à Bordeaux le 2 juillet 2005 (Photo : Derrick Ceyrac) |
[21/12/2013 09:21:42] Bordeaux (AFP) Le tramway de Bordeaux, qui fête ses dix ans samedi, a été le premier à fonctionner, dans son centre historique, grâce à un système d’alimentation par le sol (APS), donc sans câbles aériens, technologie ultra-innovante à l’époque, que son concepteur, le groupe industriel français Alstom, a depuis exportée.
Pannes à répétition, usagers excédés, colères du maire Alain Juppé et du président de la Communauté urbaine (CUB), le socialiste Vincent Feltesse, menaçant de suspendre le projet, président d’Alstom venu présenter des excuses: les débuts du “tram sans fil” de Bordeaux, inauguré en grande pompe le 21 décembre 2003 en présence du président Jacques Chirac, ne furent pourtant pas un long fleuve tranquille.
En pleine rénovation urbaine, la capitale girondine avait fait un choix audacieux en pariant sur l’APS. Le système reposant sur un troisième rail central alimenté uniquement lorsque le tramway y circule n’avait été breveté que trois ans auparavant par Alstom. Malgré le surcoût engendré, Bordeaux entendait ainsi préserver son centre historique, un des plus beaux exemples européens d’architecture du 18e siècle, avec, en vue, un classement au patrimoine mondial de l’Unesco, obtenu en 2007.
ôtel de Ville (Photo : Derrick Ceyrac) |
Une décennie plus tard, les deux ans de rodage laborieux semblent bel et bien oubliés par les Bordelais qui plébiscitent leur tramway, longue chenille couleur anthracite devenue un des emblèmes de la ville. “La disponibilité est de 99,95%, ce qui veut dire que le tramway n’est en panne que pendant 0,05% du temps”, se félicite Cédric Louyot, ingénieur d’Alstom à Bordeaux. Alors que 14 km de voies sur 44 km fonctionnent déjà en APS, la prochaine extension du réseau prévoit également des tronçons sans câbles.
Une technologie mixte
Car, en dix ans, la technologie exclusivement développée par Alstom, n’a cessé d’être améliorée, assurant aujourd’hui une “fiabilité excellente, voisine de celle du tramway filaire”, souligne Cédric Louyot. En France, le système a déjà été vendu à Angers (Maine-et-Loire), Orléans (Loiret), Reims (Marne) et Tours (Indre-et-Loire).
A l’étranger, le système suscite aussi un intérêt croissant. La ville de Cuenca (sud de l’Equateur) l’a choisi pour son centre historique, également classé par l’Unesco. Soucieux d’être à la pointe de la technologie, l’émirat de Dubaï, auquel Alstom vient tout juste de livrer ses premières rames, a pour sa part misé d’emblée sur un réseau entièrement sans câble, soit 10 km en APS dès sa première ligne.
Le tramway de Bordeaux devant le palais de justice, le 14 juin 2012 (Photo : Jean-Pierre Muller) |
Au Brésil, la ville de Rio de Janeiro a commandé en 2013 des rames fonctionnant simultanément grâce à l’alimentation par le sol et à des “super-condensateurs” qui permettent de réutiliser l’énergie libérée lors des freinages. A Nice, un système proche de batteries embarquées a été inauguré en 2012.
Grâce notamment à sa vitrine bordelaise, très régulièrement visitée par des délégations étrangères, et fort de sa longueur d’avance sur ses concurrents, notamment le Canadien Bombardier et l’Espagnol CAF, Alstom se targue ainsi d’être en mesure de proposer une “gamme complète de solutions sans caténaires” aux villes qui veulent valoriser leur patrimoine architectural.
Au total, 42 kilomètres de voies ont été équipées du système APS. “Il y a plus de kilomètres d’APS en commande aujourd’hui que de kilomètres déjà installés, ça progresse très vite”, résume Cédric Louyot, satisfait que s’évanouissent les réticences liées aux lignes électriques aériennes disgracieuses. “Aujourd”hui, ce n’est plus un problème lorsque le tramway passe devant la cathédrale d’Orléans ou sur le pont Wilson de Tours”.
Une bonne nouvelle pour la Communauté urbaine de Bordeaux. En 2006, pour la remercier “d’avoir pris le risque d’être pionnière”, Alstom avait signé avec l’agglomération une convention d’intéressement financier sur les futures ventes du système en dehors de Bordeaux, au titre de sa participation à la mise au point du système. A ce jour, et sans comptabiliser le tramway de Dubaï, la CUB indique avoir touché près de 180.000 euros.