Mexique : le projet d’impôt sur les sodas sucrés se heurte aux lobbies

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èses dans les rues de Mexico, le 20 mai 2013 (Photo : Ronaldo Schemidt)

[24/10/2013 06:44:55] Mexico (AFP) A coups de pleines pages payantes dans les journaux, les grandes sociétés alimentaires font pression sur les parlementaires mexicains pour contrecarrer un projet d’impôt sur les sodas sucrés et la malbouffe dans un pays frappé par le fléau de l’obésité.

Le Sénat mexicain examine actuellement un projet de loi taxant de 5% les nourritures trop riches en graisse et en sucre, comme les friandises ou les chips, ainsi qu’un prélèvement de 1 peso (six centimes d’euro) par litre sur les boissons sucrées.

La Chambre des députés a déjà adopté ces mesures la semaine dernière, dans le cadre de la réforme fiscale proposée par le président Enrique Pena Nieto visant à augmenter les recettes fiscales trop faibles de l’Etat mexicain.

71% des adultes et un tiers des enfants touchés par l’obésité

La réforme vise surtout à augmenter l’impôt sur les revenus des plus riches, mais la taxe sur certains aliments et boissons marque les esprits dans un pays où 71 pour cent des adultes et un tiers des enfants sont touchés par le surpoids ou l’obésité.

Avec la perspective d’une adoption définitive du projet par le Sénat d’ici à la fin du mois, les avocats des compagnies touchées font l’assaut des sénateurs mexicains tandis que leur cause est défendue presque quotidiennement dans des publicités de presse.

Les lobbies représentent notamment des compagnies internationales concernées au premier chef comme Coca-Cola, Nestlé et Kraft Foods. Au contraire, des organisations de protection de la santé ont reçu un soutien de 10 millions de dollars de la part de Bloomberg Philanthropies, fondation du maire milliardaire de New York, Mike Bloomberg.

Pena Nieto a noté cette semaine que sa réforme “était visiblement un objet de controverse” parce que le changement prévu d’imposition allait “affecter certains intérêts et provoquer une gêne pour d’autres”.

Record du monde de consommation de soda

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Des canettes de sodas (Photo : Joel Saget)

L’industrie alimentaire et celle des boissons affirment que l’instauration d’une taxe serait inefficace car l’obésité a des causes multiples. Mais les partisans de cette mesure soulignent qu’elle est cruciale pour la santé au Mexique, champion du monde de la consommation de boissons sucrées.

Selon Alejandro Calvillo Unna, directeur d’une organisation de défense des consommateurs, “Le pouvoir des consommateurs”, la principale crainte des multinationales est l’effet de contagion que pourrait avoir un telle loi dans d’autres pays.

“C’est leur crainte. Ils ne craignent ni les conséquences économiques, ni les pertes d’emplois, cela ne les intéresse pas. Ce qui les intéresse, c’est la croissance du marché et comment cela pourrait l’affecter dans toute la région”, a dit Calvillo à l’AFP.

Le groupe de Calvillo, bénéficiaire de l’aide de Bloomberg, fait campagne en faveur d’une taxe sur les sodas depuis trois ans pour combattre la plaie de l’obésité et du diabète dont souffre le Mexique.

Selon lui, la mesure pourrait encourager les Mexicains à faire des choix plus sains comme l’eau dans un pays où la consommation de boissons sucrées atteint 163 litres par an.

La proportion de Mexicains en surpoids est actuellement supérieure à celle des Etats-Unis et le Mexique a le plus fort taux de population atteinte de diabète parmi les 34 pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

Coup de grâce

Mais l’industrie concernée, ainsi qu’une organisation mexicaine représentant quelque 72.000 petits commerçants affirment que la taxe pourrait faire plus de mal que de bien.

Jaime Zabludovsky Kuper, président de l’organisation représentant l’industrie de biens de consommation ConMexico, estime qu’on “stigmatise des produits fabriqués selon les normes de qualité les plus strictes” et qu’on encourage ainsi le développement de l’économie informelle.

Zabludovsky, dont l’organisation représente des compagnies comme Kraft et Kellogg’s, souligne que “le Mexique est un marché très important et que cela pourrait créer un précédent dans d’autres marchés”.

Selon Cuauhtemoc Rivera, directeur de l’Anpec, une association de petits commerçants, les sodas sont les produits les plus vendus dans les boutiques alimentaires, où elle représentent jusqu’à 40 pour cent du chiffre d’affaires.

“Au moins quatre commerçants sur dix vont se trouver devant la terrible décision d’avoir peut-être à mettre fin à leur commerce”. “Ce serait le coup de grâce”, selon lui.