Tunisie : 150.000 personnes à la Place du Bardo pour crier leur colère

Par : TAP

Des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées, dans la nuit du mardi à mercredi, à la place du Bardo, lors d’un mouvement organisé par l’Initiative pour la recherche de la vérité sur l’assassinat de Chokri Belaid (IRVA).

Les manifestants, dont le nombre a été estimé par les organisateurs à 150 mille, ont notamment appelé à la dissolution du gouvernement, de l’Assemblée nationale constituante et des Ligues de protection de la révolution.

Ils ont scandé des slogans hostiles au mouvement Ennahdha, dénonçant le terrorisme et revendiquant un gouvernement de salut national.

Des écrans géants ont été installés et des tentes avec estrades ont été dressées à la place du sit-in qui se poursuit depuis l’assassinat de l’élu Mohamed Brahmi le 25 juillet 2013.

Dès la rupture du jeûne, la Place du Bardo n’a pas cessé de se remplir par les rues adjacentes et de déborder tout le long du Boulevard 20 Mars. A cette occasion, plusieurs axes ont été fermés à la circulation automobile.

De Bab Saâdoun, les manifestants remontaient le long du Boulevard 20 Mars pour rejoindre la Place du Bardo à l’appel de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et de l’opposition en commémoration des six mois de l’assassinat de Chokri Belaid le 6 février 2013.

Vêtus en rouge et blanc, les manifestants, toutes catégories d’âge confondues, entonnaient en chœur l’hymne national, tenant les portraits des martyrs Chokri Belaid et Mohamed Brahmi.

Une forte présence sécuritaire a été enregistrée au niveau des différents accès à la Place du Bardo et les entrées principales du siège de l’ANC.

Des personnalités politiques, des juristes et des membres de la société civile ont rejoint le «sit-in du départ» à la Place du Bardo. Les imams prédicateurs ont fait des invocations religieuses, priant pour la gloire et la sécurité de la Tunisie.

Prenant la parole, Maya Jribi de l’Union pour la Tunisie a relevé que cet énorme afflux est porteur d’un message: «Le peuple qui demeure uni contre le terrorisme malgré sa diversité saura sauver sa patrie».

Elle a critiqué l’obstination de l’équipe gouvernementale à se maintenir au pouvoir en avançant des solutions simplistes et inefficaces, réitérant l’attachement à un gouvernement de salut national indépendant présidé par une personnalité nationale.

De son côté, le secrétaire général du parti des Patriotes démocrates unifiés, Zied Lakhdar, a estimé que la légitimité du gouvernement et de l’ANC est tombée le jour de l’assassinat du martyr Mohamed Brahmi, affirmant la détermination à poursuivre le sit-in jusqu’à satisfaction des revendications qui appellent la démission du gouvernement, la dissolution de l’ANC et à la formation d’un gouvernement de compétences.

Il a exprimé le refus des appels au dialogue qu’il a qualifiés de «suspects», rappelant qu’un front de salut national a été mis en place et qu’il sera élargi à toutes les régions. Lakhdar a appelé à poursuivre la protestation et les pressions jusqu’à l’organisation d’élections démocratiques sans recours à l’argent politique.

Le porte-parole du Front populaire, Hamma Hammami, à affirmé la disposition à passer au référendum sous un gouvernement de salut national. «La force du peuple réside en son unité, la pertinence de ses objectifs et sa détermination à poursuivre le combat», a-t-il soutenu. Il a insisté sur la nécessité de parvenir, après la fête de l’Aid El Fitr, à la formation d’un gouvernement de salut national et d’un conseil supérieur de salut.

Le secrétaire général adjoint de l’UGTT, Samir Cheffi, a pour sa part souligné l’attachement de l’organisation ouvrière à son initiative en faveur de la démission du gouvernement et la formation d’un nouveau gouvernement de compétences nationales. Il a exprimé le refus des appels au dialogue lancés par le gouvernement qu’il a qualifiés de «douteux».

Pour Noomane Fehri, porte-parole des dissidents de l’ANC, le sit-in du départ est un mouvement civil, pacifique qui se poursuivra jusqu’à la réalisation de ses objectifs. Il a réaffirmé le soutien des députés dissidents à ce sit-in ainsi qu’à tous les mouvements de protestation observés dans les régions.

Il a qualifié de «mascarade» les débats de la Constituante, relevant que le gouvernement a pour unique souci de s’accaparer les structures de l’Etat.

La veuve du martyr Chokri Belaid a indiqué que la jeunesse est déterminée à poursuivre sa révolution pour la satisfaction de ses revendications. Le FP, a-t-elle précisé, avait décidé que ce mouvement soit l’expression de la colère générale contre l’échec du gouvernement à dévoiler la vérité sur les assassinats politiques.

WMC/TAP