ésident du directoire de PSA, Philippe Varin, à Paris le 25 novembre 2013 (Photo : Kenzo Tribouillard) |
[27/11/2013 18:35:44] Paris (AFP) Philippe Varin, président du directoire de PSA, a renoncé mercredi aux 21 millions d’euros prévus par PSA pour sa retraite chapeau, face à l’avalanche de critiques suscitée par cette somme colossale, alors qu’il s’apprête à laisser la barre d’un constructeur automobile en pleine tempête.
“Compte tenu de la polémique que ce sujet a suscité, de l’émotion dans notre pays qui a aujourd’hui besoin d’être rassemblé plutôt que divisé, compte tenu de l’immense respect que j’ai pour les collaborateurs du groupe (…) j’ai décidé de renoncer aux dispositions actuelles de mes droits à retraite”, a déclaré M. Varin au cours d’un point presse improvisé dans l’après-midi au siège de PSA à Paris.
“Ces dispositions avaient été approuvées par le conseil de surveillance et votées lors de l’assemblée générale en 2010 dans un contexte assurément bien plus fragile que celui d’aujourd’hui”, a-t-il néanmoins tenu à rappeler.
“Je m’en remets au conseil de surveillance du groupe pour décider, quand le moment sera venu, et après avis du Haut Comité de Gouvernement d’Entreprise (instance déontologique patronale, ndlr), des conditions appropriées de mon départ à la retraite”, a ajouté le dirigeant, assurant avoir “toujours fait de l’intérêt de l’entreprise une priorité absolue”.
Le président du directoire du constructeur automobile, qui devrait quitter ses fonctions au printemps, devait bénéficier, conformément à des documents officiels du groupe, d?une retraite chapeau d’un montant de plus de 21 millions d?euros, après moins de cinq ans à la tête de l’entreprise en difficulté.
Une décision annoncée sous une pression extrême, les 21 millions d’euros mis de côté par PSA depuis le début de la journée ayant suscité la réprobation générale, du gouvernement aux syndicats, mais aussi dans les rangs de la gauche et d’une partie de la droite.
Cette somme a notamment été qualifiée d'”inappropriée” et d'”inadmissible” par les ministres de l’Economie Pierre Moscovici et du Redressement Productif, Arnaud Montebourg, alors que l’Etat a récemment accordé une garantie de 7 milliards d’euros pour la banque PSA finance. Le gouvernement étudie également l’hypothèse d’une entrée de l’Etat au capital de PSA, avec le chinois Dongfeng, pour sauver le constructeur.
“Pourquoi ferait-on souffrir les petits vieux, les anciens combattants, les associations, tout un petit peuple français qui se serre la ceinture et on offrirait 21 millions à ce monsieur ? On pourrait lui offrir un pot de retraite, avec quelques cacahuètes”, s’est emporté le député PS Malek Boutih sur France Info.
“Si cela était confirmé, ce serait scandaleux (…). C’est un exemple déplorable, un très mauvais signal envoyé à la France toute entière et en particulier aux salariés à qui on demande des efforts”, a jugé de son côté Jean-Michel Baylet, le président du Parti Radical de Gauche, sur la radio RFI.
Bilan décevant
ée après la réunion du conseil des ministres (Photo : Eric Feferberg) |
L’ampleur de cette retraite chapeau a d’autant plus choqué que le bilan de Philippe Varin après moins de cinq ans à la tête de PSA est loin d’être glorieux. Cet ancien de la sidérurgie passera la main courant 2014 à l’ancien numéro deux du concurrent Renault, Carlos Tavares. Il lui laisse un constructeur en crise, qui vient de troquer la suppression de 8.000 postes et un gel des salaires contre un maintien de sa production en France.
Une partie de la droite avait également accablé le patron de PSA sous les critiques.
“Je suis choqué. Partir avec une retraite de cette importance-là quand on a échoué à la tête de Peugeot, quand on n’a pas été capable de sauver un certain nombre d’emplois, quand on demande des efforts aux salariés, je trouve ça tout simplement indécent”, a notamment tempêté l’ancien ministre de l’Agriculture et député UMP Bruno Le Maire, sur Radio Classique.
“Je n’ai pas à lui donner de leçon mais ça me parait excessif. (…) Le plus important pour moi, c’est de sauver PSA. C’est aux actionnaires d’en décider”, a estimé le patron de l’UDI et député du Nord Jean-Louis Borloo, sur BFMTV.
300.000 euros annuels après impôts
“Je bénéficierai d?une retraite complémentaire, comme la plupart des cadres dirigeants de grandes entreprises. A ce titre, je percevrai un montant net annuel d?environ 300.000 euros net annuel (après impôts, NDLR). Je ne toucherai donc ni maintenant, ni plus tard, la somme des 21 millions d?euros dont on parle”, avait tenté en vain de se défendre Philippe Varin à la mi-journée, sur France Info.
Le patron de PSA avait également tenu à rappeler qu’il ne toucherait “aucune indemnité de départ”. En 2011 et 2012, il avait aussi renoncé à la part variable (bonus et stock-options) de son salaire, face aux mauvais résultats du groupe.
La question avait interpellé jusque dans le monde patronal, le Haut-Comité de gouvernement d’entreprise, s’étant auto-saisi du cas Varin.
Cette instance autonome, sorte de police déontologique du patronat français a été créée en octobre après la révision du code Afep-Medef sur la gouvernance des entreprises.
Selon les documents officiels de PSA consultés par l’AFP, les 20,97 millions d’euros provisionnés pour la retraite complémentaire prévue pour Philippe Varin sont “conformes aux recommandations du code Afep-Medef applicables en la matière”.
Cette retraite chapeau, soumise à des charges sociales et dont le versement est étalée dans le temps, ne doit pas être confondue avec un parachute doré, acquitté en une fois par l’entreprise et exonéré de charges.
Les syndicats de PSA s’étaient indignés dès lundi de la retraite chapeau réservée à leur patron. “Bien sûr que c’est choquant, bien sûr qu’il devrait y renoncer”, avait protesté sur LCI Jean-Pierre Mercier, délégué syndical CGT à l’usine d’Aulnay, en cours de fermeture.