éfilé pour la marque Moncler, en février 2013 à New York (Photo : Slaven Vlasic) |
[15/10/2013 07:47:53] Paris (AFP) La marque de doudounes Moncler a lancé son processus d’entrée à la Bourse de Milan, qui lui donnera “une forte visibilité mondiale”, mais l’opération implique qu’elle soit au préalable scindée des autres marques du Groupe Moncler, explique son patron italien Remo Ruffini à l’AFP.
“L’IPO est une bonne opportunité. Elle donne une forte visibilité mondiale, vous êtes plus transparent, vous parlez tous les trois mois au marché, vos clients savent ce qui se passe, vous attirez de bonnes recrues… C’est bon pour une marque”, dit M. Ruffini, qui a racheté Moncler en 2003 et l’a relancée.
Il ne compte pas céder les 32% du capital qu’il détient: “Moi, je ne vends pas, ce n’est pas une IPO pour moi”, lance-t-il, alors que la valorisation de Moncler tournerait autour des 2 milliards d’euros, selon les estimations du marché. “Je n’ai jamais pensé en termes de chiffres”.
En revanche, “tous mes partenaires”, à savoir les fonds Carlyle, Eurazeo, Mittel…, “sont d’accord pour céder une partie de ce qu’ils ont”, dit M. Ruffini.
Le projet implique d’abord de scinder les autres marques du Groupe Moncler, à savoir Henry Cotton’s, Marina Yachting, Coast Weber & Ahaus et la licence Cerruti 1881 pour les jeans et le sportswear. Voire de les vendre: “Nous voulons nous positionner vis-à-vis du marché avec une seule marque, les autres formeraient une autre entreprise. Et s’il y a une possibilité pour les vendre, on regardera à coup sûr”.
Il y a 10 ans, Moncler périclitait
Moncler périclitait quand cet Italien quinquagénaire originaire de Côme a racheté il y a dix ans la marque, née en 1952 à Monestier-de-Clermont (d’où son nom…) en Isère. Il l’a relancée et propulsée dans le monde du luxe, en l’internationalisant. Moncler défile aujourd’hui à Milan, à Paris, à New York, et ne réalise plus qu’un quart de ses ventes en Italie, contre un tiers en Asie, un tiers en Europe (hors Italie) et 10% aux Etats-Unis et ailleurs.
à Cannes (Photo : Alberto Pizzoli) |
PDG et directeur de la création, M. Ruffini dit avoir transformé ce qui était “une marque sportive au départ” en une valeur “très contemporaine”, en recourant à “de nouvelles technologies et des innovations”, pour concevoir notamment des doudounes ultra-légères pesant moins de 200 grammes. “Je voulais faire des doudounes pour tout le monde, les jeunes, les vieux, les hommes, les femmes, et pour la montagne, la ville, les soirées…”. Et même pour l’été.
Jusqu’à plus de 4000 euros pièce
Les “Moncler” sont aujourd’hui vendues entre 600 euros et plus de 4.000 euros pièce pour certains modèles avec fourrure. La marque s’est aussi diversifiée dans les chaussures, la maille, les sacs et accessoires, et vient de lancer à Paris sa première collection de lunettes. Les ventes, inférieures à 50 millions d’euros en 2003, ont ainsi quasiment décuplé en dix ans. Elles ont atteint 489 millions d’euros en 2012 (+35% sur un an).
“Je me suis toujours dit +si j’avance dans la bonne direction, les chiffres suivront+”, confie Remo Ruffini. Et “si on continue comme ça pendant les 20 prochaines années, je serai content…”
Contrairement à d’autres, il refuse de trop compter sur la Chine et sa clientèle de luxe en plein boom. “Il faut être prudent. J’essaie de diviser les risques. Notre priorité aujourd’hui c’est la Russie, l’Europe de l’Ouest, l’Amérique du Sud, le Canada, et ensuite viendra le Moyen-Orient”.
Après Cannes, Los Angeles ou Miami en 2012, des magasins ouvriront dans les prochains mois à Moscou et au Brésil.
Moncler mise beaucoup sur les voyageurs: “On a toujours besoin d’une doudoune quand on voyage, quelque chose de pratique et de léger, qu’on peut mettre dans sa valise”, juge M. Ruffini.
En 2011, la marque préparait déjà une mise en Bourse mais avait renoncé à cause de la crise financière qui sévissait en Europe. “C’était un désastre en Italie, en Espagne… La banque a estimé que le marché risquait de ne pas bien accepter une nouvelle entreprise”, explique M. Ruffini. Le fonds d’investissement Eurazeo était alors entré au capital. “Mais nous avons toujours continué à dire qu’une IPO était une priorité”.
Il cite en exemple les mises en Bourse à Milan de Salvatore Ferragamo (2011) et Brunello Cucinelli (avril 2012) et de Prada à Hong Kong (2011). “C’est sûr qu’ils ont très bien fait”. Le titre Ferragamo a pris 140% depuis sa cotation.
Remo Ruffini ne souhaite pas d’augmentation de capital: “Pas pour l’instant. Nous avons bien assez de cash flow pour ouvrir 20 à 22 magasins par an. C’est ce qu’on a fait en 2011 et 2012. Pour l’entreprise, il est prudent d’y aller étape par étape, ouvrir un + flagship+ (un magasin de prestige) par an c’est plus qu’assez. Je veux aller vite, mais je ne veux pas me précipiter non plus”.
Moncler est-elle encore une marque française ? “Absolument”, dit M. Ruffini, même si l’usine près de Grenoble a fermé il y a quelques années et que le groupe de 1.100 salariés est dirigé depuis l’Italie, avec son siège à Padoue…. “J’ai toujours voulu garder les racines”. Le logo de Moncler, un écusson de feutrine représentant un coq et deux sommets formant un M, “est d’ailleurs blanc-rouge-bleu”.
Et “Paris a toujours été une charnière pour l’entreprise”. Moncler y a ouvert son premier magasin de ville en 2007 et Paris accueille aujourd’hui “le plus gros magasin Moncler”, soit 500 mètres carrés sur la Rue du Faubourg Saint-Honoré.