ée (Photo : Patrick Kovarik) |
[11/10/2013 06:08:44] Paris (AFP) Le Conseil constitutionnel, saisi par une compagnie texane, va se prononcer vendredi sur la légalité de l’interdiction de la fracturation hydraulique adoptée en 2011 pour fermer la porte aux gaz et pétrole de schiste en France.
En cas de censure de la loi, le gouvernement est “prêt à déposer un texte qui maintiendra cette interdiction de la fracturation hydraulique pour ne pas laisser de faille (dans laquelle des industriels) pourraient s’engouffrer”, a d’ores et déjà assuré le ministre de l’Ecologie Philippe Martin.
Le Conseil constitutionnel n’a jamais eu à se prononcer sur la loi du 13 juillet 2011, adoptée au terme de plusieurs mois de mobilisation notamment dans le sud de la France. Votée sous le gouvernement de droite, elle a été reprise à son compte par la gauche à son retour au pouvoir en 2012.
Elle interdit de fait l’exploitation du gaz et pétrole de schiste en bannissant la seule technologie rodée à la disposition des industriels pour les extraire.
La fracturation hydraulique, qui consiste à créer des fissures dans les roches riches en hydrocarbures en injectant à haute pression un mélange d’eau, de sables et d’adjuvants chimiques, est décriée en raison de son impact environnemental et ses risques de pollution et sismiques.
à Grzebowilk en Pologne (Photo : Janek Skarzynski) |
La société texane Schuepbach, à l’origine de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) examinée par les Sages, estime que l’annulation de ses permis d’exploration à la suite de l’adoption de cette loi constitue une application “trop rigoureuse” du principe de précaution, avait souligné son avocat Marc Fornacciari lors de son audience le 24 septembre. Selon lui, “il n’existe aucune étude démontrant que la fracturation hydraulique présente le moindre risque”.
Le représentant du gouvernement, Thierry-Xavier Girardot, avait toutefois fait valoir que cette interdiction ne s’appuyait pas sur le principe de précaution mais sur le principe de prévention. Un principe reposant sur des risques “suffisamment avérés” qui, selon lui, justifie l’interdiction.
Les industriels indemnisés?
L’avocat de Greenpeace, Me Alexandre Faro, avait également fait valoir que, lors des débats au Parlement avant la vote de la loi, “on a basculé du principe de précaution vers le principe de prévention”.
Mais l’argumentation de Schuepbach s’appuie aussi sur un éventuel non-respect du “principe d’égalité”: la fracturation est en effet interdite pour l’activité pétrolière mais reste autorisée pour la géothermie.
A l’audience, l’avocat de France Nature Environnement (FNE) Sébastien Le Briero avait mis en avant le fait que la technique utilisée en géothermie présentait des “risques moins graves” pour la santé et l’environnement, en utilisant moins d’eau et pas de produits chimiques.
à Saint-Christol-les-Ales (Photo : Sylvain Thomas) |
Sur ce point, l’Association française des professionnels de la géothermie (AFPG) estime que la “stimulation hydraulique” utilisée en géothermie profonde est très différente: “On ne fracture pas la roche, mais on nettoie des failles existantes, à des pressions beaucoup plus faibles, c’est complètement autre chose…”, assure à l’AFP son vice-président Jean-Jacques Graff.
Selon les juristes, trois hypothèses principales existent concernant la décision des juges: soit ils valident la loi, soit ils l’annulent immédiatement, soit ils l’annulent mais en laissant au gouvernement un délai pour éventuellement trouver une solution juridique, comme la réforme du code minier.
Quant à la possibilité d’une nouvelle loi, “si censure il y a, tout dépendra du motif pour lequel il censure”, indique à l’AFP l’avocat de Schuepbach, Marc Fornacciari. Si le Conseil estime que “l’interdiction (de la fracturation) est une mesure disproportionnée par rapport au risque éventuel”, “le gouvernement ne pourra plus reprendre une loi d’interdiction, totale en tout cas” de cette technique, estime-t-il.
Schuepbach, société fondée par le géologue suisse Martin Schuepbach, compte par ailleurs réclamer plus d’un milliard d’euros d’indemnisation à l’Etat français, écrivait récemment le quotidien spécialisé BIP. A l’audience, le représentant du gouvernement n’avait pas exclu le principe d’une réparation en cas de préjudice “certain et établi” pour les industriels privés de permis.