A
Nabeul, la Corniche n’a pas, en cet été 2013, les couleurs d’antan. Les
touristes algériens se font rares. Et beaucoup de commerçants le regrettent. Sur
la Corniche en effet, les immatriculations algériennes existent mais elles ne
sont pas légion.
Mardi 12 août 2013. 19 heures. Sur la Corniche de Nabeul. Tricot de corps et
short en coton, Sabeur s’affaire dans sa buvette, installé face à une mer bleue,
pour trouver, en cette veille de fête, des chaises à ses clients. Et qui a
veillé à ce que chaque parasol porte le nom d’une chanson de la grande
cantatrice égyptienne Oum Kolthoum. La nuit, qui commence à tomber, promet
d’être bien prometteuse pour cet artisan qui offre des boissons, brik à l’œuf et
des sandwichs.
Il garde le sourire même si les temps sont durs. «Hamdoullah», souligne un
serveur, qui affirme que le «trafic» n’a rien à voir, par exemple, avec l’année
précédente. Pourquoi? «Parce que les prix ont flambé. Logement, nourriture,
boissons, taxi, … Tout a augmenté», se lamente-t-il.
«Même le poisson ne veut plus de moi»
Plus loin sur une jetée d’une vingtaine de mètres qui plonge dans la mer, Hatem,
pantacourt et tee-shirt beige, est venu, dans le calme de la nuit, passer un peu
de bon temps. Il a installé sa canne à pêche et son couffin avec plein de vers
de mer dedans. Mais le poisson ne mord pas encore à l’hameçon. «Cela ajoute à la
guigne qui me poursuit depuis quelques temps», se révolte-t-il. Avant d’ajouter
: «Je viens de perdre mon emploi dans un hôtel de la Corniche. Même le poisson
ne veut plus de moi. La faute est peut-être à la nature. L’hiver dernier, la mer
a avancé et a fait des dégâts. Le poisson a fui le rivage!» Des paroles
accompagnées d’un grand éclat de rire.
Avenue Taieb M’hiri, qui jouxte la Chorniche, deux carrosses vert et orange, aux
couleurs de la ville, attendent le client. Un touriste algérien, Mustapha, jean
et chemises à carreaux, négocie une promenade avec ses deux bébés. «Dix dinars
aller-retour pour Nabeul», tranche Mohamed, en djellaba. «OK», répond Mustapha.
On retrouve Mustapha, le lendemain sur la plage. Il est 10 heures et il est venu
installer son parasol aux couleurs d’un soda tunisien et deux chaises longues.
Prompt à parler, Mustapha dit qu’il est venu la peur au ventre. «Les médias ont
exagéré la chose. Car à Nabeul, il n’y a rien de grave»
Il assure en effet que beaucoup de ses amis ont refusé de venir en Tunisie de
peur du «terrorisme». «Il faut dire que nous avons maintenant la parabole. Et le
Djebel Chaâmbi, c’est la porte à côté!», ajoute-t-il. «Beaucoup ont décidé de ne
pas venir à la toute dernière minute. Préférant ce rendre en Turquie. Il faut
dire aussi que, avec “Harim Ensoutane“, le feuilleton “à la mexicaine“ de Nessma
Tv, il y a de quoi», sourit-il.
Elles ne sont pas légion
Au café bar de l’hôtel Byzance, situé sur la même Corniche, on aperçoit quelques
touristes européens. Sodas ou encore eaux minérales, deux touristes s’abreuvent
tout en étant allongées sur des chaises longues. «Rien à voir avec les touristes
d’antan», regrette un jeune marchand ambulant, inondé par le soleil, qui propose
quelques fruits frais: du raisin, des pommes et des prunes noires. «Il
n’achètent presque rien», ajoute-t-il. «Bien plus, ils vont acheter les fruits
au supermarché d’à côté et les ramènent sur la plage dans un sac. Et ce dans le
cas où ils ne les prennent pas dans le buffet du petit-déjeuner de l’hôtel»,
tempête-t-il.
Dans un autre bar-restaurant des environs, La vague, le serveur n’a d’yeux que
pour deux couples algériens qui ont commandé des pizzas. «Ce sont de bons
clients. Des bons vivants. Malheureusement, cette année, ils ne sont pas venus
en grande masse», répète-t-il. Sur la Corniche bien calme à 14 heures, tous les
marchands de glace, de beignets, de sandwichs ou encore de fricassés regrettent
d’ailleurs la non venue en masse des touristes algériens qui ont conclu un bail
avec Nabeul. «Ville qu’ils apprécient beaucoup, mais que les Nabeuliens
apprécient aussi», note un riverain, Mahmoud, qui leur louait sa villa
d’habitude pour juillet-août.
Sur la Corniche en effet si les immatriculations algériennes existent, elles ne
sont pas légion.