Après le “ras-le-bol fiscal”, place au pouvoir d’achat

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é (Photo : Fred Dufour)

[02/10/2013 17:14:04] Paris (AFP) Si l’élaboration du budget 2014 a été dictée par le “ras-le-bol fiscal”, le débat parlementaire sur le texte promet de tourner autour du pouvoir d’achat, à l’initiative des députés socialistes, même si leurs marges de manoeuvres paraissent maigres.

Les ministres de l’Economie Pierre Moscovici et délégué au Budget Bernard Cazeneuve ont prévenu: plusieurs dispositifs de soutien au pouvoir d’achat, ciblés sur les ménages les plus modestes, seront ouverts au débat parlementaire qui doit commencer mi-octobre.

Mais alors que les parlementaires socialistes discutent des concessions qu’ils pourraient obtenir, c’est la question de la portée de ces mesures redistributives en regard de l’augmentation des prélèvements sur les ménages qui se pose.

Rétablissement de l’abattement fiscal pour les veufs et veuves ayant élevé seuls leurs enfants, revalorisation de la prime pour l’emploi ou du plafond du revenu fiscal de référence, font partie des dispositifs examinés. De même que l’abattement fiscal pour les parents d’enfants scolarisés, supprimé dans le PLF mais qui pourrait être rétabli et bénéficierait à la moitié des ménages français payant l’impôt sur le revenu.

D’autres mesures figurent dans le projet de budget et doivent permettre d’empêcher que des ménages entrent dans l’impôt.

Pour financer ces dispositifs sans grever le redressement des comptes publics, un impératif pour le gouvernement, Bruno Le Roux, président du groupe PS à l’Assemblée, a suggéré une compensation: revenir sur la baisse de 5,5 à 5% du taux réduit de TVA sur les produits de première nécessité.

Le passage à 5% représente “moins d’un centime sur un paquet de pâtes alimentaires!”, a-t-il relevé.

Une proposition que M. Cazeneuve a jugée “concevable”, s’il s’agit de financer des mesures pour la croissance et le pouvoir d’achat. Soit une marge de manoeuvre de 750 millions d’euros pour les parlementaires.

Pas de reprise de la consommation attendue

Tout est dans cet ordre de grandeur, explique à l’AFP Michel Martinez de la Société générale. “Sur les grands agrégats, ça ne change rien: les prélèvements sur les ménages augmentent de 12,5 milliards d’euros, ceux sur les entreprises baissent de 9,5 milliards”.

De fait, si les prélèvements obligatoires n’augmentent que de 1,15 point de PIB (3 milliards d’euros) en 2014, des transferts ont été actés qui sont très défavorables aux ménages.

“Le revenu global des ménages français, c’est 1.350 milliards: pour rendre un point de pouvoir d’achat, il faut bouger 13,5 milliards. Or c’est grosso modo l’ordre de grandeur de la hausse des prélèvements, donc le gouvernement a décidé de ponctionner d’un point le pouvoir d’achat des ménages”, analyse l’économiste.

Dans le PLF 2014, Bercy annonce néanmoins une progression du pouvoir d’achat des Français de 0,3% en 2013 puis 0,8% en 2014, après la baisse historique enregistrée l’année dernière (-0,9%).

Une prévision balayée par une étude du cabinet BIPE qui se montre beaucoup plus pessimiste.

L’indicateur qu’il élabore depuis 2004 se concentre sur le revenu disponible des ménages une fois décomptées les dépenses dites “contraintes” (loyer et charges, cantine scolaire, dépenses de santé, etc). Le calcul se fait sur le “reste à vivre”, un ressenti propre à chaque consommateur.

Selon le cabinet, le pouvoir d’achat baisserait de 1,6% en 2013 et de 0,4% en 2014. Cette inflexion s’explique selon lui par l’augmentation des impôts, la poursuite du chômage, des salaires peu dynamiques mais aussi par une augmentation des dépenses contraintes qui représentaient selon lui 44,5% des dépenses totales en 2012 contre 38,6% en 2000.

Comme M. Martinez donc, il ne prévoit pas une reprise de la consommation ou de l’épargne – les deux marqueurs du pouvoir d’achat des ménages- simultanée à celle de l’activité.

“La plupart des économistes savent que le début d’une reprise, c’est une croissance sans emploi, pendant environ six trimestres”, détaille-t-il, rappelant que les entreprises commencent par réajuster leurs marges et investir, avant de relancer les embauches.