UIMM Denis Gautier Sauvagnac au tribunal correctionnel de Paris, le 7 octobre 2013 (Photo : Eric Feferberg) |
[21/10/2013 14:48:44] PARIS (AFP) Le parquet a requis lundi une peine de deux ans de prison avec sursis et 250.000 euros d’amende à l’encontre de l’ancien patron de l’UIMM, Denis Gautier-Sauvagnac, principal prévenu du procès de “la caisse noire” de la fédération patronale de la métallurgie.
La substitut du procureur, Ariane Amson, a requis par ailleurs des peines de 8 mois avec sursis à l’encontre de Dominique de Calan, délégué général adjoint de l’UIMM, et des peines de six mois avec sursis contre la chef comptable Dominique Renaud et l’ex-directeur administratif, Bernard Adam. La représentante du ministère public a enfin réclamé une amende de 150.000 euros contre l’UIMM.
Elle a en revanche demandé la relaxe des cinq autres prévenus.
Les dix prévenus sont accusés d’abus de confiance, travail dissimulé, destruction de documents comptables, recel, ou de complicité de ces délits passibles de 3 ans de prison et de 375.000 euros d’amende.
La justice s’interroge sur la destination de quelque 16 millions d’euros retirés en liquide entre 2000 et 2007 des caisses de l’Epim, une structure d’entraide créée en 1972 par la fédération pour apporter “un appui moral et matériel” à ses adhérents subissant un conflit du travail.
“On n’a pas beaucoup avancé lors de cette audience et le dossier est aujourd’hui dans le même état que lors de la clôture du dossier”, a constaté la représentante du ministère public.
“Alors, c’est vrai qu’après presque sept ans de silence, M. Gautier-Sauvagnac a pris la parole pour désigner les syndicats comme les bénéficiaires des enveloppes d’argent liquide de l’UIMM”, a souligné Ariane Amson.
“C’est étonnant comme posture de dire qu’on a donné de l’argent aux syndicats mais qu’on n’en dira pas plus. Pourquoi vous croirait-on sur parole?”, a-t-elle lancé à l’adresse de l’ancien patron.
“Vocabulaire du grand banditisme”
“Beaucoup d’autres destinataires potentiels de ces espèces ont été évoqués”, a-t-elle rappelé en expliquant que certains prévenus ont cité des intellectuels, des journalistes, des médias, des politiques ou des parlementaires.
“M. Gautier-Sauvagnac dit ne pas vouloir faire de la délation, reprenant ainsi à son compte un vocabulaire qui est celui du grand banditisme”, a grincé la magistrate.
“Il a aussi dit ne pas vouloir faire un déballage qui serait préjudiciable à la paix sociale mais on a du mal à imaginer quelqu’un qui a fait plus de mal à la paix sociale”, a-t-elle dénoncé en pointant les conséquences médiatiques de cette affaire.
Pour la substitut, le dossier peut se résumer à quelques certitudes. “Une partie des espèces a été utilisée pour du travail dissimulé avec des compléments de rémunération en espèce qui n’apparaissent pas sur les bulletins de paie et n’ont donc pas donné lieu au paiement des cotisations sociales”, a-t-elle pointé.
M. Gautier-Sauvagnac a évoqué le poids de la tradition et fait une analogie avec les primes de cabinet des ministères, au vu de son parcours. Cet inspecteur des finances “aurait pu être l’homme de la situation qui aurait pu mettre à ses pratiques, ce qu’il n’a pas fait pendant plus de douze ans”, a-t-elle dénoncé.
Quant aux fameuses espèces, “les éléments ne sont pas très clairs, mais on peut s’appuyer sur quelques éléments factuels. On a 16 millions remis en liquide à M. Gautier-Sauvagnac, des comptes spéciaux exclus de la comptabilité et des pièces comptables qui ont été détruites annuellement”, a résumé la magistrate.
Alors, M. Gautier Sauvagnac et les autres prévenus se cachent derrière le paravent de la loi de 1884 (Waldeck-Rousseau) qui n’oblige pas les syndicats à tenir une comptablité. “Mais je ne vois pas bien le rapport”, a balayé la représentante du ministère public pour qui “cette loi n’est pas supérieure aux autres lois”.
“C’est la solution de facilité et quand on ne déclare pas les sommes au fisc, on peut se poser la question du respect de l’intérêt général”, a-t-elle dénoncé.