La police allemande high tech contre les chants nazis

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égionale de Saxe présente à la presse le logiciel utilisé pour identifier des chansons néo-nazies, le 11 décembre 2013 à Dresde (Photo : Robert Michael)

[13/12/2013 07:34:37] Dresde (Allemagne) (AFP) La police allemande s’est dotée d’un nouvel outil technologique pour identifier en quelques secondes des chansons néo-nazies, surnommé le “Nazi Shazam” en référence à la populaire application de reconnaissance musicale.

Les autorités de Saxe (sud-est), pour le moment le seul Etat régional à l’utiliser, espèrent pouvoir ainsi repérer et fermer les web-radios qui passent ces chants de propagande interdits.

“La musique est une porte d’entrée vers l?extrémisme de droite, nous le savons, donc à mes yeux, (cet outil) est très important”, a expliqué lors d’une récente présentation à la presse à Dresde Markus Ulbig, le ministre de l’Intérieur de Saxe, l’un des Länder où le parti néo-nazi NPD réalise ses meilleurs scores.

Le hard-rock néonazi est en effet depuis longtemps un outil de recrutement important pour les groupes d?extrême droite, qui distribuent des CD lors de leurs manifestations.

Le Bureau fédéral de contrôle des médias dangereux pour la jeunesse a établi l’an passé une liste noire de 79 titres accusés d’épouser l’idéologie néo-nazie ou de contenir des paroles racistes, selon le magazine Der Spiegel.

Le logiciel mis au point en Saxe crée un code unique ou “empreinte numérique” sur la base des fréquences utilisées par les chansons, puis confronte la musique suspecte à une base de données contenant les “empreintes numériques” des musiques interdites.

“Le programme est clairement plus rapide que l’homme, et lui, il n’a pas besoin de dormir”, souligne Martin Strunden, un porte-parole du ministère saxon de l’Intérieur.

Auparavant, les officiers de police devaient écouter les chansons puis comparer les textes à une vaste bibliothèque de titres mis à l’index.

“Cela prenait un jour ou deux pour écouter et retranscrire un album”, explique Jens auf dem Keller, en charge de la surveillance des médias dans la police de Saxe. “Avec le numérique, ça ne prend qu’un instant”.

Une technologie similaire est utilisée par l’application pour téléphones mobiles Shazam qui, par l’analyse d’une musique diffusée, reconnaît le titre de la chanson et l’artiste.

“les néo-nazis ont modifié leurs stratégies”

Avant d’utiliser leur application dans les conditions du réel, les responsables saxons ont lancé un appel dans tout le pays pour recueillir d’autres échantillons de musique afin d’agrandir leur base de données, qui contient pour l’instant 3.500 chansons interdites.

C’est l’augmentation du nombre de web-radios d’extrême droite en 2011 et 2012 qui a donné l’idée aux responsables saxons de développer ce nouveau logiciel. Et à mesure que les groupes en question développent leur activité en ligne, la police est contrainte de s’adapter et de mettre en place des outils de surveillance d’internet de plus en plus sophistiqués.

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éo-nazie saisis par la police de Saxe, présentés le 11 décembre 2013 à Dresde (Photo : Robert Michael)

“Les néo-nazis ont modifié leurs stratégies, quittant de plus en plus le monde réel pour le virtuel”, souligne Julia Wolrab de l’association “Contre l’Oubli, Pour la Démocratie” qui aide les personnes confrontées à de la propagande extrémiste en ligne.

Dans un rapport de 2013, l’organisation publique de contrôle des médias jugendschutz.net (protection de la jeunesse) explique que des groupes d’extrême droite utilisent des applications pour mobiles afin de diffuser de la musique ou des vidéos à leurs membres, et se servent des codes QR (codes-barres renvoyant à des sites web ou à d’autres contenus en ligne) pour recruter.

Les organisateurs de la “Journée de l’avenir allemand” qui s’est tenue en 2012 à Hambourg (nord) encourageaient les participer à coller ces codes QR sur leurs sacs à dos ou leurs tee-shirts pour se connecter discrètement à leur site internet.

Le rapport constatait également une augmentation, entre 2011 et 2012, de près de 50% du nombre de messages d’extrême droite sur les réseaux sociaux et observait une tendance au développement de campagnes sur ces mêmes réseaux évitant soigneusement les symboles nazis traditionnels pour séduire le plus grand nombre.

“A première vue, leurs pages ne sont pas différentes d’une page Facebook ou d’un blog créé par vous ou moi”, détaille Mme Wolrab ,dont l’association coopère avec la protection de la jeunesse. “La stratégie, c’est justement d’avoir l’air le plus normal possible”.