarifs qu’elles pratiquent.
Une enquête distincte de la Commission d’Etat pour le Développement et la Réforme (NDRC) vise des producteurs de laits infantiles (dont le français Danone et le suisse Nestlé), soupçonnés de s’être entendus sur leurs prix de vente.
Autant de signaux destinés à accroître la pression sur les entreprises étrangères, incitées de facto à baisser leurs prix de détail, mais qui rappellent aussi les dangers qu’il y a à faire des affaires en Chine.
L’affaire GSK fait ainsi écho aux déboires du géant minier anglo-australien Rio Tinto, dont quatre employés avaient été emprisonnés en 2010 pour avoir accepté des pots-de-vins d’aciéristes chinois.
Depuis le début des réformes économiques dans le pays en 1978, le géant chinois a reçu plus de 1.300 milliards de dollars en investissements étrangers.
Mais les entreprises se plaignent de ne pas jouer à armes égales avec leurs concurrents chinois: “La Chine (…) est progressivement revenue au favoritisme pour les groupes publics et champions nationaux”, s’est désolé dans un rapport la Chambre américaine de commerce en Chine.
Sur les marchés du médicament et du lait en poudre, visés par les récentes enquêtes, les groupes étrangers se trouvent cependant particulièrement bien positionnés.
La Chine est le premier marché du monde pour le lait infantile, et suite à un scandale de lait contaminé ayant tué six nourrissons en 2008, la demande pour les marques étrangères — jugées plus sûres — a explosé dans le pays, avec une hausse sensible des prix.
De même, les médicaments de fabrication étrangère sont perçus comme de meilleure qualité que leurs équivalents chinois entachés par des scandales — dont l’exécution en 2007 du patron de l’autorité de régulation du médicament, accusé d’avoir reçu des pots-de-vins en échange de l’approbation expéditive de nouveaux produits.
Pour Zhao Zhen, du cabinet Sublime China Information, plusieurs firmes au-delà de GSK sont dans la ligne de mire des autorités, de plus en plus soucieuse de faire baisser le coût des médicaments.
“Il y a des signes montrant que c’est un défi lancé à tous les groupes pharmaceutiques étrangers”, a-t-il souligné.
Pour autant, ces enquêtes ne devraient pas freiner l’afflux des investissements étrangers, estiment les analystes.
“Non, je ne pense pas que ça va stopper les investissements. La Chine est un marché trop important — il y a bien trop de croissance ici” pour pouvoir ignorer la deuxième économie mondiale, a souligné M. Cavender.