L’un des moments fondateurs de l’histoire de la Tunisie est sûrement ce 25 juillet 1957 où les membres de la première Constituante votent unanimement l’abolition de la monarchie husseinite et l’institution de la première République de l’histoire de la Tunisie.
Nous fêtons aujourd’hui le 56ème anniversaire de la République à un moment aussi historique que celui de son institution, puisqu’il s’agit des prémisses de la fin de cette étape transitoire après la Révolution du 14 janvier, autre moment fondateur dans notre histoire.
Nous pouvons fêter fièrement cet anniversaire malgré tout le pessimisme ambiant, et nous pouvons clamer haut et fort que les valeurs de la République ont triomphé des mauvaises intentions et des pernicieux calculs de ceux qui n’ont jamais admis ces valeurs.
Le triomphe des valeurs républicaines en 1957 vient non seulement après une âpre bataille avec les colons français mais également en conclusion d’une autre bataille d’idées qui a commencé dès le milieu des années 30 entre le Destour de Abdelaziz Thâalbi et le Néo Destour de Bourguiba et ses compagnons du Congrès du 2 mars 1934 de Ksar Helal.
L’Etat que nous avons construit depuis 1956, avec Habib Bourguiba et contre lui très tôt (les premiers procès politiques ont débuté dès avant la fin de la première décennie en 1968!), avec Zine El Abidine Ben Ali et souvent contre lui (les premières suspensions des journaux ont commencé fin 1988 avec le journal «Le Phare»), cet Etat là est un Etat civil, un Etat de Droit. Un Etat qui a très tôt institué l’école obligatoire, les soins pour tous, qui a imposé les droits de la femme d’une manière non encore atteinte, après 60 ans, dans aucun pays arabe (!). Cet Etat là est celui de la République Tunisienne qui a, au fil du temps, fait naître une société organisée, des syndicats combattants, des associations à la pointe de la modernité et a fini par élaborer un projet de société qui, tout en gardant enracinées ses valeurs authentiques d’arabité et d’islam, a pu s’ouvrir sur la modernité de l’humanité et a pu s’y intégrer et s’y épanouir.
Alors nous pouvons être fiers de notre République malgré tous les échecs et malgré toutes les épreuves inhérentes à toute démarche humaine.
Mais la République et son héritage ont également joué le rôle décisif dans les transformations en cours depuis la Révolution.
C’est la société civile tunisienne, héritière de la République, qui a affirmé avec force l’héritage de la République forçant les islamistes majoritaires à l’ANC à reculer chaque fois et d’abandonner progressivement leur stratégie de «Tamkin» préparant l’étape suivante d’installation de «dawlet el Islam». Si le scénario égyptien ne risque pas de se produire en Tunisie aujourd’hui ce n’est nullement parce que nous ne saurons nous mobiliser en faveur de la République mais surtout parce que notre mobilisation a déjà casser la machine de guerre «Ikhwanis» avant d’en arriver à l’insurrection.
Qu’ils l’avouent ou qu’ils le taisent, les islamistes au pouvoir en Tunisie, et malgré la cabbale qu’ils tentent contre l’administration républicaine, sont conscients que le pays est divisé et qu’ils ne représentent qu’une partie de cette mosaïque riche et diverse. Ils sont conscients qu’ils peuvent tout à fait soit perdre les élections soit les gagner sans majorité. La République tunisienne impose à eux comme aux autres une scène politique variée et riche de son extrême gauche à son extrême droite salafiste. Le peuple et le peuple seul pourra alors, par son vote, donner la direction à suivre; et en toute évidence, ce n’est pas un chèque en blanc qui sera donné aux islamistes après leur expérience de la période transitoire. Cette transition qu’ils cherchent maintenant à perpétuer au maximum afin d’engranger ses fruits au maximum mais rien n’y fait …
La nature du Tunisien, ouvert, tolérant, centriste dans ses positions en général, et l’héritage de la République, civile, démocratique, ouverte et universelle, ont constitué le rempart qui a fait échouer tous les projets rétrogrades que certains ont cru opportuns de nous importer du fin fond des âges!