On
disait l’Afrique mal partie, voilà que la France se trouve mal embarquée en
matière de coopération avec le continent. Quelle place pour la France en Afrique
à l’avenir?
Le sommet France Afrique trouve son bien-fondé dans la volonté affichée par la
France pour un changement de paradigme dans la manière de coopérer avec le
continent. Quinze propositions ont été arrêtées pour l’occasion. Mais en dehors
des résolutions de bonne volonté, quels mécanismes pour transformer la
situation?
L’Afrique, dernière frontière de l’économie mondiale, courtisée de tous
Le continent se prévaut de dix années de croissance sans discontinuer. Et, se
trouve en pole position dans les projections des investisseurs internationaux.
C’était notamment le cas du magazine anglais “The Economist“* pour l’année qui
s’annonce. L’Afrique, en réalité, connaît un mieux-être et non un vrai miracle
économique, car sa croissance sature à 5%. Mais malgré tout, le continent est
regardé comme la dernière frontière de l’économie mondiale.
La France semble avoir “lâché“ le continent, faute de moyens ou par courte vue.
Selon notre confrère Jeune Afrique, Edouard Balladur, dès 1995, s’en est
détourné. Ce sont le FMI et la BM qui, tant bien que mal, ont pourvu aux besoins
de financement des pays africains. Et Lionel Jospin, y est allé de sa naïveté à
supprimer le ministère de la Coopération. La mariée étant trop belle, c’est la
Chine et quelques dragons du sud-est asiatique qui ont été prompts à occuper la
place.
Consciente de la perte de ce précieux hinterland, au potentiel énorme et qui
plus est lui était acquis, la France entend revenir dans la partie.
Quel sera l’effet de levier qu’elle devra exercer pour reconquérir cet eldorado,
à l’avenir prometteur?
L’Afrique : Théâtre de rivalités entre la Chine et la France
Tous les pays qui nourrissent une vision d’avenir pour l’Afrique se présentent
avec un deal. La Chine et ses suiveurs asiatiques ont exploité l’effet d’aubaine
d’un continent demandeur de tout. Ils ont poussé leurs parts de marché boostant
leurs flux d’échanges de 3 à 18% sur les dix dernières années. Dans le même
intervalle de temps, la France régressait de 15 à 5%.
Mais les chinois ont eux aussi abusé de leur position dominante et ont eu une
attitude de prédation marchande et des investissements peu intégrateurs
faiblement employeurs, et donc quasiment colonialistes.
La France arrive avec un deal mieux structuré. Elle aligne un trésor de guerre
de 20 milliards d’euros à la clé pour les 5 prochaines années. Cela suffit-il?
Et dans cette perspective, elle entend s’appuyer sur la Tunisie, notamment pour
relancer une nouvelle configuration de partenariat.
Un plan Marshall l’Afrique, sinon rien
Quand l’Amérique a voulu aider les Européens, meurtris par la Deuxième Guerre
mondiale, à se relever, elle a conçu le plan Marshall.
Du bricolage partenarial ne marcherait pas. Il faudra des plateformes
industrielles tournées vers les besoins du Continent sinon rien. Et puis les
mécanismes de financement ne peuvent être logés dans des structures,
fussent-elles aussi efficaces que AFD ou Proparco.
On ne peut s’exonérer d’une “Banque de reconstruction et de développement pour
l’Afrique“. Et puis la France doit s’ouvrir aux groupes locaux. Plus que toutes
les grandes écoles françaises -entendez Polytechnique Paris, Centrale ou Arts et
Métiers- doivent aussi se répliquer sur le continent.
La France, en acceptant de changer de paradigme, devra, tout simplement,
accepter le co-développement.
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*Afrique subsaharienne :5,2% ; Asie sauf Japon : 5,7%, MENA : 4%,UE est : 3%,
Amérique Latine : 3,3%, USA : 2,5%, Japon :1,7%, UE Ouest :1,1%.