Au regard de l’ampleur des réactions négatives au projet de loi de finances 2014, tout indique qu’elle sera révisée. Dans le pire des cas, plusieurs de ses dispositions jugées «improductives» devraient être tout simplement supprimées.
Beaucoup d’observateurs de la chose tunisienne déplorent l’autisme du ministère des Finances, son entêtement à accabler, par de nouvelles charges fiscales, une classe moyenne et des entreprises déjà fortement fragilisées par les effets collatéraux de la révolution. Ils vont jusqu’à qualifier de «crime économique» ce projet de loi. Toutefois, ils ne s’arrêtent pas aux critiques et objections. Ils proposent des alternatives aux dispositions impopulaires.
Pour mémoire, syndicats, patronats, parlementaires (commission des finances), diplômés chômeurs, commissaires aux comptes, experts de tout bord, fiscalistes… avaient épinglé cette loi et déploré, selon l’intérêt de chacun, ses dispositions qualifiées d’impopulaires et antiéconomiques.
Les objections formulées à l’endroit de cette loi portent sur l’assujettissement de l’off shore à l’impôt (10%), l’institution d’une taxe de voiture pour les cylindrées de puissance fiscale de plus de 5 Cv, l’institution d’une taxe foncière sur les maisons secondaires, la non-prévision d’importants recrutements dans la fonction publique…
En gros, le projet de loi a tendance à ménager les communautés en fraude du fisc et à sanctionner ceux qui paient leurs impôts.
Les opposants à cette loi estiment, certes, que ce projet, pour peu qu’il soit avalisé par l’Assemblée nationale constituante (ANC), risque de plomber et, partant, de pénaliser plusieurs activités, structurellement génératrices d’emplois (bâtiment, composants automobiles…), mais pensent en même temps que le ministère des Finances dispose encore de marge de manœuvre pour corriger le tir et opter pour d’autres alternatives aux dispositions incriminées…
Criminaliser la fraude fiscale…
Mohsen Hassen, universitaire et expert économique, propose à lui seul, quatre alternatives. Il s’agit de criminaliser, au fort taux, la fraude fiscale, de réviser de manière drastique le régime forfaitaire qui ne bénéficie actuellement qu’aux fraudeurs du fisc (quelque 350.000 personnes morales et physiques concernées), et d’assujettir à l’impôt plus de 524.000 entreprises opérant dans l’économie souterraine, et ce sur un total de 616.000 entreprises que compte le pays.
La quatrième alternative consistera, selon lui, à lancer un emprunt national pour financer les équipements dont auront besoin, en 2014, les ministères de l’Intérieur et l’armée nationale, ce qui permettra d’alléger les finances de l’Etat au cours de cet exercice.
Côté gouvernement, le ministre des Finances, Elyès Fakhfakh, a réagi à toutes ces critiques et propositions et déclaré, dimanche (1er décembre 2013), sur les ondes de radio Mosaïque, que «certaines critiques formulées à l’encontre de la loi de finances 2014 induisent l’opinion publique en erreur». Il a ajouté que les déclarations dénonçant les graves risques que fait encourir ce projet de loi pour le pays ont pour but d’angoisser le peuple alors que les mesures entreprises dans ce cadre visent à améliorer le pouvoir d’achat des couches sociales démunies.
Décryptage : le ministre campe sur ses positions. Il a choisi son clan, celui des communautés qui ne peuvent payer leurs impôts, tuant au passage les poules qui pondent de l’or, voire les classes moyennes et les entreprises.