égaux, photographié le 30 octobre 2013 (Photo : Eric Feferberg) |
[31/10/2013 15:24:53] Paris (AFP) Drogues, armes, numéros de cartes de crédit: on trouve tout cela dans le darknet, une sorte de réseau dans le réseau, également utilisé par les cybermilitants surveillés par des dictatures ou les hacktivistes, qui militent pour un internet totalement libre et anonyme.
Début octobre, un site internet de l’ombre créé en 2011 est placé sous le feu des projecteurs. Silk Road (“la route de la soie”), présenté comme “l’eBay de la drogue”, est fermé par le FBI et son fondateur supposé, Ross William Ulbricht, 29 ans, arrêté.
Il est accusé d’un “massif blanchiment d’argent”, de complot de violations des lois sur les stupéfiants et de piratage informatique. Ulbricht, lui, nie être le “capitaine” de Silk Road.
En deux ans et demi, ce site du darknet aurait généré des ventes de 1,2 milliard de dollars (880 millions d’euros) en monnaie virtuelle bitcoin, pour empocher un montant total de 80 millions de dollars (60 millions d’euros) sous forme de commissions.
La nature ayant horreur du vide, d’autres sites marchands “clandestins”, comme Black market reloaded (BMR), ont pris la place de Silk Road sur internet. Mais pas n’importe quel internet. Ici, les adresses sont une suite de chiffres et de lettres qui changent régulièrement et se terminent en .onion et non pas en .fr ou .com.
Pour accéder anonyment à Black market reloaded, il faut passer par le logiciel libre et gratuit Tor (acronyme de “The Onion Router”), qui permet de naviguer sur internet par l’intermédiaire d’autres ordinateurs du réseau Tor, basés aux quatre coins de la planète.
ée à la vente sur internet, à côté de nombreux autres produits illégaux, photographiée le 30 octobre 2013 (Photo : Eric Feferberg) |
Ainsi, l’adresse IP de l’ordinateur utilisé, véritable plaque d’immatriculation, apparaîtra, aléatoirement, au Japon, aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, rendant sa localisation impossible ou plus difficile par les services de police, notamment.
Une fois sur ce marché noir virtuel, après un long et fastidieux processus d’inscription, ecstasy, cannabis, faux-papiers et armes sont à la vente contre des bitcoins, dont la première borne physique d’échange a été mise en service mardi, à Vancouver (Canada).
Sur BMR, un kilo de hachich népalais est mis en vente contre 14,7 bitcoins (soit 2.183 euros au taux actuel) et expédié “partout dans le monde” depuis l’Inde dans un “emballage discret”. Comme dans tout site marchand, les acheteurs éventuels se renseignent : “L’envoyez-vous en un seul paquet ou plusieurs ?” ou “Pensez-vous que le paquet arrive sans problème en France ?”.
Réseaux dans le réseau
Mais en dehors de cette utilisation à des fins criminelles, les défenseurs de la vie privée considèrent aussi le système Tor comme un bon outil pour les internautes désireux de se protéger contre le commerce en ligne. Des journalistes l’utilisent également pour ne pas être repérés dans des régimes répressifs ou échanger avec des sources sensibles sans risquer de les compromettre.
“C’est un besoin légitime pour certains acteurs d’avoir des plateformes sécurisées, anonymisées. Quand je bosse avec Wikileaks, je bosse sur le darknet. C’est pareil pour les entreprises qui sont sur un marché sensible”, explique à l’AFP Jean-Marc Manach, journaliste spécialiste des questions de surveillance et de vie privée.
“L’anonymat fait partie de la liberté d’expression. Sans anonymat, les journalistes n’auraient pas de source”, ajoute Jérémie Zimmermann, cofondateur de la Quadrature du Net, organisation de défense des droits des internautes.
égaux, photographié le 30 octobre 2013 (Photo : Eric Feferberg) |
Tor fait partie des outils recommandés par Reporters sans frontières (RSF) qui forme des journalistes dans les pays particulièrement surveillés.
“On a fait une formation au Tadjikistan, où beaucoup de sites internet sont bloqués. Tor peut être extrêmement utile dans ce cas, ça permet de s’affranchir du réseau national”, déclare Grégoire Pouget, de RSF.
Outre Tor, d’autre réseaux comme I2P, pour Internet invisible project, ou Freenet, permettent à plusieurs ordinateurs de communiquer entre eux uniquement.
“Ce sont des réseaux dans le réseau, il faut imaginer des îles”, décrypte Guilhem Fouetillou, cofondateur de Linkfluence, entreprise spécialisée dans l’analyse du web social, qui s’est fait connaître par la cartographie d’internet.