ée de vente-privee.com, le 24 octobre 2013 dans les locaux du site de ventes sur internet à Saint-Denis, dans la banlieue parisienne (Photo : Bertrand Guay) |
[21/11/2013 11:05:34] Bobigny (AFP) La Seine-Saint-Denis attire de plus en plus de grandes entreprises, mais ses habitants frappés par le chômage n’en profitent pas à plein, alors que la discrimination “à l’adresse”, l’un des maux des quartiers défavorisés du département, pourrait bientôt être punie par la loi.
Beaucoup d’entreprises qui s’installent affichent une politique favorable à la diversité, “avec de très belles plaquettes”, estime le député Daniel Goldberg. “La diversité des équipes, on la voit au rez-de-chaussée et au premier étage, mais au fur et à mesure qu’on monte dans les étages, ce n’est plus le cas”, dénonce-t-il.
Ce parlementaire socialiste présente dans le cadre de la loi sur la politique de la Ville, examinée vendredi à l’Assemblée, un amendement sanctionnant la “discrimination à l’adresse”, c’est-à -dire le fait que certains ne soient pas embauchés car ils habitent dans des quartiers réputés “sensibles”.
Lui-même professeur de mathématiques appliquées à l’Université Paris VIII de Saint-Denis, il a vu “des étudiants qui avaient réussi tout leur parcours théorique mais qui ne pouvaient pas valider le diplôme parce qu’ils ne trouvaient pas de stage”.
ût 2013 (Photo : Thomas Samson) |
Le phénomène est cependant difficile à quantifier, car “très sous-jacent” et faisant parfois l’objet de “fantasmes” de certains habitants, reconnaît M. Goldberg. Surtout, il n’explique pas à lui seul le sous-emploi que connaît ce département au nord de Paris.
Le problème du département est celui de la “connexion” de ses habitants “au monde économique”, juge ainsi Saïd Hammouche, patron du cabinet de recrutement Mozaik RH, spécialisé dans la “diversité”, pour lequel “la grande majorité des entreprises sont très en retard sur le sujet”.
“Bon virage”
De toute façon, les “grands noms” qui s’installent “cherchent d’abord des salariés très diplômés”, constate la maire communiste de Saint-Ouen, Jacqueline Rouillon, qui a vu arriver le finlandais Nokia ou le numéro un mondial des cosmétiques L’Oréal.
Or, le bassin d’emploi regorge de jeunes peu qualifiés, avec un tiers des moins de 26 ans sans aucun diplôme et 40% d’entre-eux au chômage, cinq points de plus que dans le reste de l’ÃŽle-de-France.
“Certains jeunes ne possèdent pas les codes, il faut même leur apprendre à dire bonjour”, affirme le préfet de Seine-Saint-Denis Philippe Galli, pour qui le département est cependant “en train de prendre un bon virage, à voir la qualité des +signatures+ qui s’y installent”. Le tout, pour lui, “c’est de ne pas exclure” de l’emploi “ceux qui sont sur site”.
ège social de la SNCF à Saint-Denis, dans la banlieue parisienne, le 29 juillet 2013 (Photo : Bertrand Guay) |
Si les élus applaudissent les installations de grandes entreprises comme SFR ou Orange, qui profitent de terrains peu onéreux proches de Paris et de l’aéroport de Roissy, le département continue de souffrir davantage que ses voisins, avec un taux de chômage de 13,1% début 2013, contre 9,1% en moyenne en région parisienne.
“On est sur un bassin d’emploi énorme” et même “quand une boîte comme SFR s’installe” avec plusieurs milliers de salariés, “on ne peut pas considérer que les choses vont se régler du jour au lendemain”, tempère M. Hammouche.
Parfois, les entreprises qui s’installent parce que le foncier est moins cher n’ont tout simplement pas besoin d’embaucher. L’arrivée de la SNCF, avec 3.000 salariés prévus à La Plaine-Saint-Denis d’ici le premier semestre 2015, ne devrait ainsi pas créer d’appel d’air: il s’agit avant tout de regrouper des salariés dispersés dans Paris.
Directeur général du groupe de travail temporaire Ranstad, Adel Aïssou, énarque et ancien de la Marche des beurs de 1983, juge qu’il faut laisser le temps aux entreprises de “créer un véritable tissu économique”.
Son groupe a été l’un des premiers à s’installer il y a dix ans autour du Stade de France, et aujourd’hui, “la greffe a pris” dans l’une des zones les plus dynamiques du département : désormais, deux salariés du siège sur trois habitent dans des départements de la banlieue nord de Paris, et un sur cinq en Seine-Saint-Denis.