Le Brésil, un géant fragile qui doit se réformer

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érique latine, à quelque 60 km de Sao Paulo, le 1er avril 2013 (Photo : Nelson Almeida)

[03/10/2013 07:22:12] Brasilia (AFP) Le géant brésilien, septième économie mondiale, pâtit de son étatisme et doit entreprendre des réformes structurelles, estiment des analystes internationaux.

“Le Brésil présente une lourde charge: l’Etat. Il faut réformer l’Etat et cesser de considérer le secteur privé comme le diable”, juge pour l’AFP Pedro Tuesta, ancien responsable de la Banque centrale du Pérou et économiste chez le consultant 4Cast basé à Washington.

“Un changement de cette nature requiert un vaste processus démocratique. Il doit y avoir un changement total du rôle de l’Etat. Donner la priorité à l’infrastructure du pays plutôt que de contrôler le secteur privé”, ajoute-t-il.

Une croissance fortement ralentie

Le Produit intérieur brut du Brésil a crû de 7,5% en 2010, après s’être contracté de 0,2% en 2009 dans la foulée de la crise des subprimes dans le secteur bancaire.

Mais après le sursaut, la croissance a affiché un modeste 2,7% en 2011 puis 0,9% en 2012. Pour 2013, les prévisions font état de +2,5%.

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élioration des services publics, la fin de la corruption ou pour dénoncer les sommes investies dans la préparation de la Coupe du monde 2014 (Photo : Yasuyoshi Chiba)

Après l’inédite mobilisation sociale de juin, où des centaines de milliers de manifestants ont défilé pour exiger l’amélioration des services publics, la fin de la corruption ou pour dénoncer les sommes investies dans la préparation de la Coupe du monde 2014, la revue britannique The Economist caricaturait le Christ de Rio en fusée sans trajectoire.

Pour la présidente Dilma Rousseff, les critiques sur la croissance sont infondées: “Nous sommes le seul grand pays avec le plein emploi (environ 5% de chômage, NDLR). Nous sommes la troisième économie qui a le plus crû au monde au deuxième trimestre. Celui qui parie contre le Brésil a toujours tort”, a-t-elle estimé.

Le Brésil, premier producteur mondial de café, de sucre, de jus d’orange et un des principaux producteurs de viande, de soja et de fer, a bénéficié de la hausse des prix des matières premières.

“Cette hausse des prix est (partiellement) artificielle, basée sur les taux d’intérêt nuls aux Etats-Unis (qui ont poussé à la spéculation sur ces marchés, NDLR), et sur l’énorme demande chinoise”, explique à l’AFP Enrique Alvarez, économiste chez IdeaGlobal, à New York.

Dans le même temps, le Brésil a également développé sa demande interne. Au cours de la dernière décennie, sa classe moyenne a augmenté de 40 millions de personnes (sur 200 millions d’habitants environ) et a vu croître son pouvoir d’achat, dans un contexte de taux de chômage réduit.

Mais le boum des matières premières a pris fin et les mesures de soutien aux grandes économies développées peuvent disparaitre à tout moment.

Cependant, la demande interne a poussé les prix à la hausse et l’inflation flirte avec le plafond de 6,5% que s’est fixé le gouvernement.

En conséquence, la Banque centrale a relevé ses taux à 9%, après une série de baisses, afin de freiner l’inflation, nuisant toutefois à la croissance.

Stimuler les investissements

Malade chronique de son manque d’infrastructures, le Brésil cherche dorénavant à stimuler les investissements privés pour financer des ports, des routes et de gigantesques projets pétroliers portés par la compagnie publique Petrobras.

“Nous voyons des initiatives positives, des concessions pour des infrastructures (…) Mais pour que le pays croisse de plus de 2,5%, nous avons besoin de réformes structurelles. Réduire le taux d’imposition, avoir des taux plus compétitifs (…), des investissements énormes dans les infrastructures”, déclarait au journal économique Valor le président du groupe sidérurgique Gerdau, André Gerdau, proche du gouvernement.

Le gouvernement a récemment lancé deux appels d’offres pour des concessions routières, mais l’un n’a reçu aucun écho. “Beaucoup d’investissements restent bloqués au moment de l’appel d’offres, pour des discussion sur les marges de profit ou l’obtention des autorisations”, a-t-il ajouté.

Pour M. Alvarez, de IdeaGlobal, le problème demeure la restructuration de l’appareil étatique, la réduction de la bureaucratie et l’assouplissement des procédures de création d’entreprises dans un pays très protecteur envers son industrie locale.

Un coup de fouet pourrait venir de l’organisation de la Coupe de monde, dont le marché espère un coup de pouce de 2,2% à la croissance. Mais à court terme, le géant brésilien continuera de subir les difficultés nées de l’instabilité économique mondiale.