Tout indique que le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Chedly Ayari, s’est fortement inspiré de cette maxime du baron Joseph Dominique Louis (France) qui fut à cinq reprises ministre français des Finances sous les deux Restaurations et la Monarchie de Juillet, pour introduire le rapport de la BCT pour l’exercice 2012.
Ce document, très attendu par les observateurs de la chose tunisienne et par les investisseurs, comporte une évaluation de la situation économique du pays, ainsi que l’activité de la BCT et du secteur financier et bancaire en Tunisie, au cours de l’année 2012.
Le rapport fait état d’une amélioration nette par rapport à l’exercice 2011. Il rappelle que cette année a été marquée par la fragilisation de toutes les composantes du développement du pays: chute-record du taux de croissance économique, massification du chômage, particulièrement celui des jeunes diplômés, creusement des inégalités régionales, détérioration des grands équilibres macroéconomiques internes et externes: déficit budgétaire et déficit des opérations courantes en hausse, aggravation de l’endettement public extérieur, accélération du rythme de la dépréciation du taux de change du dinar vis-à-vis du dollar US et de l’Euro, épuisement rapide des avoirs nets en devises, dérive de l’inflation de l’indice des prix à la consommation…
«Et cerise sur le gâteau, dégradation accélérée du risque souverain tunisien par la quasi-totalité des agences internationales de notation».
Pour 2012, le rapport fait état de zones verdoyantes, voire de pousses vertes selon les termes du président américain, Barak Obama.
Le rapport en rappelle l’inflexion remarquable, vers le meilleur, enregistrée par le taux de croissance du PIB, arrêt de la progression du taux de chômage, nette amélioration du stock des avoirs nets en devises étrangères…
Faut-il pavoiser pour autant? Le rapport relève à ce propos que les risques négatifs, ceux qui menacent de détériorer davantage les équilibres macroéconomiques du système de développement national tunisien, persistent toujours. «Aucune des distorsions évoquées pour 2011 n’aura été réduite ou contenue, suffisamment en tout cas, pour autoriser quiconque de parler de fin de crise, encore moins de reprise durable. Bien au contraire», note Chedly Ayari dans le mot du gouverneur.
Pour 2013, le rapport relève que «nombre de ces distorsions ont même empiré. Cet exercice s’annonce, au regard des analyses, plutôt morose, en raison «d’une année politique percluse encore d’incertitudes diverses, quant aux grandes échéances constitutionnelles et électorales censées annoncer l’épilogue d’une transition dont la société politique comme la société civile souhaitent vivement la fin».
Pour en sortir, le rapport propose, sans grande conviction, une profession de foi pour un retour durable de l’économie nationale à un nouveau cycle de croissance forte, soutenable et inclusive. Il s’agit de «cibler ce double processus vertueux de maximisation des risques positifs/minimisation des risques négatifs».
Décryptage: la reprise économique dépendra de l’amélioration du climat politique dans le pays et la réalisation prévue de 4,5% de croissance du pays en 2013 demeure hélas une simple conjecture.
Ainsi, si rien n’est fait, ce taux ne dépasserait guère les 2%, estime Chedly Ayari dans une interview faite récemment au journal «Le Monde». Le titre choisi pour cette interview «le politique bloque l’économique» est fort révélateur du degré de corrélation entre ces deux sphères.