La Chine pourrait autoriser la conversion du yuan à Shanghai

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euros (Photo : Peter Parks)

[05/09/2013 10:45:56] Shanghai (AFP) La Chine pourrait pour la première fois autoriser une libre conversion complète de sa monnaie dans une zone franche commerciale qu’elle prévoit d’ouvrir à Shanghai, une réforme audacieuse qui marquerait une ouverture accrue de la deuxième économie mondiale.

Ce grand pas dans l’internationalisation du yuan figure dans le document officiel de ce projet pilote, que l’AFP a pu consulter.

La zone franche de Shanghai (ZFS), qui est officiellement soutenue par le Premier ministre Li Keqiang, vise à faire de la capitale économique de la Chine une authentique place forte internationale pour le commerce et la finance.

Cela mettrait Shanghai en concurrence ouverte avec l’économie ouverte de Hong Kong, qui a statut de “région administrative spéciale” chinoise. “A condition que les risques soient contrôlés, la libre convertibilité du renminbi (nom officiel du yuan) sera mise en place dans les comptes de capitaux de la zone franche”, indique clairement le projet.

Afin de réduire son exposition aux fluctuations du dollar dont il détient déjà de colossales réserves, le gouvernement chinois encourage l’utilisation du yuan pour ses échanges commerciaux. De fait, le yuan connaît une montée en puissance dans le commerce international.

Mais le renminbi (“la monnaie du peuple”) n’est actuellement pas convertible pour les comptes en capitaux, le gouvernement chinois se méfiant des flux spéculatifs et maintenant toujours un contrôle étroit sur ces mouvements. Concrètement, les investisseurs sont limités par toutes sortes d’entraves pour faire entrer et retirer leurs fonds de Chine.

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La Chine affirme que son objectif est de rendre à terme le yuan totalement convertible et de se doter d’un système de taux de changes flottant librement.

La valeur du yuan –que les Etats-Unis comme l’Europe jugent sous-évaluée– est en effet déterminée par la Banque centrale, qui fixe son taux quotidiennement, et non par la loi de l’offre et de la demande comme c’est le cas pour la plupart des grandes monnaies de la planète.

La zone franche de Shanghai couvrira 29 kilomètres carrés répartis en quatre zones et comprenant l’aéroport international et un port en eau profonde.

Le texte précise que la ZFS “soutiendra” l’établissement de banques étrangères et joint ventures bancaires, ainsi que d’institutions financières privées.

Ce grand projet a bénéficié en août d’un premier feu vert du Conseil des affaires de l’Etat (gouvernement), l’approbation en détail étant attendue pour le 27 septembre.

Les entreprises autorisées à s’y installer pourront ouvrir des comptes bancaires spéciaux leur permettant de changer librement leurs yuans, mais elles devront pour cela –sauf pour de rares exceptions — renoncer à leurs comptes en capitaux dans le reste de la Chine continentale et les fermer, a indiqué à l’AFP un responsable chinois familier du projet.

Selon le projet officiel, les taux d’intérêt seront fixés par les lois du marché dans la zone franche de Shanghai.

Plus tôt cette année, Li Keqiang avait appelé à la libéralisation des taux d’intérêt en Chine, un objectif majeur de réforme pour 2013.

Le tout s’inscrit dans une série de mesures destinées à moderniser le système financier chinois, encore marqué par le rôle prédominant des banques d’Etat et caractérisé par une allocation préférentielle des capitaux aux grandes entreprises publiques.

La zone franche de Shanghai prévoit l’instauration d’une plate-forme d’échanges pour des matières premières comme les métaux ou des produits agricoles.

“Ils veulent un port offshore, comme à Hong Kong”, a commenté un cadre de banque informé du projet.

Hong Kong gardera toutefois l’avantage, selon les analystes, grâce à son système légal et ses infrastructures financières, mais devra lutter pour conserver sa compétitivité.

Les contrôles restreignant le commerce dans 19 industries seront progressivement levés, pour libéraliser des secteurs comme la culture ou la banque.

Mais pas question, malgré les voeux de nombre d’hommes d’affaires chinois, que cette zone bénéficie d’une exception calquée sur celle de Macao et organise des jeux d’argent, interdits en Chine depuis la prise du pouvoir en 1949 par les communistes.

L’ancienne colonie portugaise reste la seule ville chinoise autorisée à exploiter des casinos.

Un succès de la ZFS “pourrait servir de modèle pour la prochaine étape des réformes économiques, de l’ouverture et de la libéralisation des comptes de capitaux de la Chine”, a commenté la banque australienne ANZ (Australia and New Zealand Banking Group).