L’enthousiasme des marchés s’étiole après le coup de théâtre de la Fed

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à Washington, DC (Photo : Karen Bleier)

[20/09/2013 05:43:06] Paris (AFP) L’enthousiasme s’est étiolé jeudi sur les places financières mondiales après un début de journée en fanfare provoqué par le coup de théâtre de la banque centrale américaine qui a décidé de continuer à inonder le marché de ses liquidités.

Les Bourses européennes ont ainsi clôturé sur des hausses mais moindres que leur progression initiale, et l’indice vedette de Wall Street le Dow Jones a terminé dans le rouge après avoir battu un record historique la veille.

La Réserve fédérale (Fed) a annoncé mercredi pendant la séance boursière américaine, mais après la clôture des marchés en Europe, qu’elle maintenait ses rachats d’actifs à 85 milliards de dollars par mois, ainsi que son taux directeur proche de zéro.

Cette décision a surpris les investisseurs, qui tablaient en moyenne sur une réduction des injections de liquidités de l’ordre de 5 à 10 milliards de dollars.

En Asie, les économies en développement, en particulier, ont respiré après avoir enregistré des départs massifs de capitaux pendant l’été.

Les marchés des pays les plus concernés ont fini en nette hausse, de plus de 4% en Indonésie, et de plus de 3% en Inde. La Bourse de Manille a elle clôturé en hausse de 2,81%.

Les Bourses des pays asiatiques développés ont aussi connu une hausse, mais moins marquée. A Tokyo, le Nikkei ne s’est adjugé que 1,8% en clôture, à 14.766,18 points.

Hong Kong a terminé en hausse de 1,67% à 23.502,51 points et Sydney de 1,10% à 5.295,5 points.

Séoul, Shanghai et Taipei étaient fermées pour cause de jour férié.

Sur le marché des changes, l’euro profitait des annonces de la Fed, qui confirment la création de monnaie, et donc la dilution de la valeur des titres libellés en dollars.

Vers 20h30 GMT, l’euro valait 1,3529 dollar, après avoir atteint un plus haut depuis début février (1,3569 dollar), contre 1,3516 dollar mercredi.

La roupie indienne – qui bénéficie aussi d’un resserrement du crédit mis en place par la Banque centrale du pays – reprenait des couleurs et revenait au-dessus des 62 roupies pour un dollar, alors qu’elle était descendue à 69 roupies pour un dollar début septembre.

Même scénario dans un autre pays lui aussi très chahuté récemment sur les marchés, la Turquie.

Le principal indice de la Bourse d’Istanbul, le BIST100, s’est envolé en clôture de 6,44% pour terminer à 79.466,06 points, juste sous la barre des 80.000 points qu’il avait franchie à la mi-journée. La livre turque a également repris des couleurs, le dollar s’échangeant à 1.9601 TRY, contre 1,9975 mercredi soir.

Sur les marchés européens toutefois, après une ouverture en nette hausse, l’humeur s’est modérée en cours de séance, en particulier après le début plutôt frais des places américaines.

Le Dax allemand a terminé en hausse de 0,67% à 8.694,18 points, le CAC 40 à Paris de 0,85% à 4.206,04 points, le FTSE 100 à Londres de 1,01% à 6.625,39 points, tout comme l’IBEX35 à Madrid à 9.153,70 points.

Le Dow Jones à Wall Street a perdu 0,26% à 15.636,55 points. La Bourse de Sao Paulo a clôturé en baisse de 1,09%, à 55.095 points, celle de Mexico de 0,36% à 41.752 points.

Retour des capitaux

Le maintien des opérations de rachat d’actifs de la Fed pourrait inciter les investisseurs à maintenir ce qui reste de leurs capitaux dans les pays émergents, voire à les y faire revenir.

Cela serait “particulièrement bienvenu pour les marchés des devises et des taux dans les pays affichant de forts déficits des comptes courants”, comme l’Inde et l’Indonésie, a estimé Barclays Capital.

“A très court terme, la grande prudence de la Fed à agir va soutenir les marchés actions, probablement aussi mettre sous pression les taux américains (gains à attendre plus limités), et redonner des couleurs aux actifs liés aux pays émergents”, commentaient les analystes de CM-CIC dans une note.

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ères en hausse à la clôture (Photo : Infographie)

Tranchant avec la bonne humeur ambiante, Ishaq Siddiqi, de ETX Capital, s’inquiétait du “coup porté à la crédibilité” du patron de la Fed Ben Bernanke qui, en déjouant les attentes et en “refusant d’envoyer un message fort au marché en le privant de sa drogue favorite”, peut “faire croire à certains qu’il est aussi impuissant que nous tous quand il s’agit de mettre les États-Unis sur le chemin d’une croissance durable”.

Pour l’analyste, “la dynamique derrière ce rebond des marchés n’est pas plus crédible que la réputation de la Fed aujourd’hui.”

La prudence était aussi de mise pour le stratège devises Mike Keenan, de la banque sud-africaine ABSA Bank.

Notant que le rand avait gagné 25 cents face au dollar pendant la nuit, il commentait ainsi la décision de la Fed: “A court terme c’est positif mais à moyen terme cela n’arrange pas vraiment notre position car la Fed va bien devoir à un moment ou à un autre commencer à rétrograder dans sa politique monétaire, et ce sera probablement négatif en particulier avec les pays qui ont de forts déficits (courants) comme l’Afrique du Sud”.