Des billets de banque argentins |
[16/01/2014 11:46:36] Buenos Aires (AFP) L’inflation ne faiblit pas en Argentine: depuis 6 ans, la hausse annuelle des prix dépasse les 20% atteignant même 28,3% en 2013, selon les instituts d’études privées, alors que le gouvernement ne reconnait qu’un taux de 10,9%.
L’Institut national des statistiques (INDEC, officiel) est accusé depuis 2008 de diffuser des statistiques tronquées. Alors, les nombreux instituts d’études privés répondent avec leurs propres chiffres aux annonces officielles.
D’après l’indice Congrès, une moyenne des taux d’inflation calculés par les instituts privés argentins, la différence entre les deux indices était déjà abyssale en 2012, 10,8% contre 25,6%, ainsi que les années précédentes.
“Au cours de la dernière décennie gouvernée par les Kirchner, jamais l’inflation n’avait été aussi forte qu’en 2013”, souligne Lorenzo Sigaut, économiste en chef de l’institut Ecolatina.
Le gouvernement a assuré qu’en 2014 l’indice officiel serait modifié, après une révision de la méthodologie en concertation avec des experts du Fonds monétaire international (FMI) qui dénonce depuis des années l’absence de statistiques économiques fiables.
En décembre, le FMI a donné jusqu’à fin mars à l’Argentine pour que l’INDEC fournisse des chiffres crédibles sur l’inflation et le Produit intérieur brut (PIB), qui lui valent une procédure de sanctions inédite au sein du Fonds.
“L’INDEC n’est pas fiable et ce n’est pas un problème de méthodologie. Ce sont les numéros qu’ils mettent dans le système qui sont faux”, considère l’économiste Nicolas Dujovne, qui dirige un institut d’études. L’inflation réelle se situe entre 24,5 et 28,5%. Le gouvernement ne peut pas déléguer l’indice de l’inflation au secteur privé”.
Mesures inefficaces
En 2013, l’inflation a été accompagnée d’une dévaluation d’au moins 24% du peso argentin face au dollar.
Pour lutter contre l’inflation, le gouvernement de la présidente de centre-gauche Cristine Kirchner a imposé des mesures jusqu’ici inefficaces. La dernière, le 1er janvier 2014, est de placer sous surveillance du secrétariat un contrôle des prix dans les supermarchés sur près de 200 produits de consommation courante.
Le 1er février 2013, le gouvernement argentin avait instauré un gel des prix dans la grande distribution, sans effet sur l’inflation.
Les autorités argentines rejettent la responsabilité de l’inflation sur les grandes chaînes de supermarchés, estimant qu’elles ont le pouvoir de définir les prix.
Pour Lorenzo Sigaut, “il serait souhaitable que l’indice national s’approche des chiffres réels et que le gouvernement reconnaisse qu’il y a un problème d’inflation” indépendant de la politique de prix pratiquée par la grande distribution.
L’Etat argentin soutient que la hausse des prix ne dépasse pas 11% mais augmente chaque année les salaires des fonctionnaires de plus de 20% et fait pression pour que les accords de branche dans le secteur privé s’alignent sur ces hausses. Pour les instituts privés, c’est une contradiction qui illustre la réalité de l’envolée du coût de la vie.
“Les négociations paritaires (entre le patronat et les syndicats) se font sur la base de l’inflation des instituts privés”, souligne Nicolas Dujovne.
Marina Dal Poggeto, de l’institut Bein, doute de la fiabilité du nouvel indice pour 2014. “Le FMI a apporté une aide technique, mais il ne peut pas faire un audit de l’INDEC. Une chose est la méthodologie, une autre est de savoir quels prix seront enregistrés dans le logiciel pour calculer l’indice”, relève-t-elle.
Ne sachant pas ce que vaudront leurs pesos dans six mois et confrontés au contrôle des devises pour pouvoir épargner en dollars, les Argentins consomment à tout-va. Les ventes d’automobiles ont battu un record l’an dernier. D’autres achètent des dollars au marché noir, à près de 11 pesos pour un dollar, alors que le taux officiel est de 6,70 pour un billet vert.
Pour 2014, les instituts d’études privés tablent sur une inflation supérieure à 30%.