«Quelle
que soit la couleur politique du gouvernement, de droite ou de gauche, il
n’aurait pas pu mieux faire». Cette affirmation de Ridha Saïdi constitue le
message essentiel que le ministre auprès du chef du gouvernement, chargé des
Affaires économiques, a voulu adresser aux Tunisiens lors de la conférence de
presse qu’il a donnée vendredi 30 août, avec ses collègues des Finances, Elyès
Fakhfakh, et du Développement et de la Coopération internationale, Mohamed
Lamine Doghri.
L’évènement a été organisé en guise de réponse à une série de déclarations
–notamment de l’opposition- et d’articles de presse annonçant l’apocalypse
économique pour bientôt et imputant la responsabilité des difficultés présentes
et, éventuellement, d’une ultérieure aggravation de la situation –certains ont
parlé d’un risque de cessation de paiement de l’Etat- au gouvernement accusé
d’incompétence et, parfois, d’avancer des statistiques douteuses, pour ne pas
dire plus, concernant le taux de croissance de l’économie.
Après une brève introduction du patron du pôle économique et financier du
gouvernement, la contre-attaque a été initiée par le ministre du Développement
et de la Coopération internationale. «La Tunisie est-elle en train de faire de
la croissance? Et cette croissance entraîne-t-elle un développement dans les
régions?», se demande Mohamed Lamine Doghri. Qui répond sans hésitation “oui“ à
la première question.
La Tunisie a enregistré un taux de croissance de 3% durant le premier semestre
2013. Ce qui n’étonne pas le ministre: ce résultat a été atteint et même dépassé
durant plusieurs trimestres depuis le 14 janvier 2011 –sept plus précisément.
L’essentiel étant, d’après le ministre, que «le pays ne retombe pas dans la
récession».
Lamine Doghri fait également remarquer que cette performance a été atteinte dans
un contexte qui n’est guère favorable, caractérisé en particulier par de
profondes divisions ayant abouti à la suspension des travaux de l’Assemblée
nationale constituante (ANC), ce qui, par voie de conséquence, a «entravé
certaines actions du ministère et pourrait retarder certains réformes
programmées».
La deuxième phase de la contre-attaque prit la forme d’une invitation du
ministre auprès du chef du gouvernement, chargé des Affaires économiques, aux
journalistes à «se baser sur les statistiques publiées par l’Institut national
de la statistique pour les analyser ensuite librement». En insistant sur le fait
que le pays est «confronté à de nombreux défis et à de fortes pressions sur son
budget» et que «la situation est présentée telle qu’elle est sans l’exagérer ni
la minimiser».
Et l’un de ces défis c’est justement le déficit structurel du budget de l’Etat.
Pour une raison toute simple: «depuis la révolution, les ressources
–essentiellement les ressources fiscales- ont augmenté de 30% alors que les
dépenses de fonctionnement ont progressé de 80%, et c’est une catastrophe»,
constate le ministre des Finances. Mais le fardeau des 8 milliards de dinars
supplémentaires supportés par le budget étaient impossibles à éviter, insiste
Elyès Fakhfakh. Car l’Etat a dû concéder des augmentations salariales et
augmenter les subventions des produits de base, respectivement pour 3,5 et 4,5
milliards de dinars.
D’où un déficit de 4 milliards de dinars que «nous couvrons avec l’endettement.
Mais à plus long terme, il nous faut engager des réformes pour réduire ce
fardeau». Parmi les réformes en préparation, celle visant à baisser les
subventions aux hydrocarbures s’élevant actuellement à 2 milliards de dinars.
Ces réformes permettront de ramener le déficit à son niveau normal: 3% du
produit intérieur brut. Mais si «ces réformes ne sont pas engagées, le déficit
–actuellement de 5,6% et pourrait dépasser les 7% d’ici la fin de l’année en
cours- s’aggraverait entraînant un surplus d’endettement. Actuellement de 48%,
le taux d’endettement pourrait alors dépasser la barre des 50%, ce qui serait
catastrophique», prévient le ministre des Finances.
Tout le monde en convient aujourd’hui en Tunisie: l’économie tunisienne est
malade surtout de la politique. «Toutes les questions que les bailleurs de fonds
nous adressent concernent la situation politique et les réformes nécessaires»,
confirme Ridha Saïdi. Qui est convaincu que «l’amélioration de la visibilité
politique va donner un coup de fouet à l’investissement», donc à la machine
économique dans son ensemble.