Crise économie : Jusqu’où la Tunisie peut-elle encore s’endetter?


crise_economique-22082013-l.jpgOn
peut crier sur tous les toits que la Tunisie se porte comme un charme,
économiquement parlant. Ali Larayedh peut répéter à qui veut bien l’entendre que
le taux de croissance du pays a atteint les 3% au cours du premier semestre, que
le chômage, d’après l’INS, n’est que de 15,9%, et que les réserves en devises
sont évaluées à 107 jours d’importation, le soleil économique tunisien n’est pas
aussi radieux qu’on le pense.

La vérité est tout autre, ou alors elle est ailleurs. Tout d’abord à
l’international, nombre de pays, mises à part l’Allemagne, la France et quelques
alliés européens qui affichent un soutien calculé à la Tunisie, la tendance est
à la prudence. Et d’ailleurs, nombre de questions se posent quant à
l’implication allemande de plus en plus remarquée et remarquable en Tunisie. Et
on n’hésite pas à demander si cela ne vise pas à ménager ses électeurs
musulmans, islamistes.

Car les voisins immédiats de la Tunisie ne semblent pas pressés de la soutenir
outre le volet sécuritaire bien entendu. Quant aux observateurs économiques
avisés, ils estiment qu’«alors que le taux de couverture de la balance
commerciale a atteint 71,8%, que l’INS vient d’annoncer une croissance de 3%
pour le premier semestre 2013, l’agence de notation Standard and Poor’s a
dégradé la Tunisie de deux crans, une décision sans appel qui dégrade la Tunisie
à un grade junk et qui constitue un coup dur pour le pays».

Le sécuritaire y est bien entendu pour beaucoup tout comme l’incapacité de
l’Etat à contrôler comme il se doit autant les mécanismes administratifs que
sécuritaires. «Les motifs de cette dégradation sont essentiellement politiques
mais les raisons économiques y sont également pour quelque chose.

En réalité, les données disponibles montrent clairement que la croissance est
plus faible et ne dépasserait pas 2 à 2,5%. Divers facteurs le montrent:

-d’abord l’augmentation des importations de matières premières et demi-produits
durant le premier semestre n’a pas dépassé 0,7%, soit une baisse de 3 à 4% à
prix constants,

-la consommation d’électricité haute et moyenne tension qui n’a augmenté que de
2% durant la même période, ce qui prouve une régression de l’activité
industrielle,

-la baisse de la récolte de céréales de 35% par rapport à 2012, ce qui équivaut
à une baisse de la croissance globale d’un point au moins par rapport à 2012,

-sans oublier la situation du secteur touristique, une catastrophe le fait que
les touristes fuient l’île de Djerba à cause des carences d’eau dans les unités
hôtelières.

«Les prévisions initiales ne peuvent être atteintes, indiquent les experts, avec
preuve à l’appui : la baisse du montant de la TVA en régime intérieur de plus de
10% par rapport à 2012, ce qui confirme encore le fait que, dans pareilles
conditions, la croissance ne pourrait dépasser 2 à 2,5% pour toute l’année
2013».

Par contre, assurent les observateurs, les déficits vont s’accroître (le déficit
budgétaire serait de 9% au vu de l’évolution des recettes et des dépenses
budgétaires au courant du premier semestre, et le déficit de paiement courant
serait de 8% pour la deuxième année consécutive, déjà que durant le premier
semestre ce taux a atteint 4,2% du PIB).

Devant cette croissance atone et ce dérapage des déficits, que peut faire une
agence de rating sinon de dégrader le pays, et nul doute que les autres agences
vont suivre Standard and Poor’s, et que le secteur bancaire serait de nouveau
dégradé.

La seule échappatoire qui reste est l’endettement, mais jusqu’où? Déjà que le
récent prêt Samouraï sur dix ans et bien que la garantie du Japon soit assortie
d’un spread de 100 points de base en plus du coût de la garantie laquelle,
traduite en marge annuelle, serait de 50 points de base, soit au total 150
points de base à comparer aux 75 points de base de la sortie de la Tunisie en
2007 sur le marché Samouraï pour 20 ans et sans la garantie de tutelle de
quiconque, voilà où en est la Tunisie aujourd’hui: «gouvernée par des prétendus
experts» qui ont largué les véritables compétences pour occuper des places
qu’ils ne méritent nullement et qui prennent leurs rêves pour des réalités dont
ils font un marketing politique à la limite de l’indécence.