Telecom Italia : le président Bernabè jette l’éponge

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è, présente les résultats du groupe pour 2007, le 7 mars 2008 (Photo : Damien Meyer)

[03/10/2013 19:34:14] Milan (AFP) Le patron de l’opérateur Telecom Italia, Franco Bernabè, a présenté jeudi sa démission alors que le groupe, pris à la gorge par sa dette, demeure en quête de stratégie après le récent renforcement de son concurrent espagnol, Telefonica, à son capital.

“Le président de Telecom Italia Franco Bernabè a démissionné de son poste. Le conseil d’administration se poursuit sous la présidence du vice-président, Aldo Minucci”, a annoncé le groupe, confirmant des informations parues dans la presse ces derniers jours. Le groupe n’a cité aucun motif à cette démission.

“J’ai décidé de me mettre en retrait car dans cette phase critique pour l’avenir de Telecom, une division au sein du CA sur la voie à suivre aurait débouché sur une paralysie de l’entreprise et sur l’impossibilité de parvenir à une solution acceptable par tous”, a expliqué l’intéressé dans une lettre aux salariés citée par l’agence Ansa.

Le groupe a indiqué avoir “lancé le processus de désignation d’un nouveau président” et attribué en attendant toutes les responsabilités de M. Bernabè à l’administrateur délégué Marco Patuano. Le patron démissionnaire pourrait être remplacé à brève échéance par l’actuel patron de Poste Italiane, Massimo Sarmi, selon la presse italienne.

La querelle entre M. Bernabè et les principaux actionnaires du groupe était apparue au grand jour après l’annonce, fin septembre, du renforcement indirect du groupe espagnol Telefonica au capital de Telecom Italia.

Le groupe espagnol détient désormais 66% de Telco, premier actionnaire de Telecom Italia avec 22,4% de son capital, et pourrait en racheter la totalité à partir de 2014. Telco rassemble, outre Telefonica, les groupes italiens Generali, Mediobanca et Intesa Sanpaolo.

L’annonce de Telefonica a provoqué de vifs remous en Italie ces deux dernières semaines. M. Bernabè a affirmé en avoir été informé à travers “les communiqués de presse”. De nombreux autres acteurs de la vie publique italienne, qu’ils soient responsables d’affaires, politiques et syndicaux se sont également insurgés contre elle, arguant de craintes pour l’emploi ou pour la sécurité du réseau national de télécommunications.

“Un gâchis total”

Des employés de Telecom Italia ont martelé leur position lors d’un rassemblement jeudi matin devant le siège du groupe, réclamant l’intervention de l’Etat, faute de quoi ils seraient “prêts à la grève générale”. Telefonica “est le pire partenaire possible car il signifie la vente de (sa très rentable filiale, ndlr) Tim Brasil et ne donne aucune perspective de développement à l’entreprise”, a lancé un responsable du syndicat Cgil, Paolo Puglisi.

Il n’est pas le seul de cet avis: Corrado Passera, qui fut ministre du Développement économique dans le récent gouvernement de Mario Monti et patron de la banque Intesa Sanpaolo à l’époque où fut créée la holding Telco, note qu’il est “peu probable que Telefonica considère l’Italie comme sa priorité. Nous avons réussi à faire un gâchis total”, a-t-il dit jeudi.

“La classe dirigeante, c’est-à-dire les actionnaires, a réussi à ne pas jouer son rôle et la politique à ne pas avoir de vision à long terme”, a-t-il déploré.

De fait, les ennuis de Telecom Italia ne datent en réalité pas d’hier: le groupe souffre de longue date de la faiblesse de son marché principal, l’Italie, aggravée par l’agressivité de ses concurrents sur ce terrain. “C’est sûr que le groupe tâtonne stratégiquement, un peu d’ailleurs comme Telefonica, qui tâtonne depuis 18 mois”, relève un analyste parisien ayant requis l’anonymat.

“Dans les deux cas, ce sont des groupes qui sont un peu pris à la gorge par une dette importante (47 milliards d’euros pour Telefonica et 28,8 milliards pour Telecom Italia, ndlr) et par les agences de notation, exactement comme avec les Etats italien et espagnol”, relève-t-il.

Celles-ci ont menacé de dégrader la note de Telecom Italia au niveau “spéculatif” si le groupe ne parvenait pas à réduire sa dette et à stabiliser son activité.

Le départ de M. Bernabè confirmé, l’option stratégique d’une augmentation de capital de Telecom Italia, qui avait sa préférence, semble compromise. Restent désormais, selon l’analyste parisien, la possibilité d’une séparation du réseau fixe, déjà envisagée l’an dernier, ou la vente en bloc ou, plus probablement “par appartements”, des activités brésiliennes, estime-t-il. Aucune décision en ce sens n’a été annoncée jeudi.