est de Moscou, le 28 mai 2013) (Photo : Eleonore Dermy) |
[30/07/2013 14:40:49] Moscou (AFP) Le géant russe des engrais agricoles Uralkali a envoyé une onde de choc sur les marchés mardi en rompant ses liens avec son partenaire bélarusse pour les exportations, au risque d’une chute des prix douloureuse pour l’ensemble du secteur.
L’action du groupe, qui contrôle 20% de la production mondiale de potasse, le minerai employé pour la fabrication des engrais, s’effondrait vers 14H15 GMT de 17,82% à 153,83 roubles (3,51 euros) à la Bourse de Moscou.
A New York, son principal concurrent, le canadien Potash plongeait de 22,64% à 29,32 dollars, Mosaic de 22,64% 40,97 dollars et Agrium de 5,73% à 86,19 dollars. L’allemand K+S chutait de 22,37% à 20,81 euros à Francfort.
Les annonces d’Uralkali “mettent fin au cartel mondial de fourniture de potasse”, ont résumé les analystes de Bank of America Merrill Lynch.
Jusqu’à présent, le groupe russe concluait et appliquait ses contrats d’exportation via BPC, une coentreprise détenue avec le bélarusse Belaruskali, un autre grand producteur.
Mais les autorités de cette ex-république soviétique ont décidé d’ouvrir les exportations de potasse en décembre dernier et “depuis, Belaruskali a effectué plusieurs livraisons hors du cadre fourni par BPC”, a expliqué le patron d’Uralkali, Vladislav Baumgertner, dans un communiqué.
“Ces actes sont inacceptables et ont détruit les bases de notre coopération. Vu la situation, nous sommes contraints de rediriger nos exportations via notre propre courtier”, a-t-il ajouté.
Une porte-parole de la société a indiqué à l’AFP que ce changement de stratégie allait se traduire par une concurrence accrue et que les prix de la potasse pourraient tomber à 300 dollars par tonne d’ici à la fin de l’année, contre environ 400 dollars actuellement.
“Nous espérons compenser cela par une production plus importante et des baisses de coûts”, a-t-elle précisé.
D’ores et déjà, pour ménager ses finances, Uralkali a décidé de mettre fin à son programme actuel de rachat d’actions, pour lequel le groupe a déjà dépensé 1,2 milliard de dollars.
Ces interventions avaient apporté un soutien important au cours de son action ces derniers mois.
L’allemand K+S a exprimé son “irritation” après les déclarations de son concurrent russe.
“Nous ne comprenons pas les prix dont les médias se sont faits l’écho, qui de notre point de vue ne reflètent pas la situation actuelle de l’offre et la demande”, a tempêté le groupe dans un communiqué.
La séparation des partenaires de BPC est “une nouvelle désastreuse pour Uralkali et le secteur de la potasse dans le monde”, ont estimé les analystes de Deutsche Bank.
“Cela marque la fin d’une ère de discipline sur les prix dans le secteur”, ont-ils jugé.
Les deux géants mondiaux des engrais, Uralkali et Potash, opèrent tous les deux via des groupements, BPC pour le russe, Canpotex pour le canadien, allié à son compatriote Agrium et l’américain Mosaic.
Ces alliances, comptant pour 70% des approvisionnements de la planète, se sont traduites par une certaine discipline des producteurs, qui réalisent des marges d’exploitation dépassant le plus souvent les 50%, sur les prix et les volumes extraits des mines.
Confronté fin 2012 et début 2013 un trou d’air dans la demande, Uralkali a ainsi préféré réduire les cadences de ses mines dans l’Oural plutôt que de brader sa production.
En moyenne sur l’année 2012, le groupe a fonctionné à 80% de ses capacités, et à seulement 65% au premier trimestre 2013. La porte-parole a précisé qu’il était déjà revenu à plein régime et qu’il comptait y rester.
“BPC et Canpotex ne vont plus contrôler l’offre et la structure du marché va probablement changer, avec des volumes en hausse et des prix en baisse”, a jugé Bank of America Merrill Lynch.
Le marché de la potasse est très sensible aux fluctuations des produits agricoles, les périodes d’envolée des cours encourageant les agriculteurs à consommer plus d’engrais.
Après quelques années difficiles, Uralkali prévoit une hausse de la demande mondiale à plus de 53 millions de tonnes en 2013, se rapprochant de son pic de 2011 (57 millions).