La “Glace de la ferme”, une option pour les producteurs laitiers

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é avec en fond une vache normande, dans le Calvados (Photo : Mychele Daniau)

[15/08/2013 10:05:02] Paris (AFP) Un jour, Philippe Cocagne, agriculteur normand, voit une pub dans la presse agricole: entreprise néerlandaise propose concept clé en main de glace à la ferme. Quatre ans plus tard, il produit 20.000 litres de glace par an et s’est même offert un petit point de vente à Honfleur.

“Il y a quatre ans, on vendait notre lait 200 euros les 1.000 litres”. C’était en 2009, en pleine crise du lait, les prix étaient en chute libre. Philippe Cocagne et ses associés cherchaient donc un moyen de mieux valoriser leur production. Et ils sont tombés sur cette réclame de “Glace de la ferme”.

Cette marque appartient à Ice Delite, propriété du groupe néerlandais Bakker en Kok, spécialiste des équipements de production de glace. Leur idée: vendre une solution “clé en main” à des agriculteurs pour qu’ils se mettent à produire des sorbets et crèmes glacées avec le “bon lait” de la ferme et les fruits d’autres agriculteurs du coin.

Ils vendent aux éleveurs l’équipement, les recettes et des formations (faire sa glace, la vendre et même se mettre à la pâtisserie glacée) et un suivi. Coût moyen de l’investissement initial: 150.000 euros, selon Vicky Van Herck, interlocutrice des agriculteurs français chez Ice Delite.

Une fois lancé, l’agriculteur ne reverse pas de commission sur ses ventes -ce n’est pas une franchise- mais s’engage à acheter à Ice Delite les emballages et les matières premières “sèches” comme les sucres.

Chaque nouveau glacier de la ferme dispose en outre d’un terrain de commercialisation exclusif.

Le concept, qui essaimait déjà pas mal en Europe -Allemagne en tête- est arrivé en France par la Suisse en 2009. Et a conquis 300 agriculteurs hexagonaux dont Philippe Cocagne et ses associés du Gaec du Bois Louvet.

Rentable ?

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Des vaches (Photo : Thierry Zoccolan)

Producteurs de lait pour le géant laitier Lactalis, ils écoulent seulement 5% de leurs 800.000 litres de lait dans la glace. Mais l’activité a permis de créer trois emplois à plein temps et devrait dégager 200.000 euros de chiffres d’affaires cette année.

Leurs glaces, comme le cahier des charges de Glace de la ferme l’impose, sont “sans colorant, sans conservateur et surtout non foisonnées, c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’air dedans pour faire gonfler les volumes”.

Ils fournissent aujourd’hui une bonne vingtaine de restaurants et disposent de 30 revendeurs. Mais surtout, ils font de la vente directe (50% de leur chiffre d’affaires). “On a même ouvert un petit pas de porte à Honfleur”, dit fièrement Philippe Cocagne.

Patrick Rébillard, éleveur breton, cherchait lui à occuper une longère disponible sur sa ferme. Il a pensé dans un premier temps faire un gîte puis il est lui aussi tombé sur la publicité de “Glace de la ferme”.

“Le concept nous a plus car on pouvait travailler à notre rythme et maîtriser toute la chaîne de production. Mais comme ça sortait de l’ordinaire, on nous a traité de fous”, explique son épouse, Marie-Christine.

Aujourd’hui, Marie-Christine Rébillard a quitté son job de secrétaire comptable pour s’occuper à temps plein des glaces. Ils produisent environ 10.000 litres de glace à partir du lait de leurs 45 vaches, le reste de leur collecte étant livré à Lactalis.

Eux aussi se disent très satisfaits du concept même s’ils conviennent qu’il est devenu “trop cher” pour être “rentabilisable” alors qu’il y a quatre ans, il coûtait “seulement” 75.000 euros.

Des montants énormes pour les éleveurs laitiers qui ne sont pas les mieux lotis des agriculteurs avec des revenus soumis à la forte volatilité des prix du lait et de l’alimentation des bêtes. En 2012, leur revenu annuel moyen s’est établi à 25.000 euros selon Agreste, en baisse de presque 20% par rapport à 2011.