Les dérives médiatiques ne sont pas l’apanage des journaux tunisiens !

Par : Tallel

medias-6545454-art.jpgDes
professionnels des médias tunisiens et arabes ont estimé jeudi à Tunis que les
médias tunisiens et égyptiens se sont imposés, durant la période
post-révolution, “comme un véritable pouvoir”, sans pour autant occulter les
dérives médiatiques.

Le débat organisé à l’initiative du forum Ibn Rochd et de “l’institute for war
and peace reporting” sur le thème “l’information, entre les exigences de la
profession et la partialité : cas de l’Egypte et de la Tunisie”, a permis de
mettre l’accent sur les contraintes, les critères de la pratique journalistique
professionnelle ainsi que l’impact des médias sur l’opinion publique dans la
région.

Il est impératif de promouvoir une pratique journalistique saine pour rapporter
les événements dans le respect des critères de crédibilité, de responsabilité et
d’objectivité conformément aux normes professionnelles”, estime Khalil Fahmi,
rédacteur en chef de la chaîne de télévision Ahram On-line. Il explique que “la
liberté de presse est une responsabilité à l’égard des téléspectateurs et de
l’opinion publique. Elle commande le respect de l’éthique professionnelle dans
l’exercice de la liberté”.

Egypte…

Pour l’universitaire égyptien Foued Abderrazek, “le journaliste fait face
aujourd’hui à une crise qui consiste dans la difficulté qu’il trouve à occuper
une position médiane dans un paysage brouillé et chargé d’interférences”. Pour
preuve, il cite la difficulté qu’il y a à choisir les mots, les concepts et les
définitions dans un environnement où “il n’y a plus de place pour la neutralité
absolue”.

Pour sa part, le journaliste d’Al Jazira, Zine El Abidine Taoufik, a avancé que
“nombre de médias égyptiens sont une émanation de l’ancien régime”. Il va plus
loin pour affirmer que plusieurs entreprises d’information ont été créées durant
la période post-révolution pour répondre à une volonté d’hommes d’affaires,
particulièrement ceux appartenant à l’ancien régime, qui cherchent à utiliser
ces médias comme des machines de propagande. “Le paysage médiatique égyptien est
instable et ne sert pas les objectifs de la révolution. Les médias se sont
positionnés, dès les premiers jours de la révolution, comme des porte-voix de la
contre-révolution”. Par ailleurs, le journaliste croit que les problèmes du
secteur de l’information en Egypte sont centrés sur des questions
d’infrastructure et de professionnalisme. Nous faisons remarquer à notre
confrère d’Al Jazeera que les masques sont tombés depuis longtemps concernant le
professionnalisme de cette chaîne.

De son côté, Omar Kahki, propriétaire des chaînes Ennahar, n’a pas renié
l’existence de dérives et de défaillances au niveau de la formation de
journalistes compétents, appelant à la nécessité d’organiser le secteur pour y
faire régner la discipline.

Tunisie…

En ce qui concerne la situation en Tunisie, le journaliste et expert Slaheddine
Jourchi a évoqué l’impact des médias tunisiens sur le paysage politique de
manière générale en cette étape et dans la création de nouveaux équilibres
politiques dans le pays. “Les médias, bien qu’ils aient réussi à normaliser
leurs rapports avec l’opinion publique, ils continuent de souffrir des
répercussions de la crise actuelle”, estime-t-il. “Nous avons besoin d’engager
une profonde réforme dans les rédactions mais aussi aux plans financier et
administratif, et de rechercher les moyens permettant de concilier entre
l’indépendance, l’efficacité, la recherche de l’information et le scoop”.

Liberté d’expression retrouvée…

Pour sa part, la journaliste et experte Jannet Ben Abdallah a indiqué que le
paysage médiatique traverse une période de transition, passant d’un secteur
verrouillé à une information libre sans pour autant respecter les contraintes
juridiques ou éthiques. “Les conflits vécus dans le secteur de l’information
sont la conséquence de l’absence d’un référentiel juridique respecté par toutes
les parties”, a-t-elle expliqué.

Quant au journaliste et syndicaliste Zied El-Heni, il a soutenu que le véritable
acquis de la révolution est la liberté d’expression et d’information,
reconnaissant toutefois l’existence de graves violations et de dérives.

Enfin, l’expert en communication Ridha Kazdaghli pense qu’”il est nécessaire de
tenir compte du côté humain dans le travail journalistique et dans tout effort
en vue de l’élaboration des normes éthiques et du cadre juridique organisant le
secteur de l’information”.