Une personne consulte son smartphone (Photo : Kenzo Tribouillard) |
[19/01/2014 19:23:45] Washington (AFP) Le stockage des données, actuellement entre les mains de la NSA, sera le grand casse-tête du Congrès et du gouvernement américains dans les mois à venir, dans le cadre de la réforme des opérations de surveillance annoncée par Barack Obama.
En présentant vendredi son intention de rogner les pouvoirs de l’agence nationale de renseignement NSA, le président américain a laissé de grandes zones d’ombre sur la manière dont les milliards de métadonnées téléphoniques collectées seraient désormais stockées et par qui.
“Je pense qu’une nouvelle approche est nécessaire”, a promis Barack Obama, en faisant le voeu que ces données –numéros appelés, heures et durées des appels– changent de mains.
Il a chargé le directeur du Renseignement James Clapper et le ministre de la Justice Eric Holder de lui faire leurs propositions d’ici fin mars, sans se prononcer sur quelle entité devrait être dépositaire de toutes ces informations. Les entreprises de télécommunications ont déjà fait part de leurs réticences.
Pour la sénatrice démocrate Dianne Feinstein, “le président a été très clair, il veut conserver ses capacités (de renseignement). Il veut trouver quelqu’un d’autre que le gouvernement pour garder les informations”, a-t-elle expliqué dimanche sur la chaîne NBC.
“Les métadonnées ne seront pas détruites mais mises entre les mains d’une tierce partie extérieure”, a également souligné le républicain Michael McCaul, président de la commission sur la Sécurité intérieure de la Chambre des représentants.
“Mais il va y avoir un vrai problème en termes de capacités sur qui, en dehors de la NSA, va pouvoir s’occuper de ces informations, en particulier en raison du fait que les entreprises téléphoniques n’en veulent pas”, a-t-il ajouté sur ABC.
“Tout cela comporte beaucoup d’incertitudes et nombre d’entre nous devrons y réfléchir profondément”, a renchéri Mike Rogers, élu républicain à la tête de la commission du Renseignement de la Chambre.
Quelle entité va avoir la capacité de stocker et d’utiliser toutes ces données rapidement en cas d’alerte terroriste, sans porter atteinte à la vie privée des Américains?, se sont demandés tous ces élus.
Risques pour la vie privée
“Nous avons toute une collection de données privées (…) sur presque chaque Américain”, a poursuivi Mike Rogers sur CNN. “Le président a choisi de les mettre entre des mains ou en un endroit privés, mais quel est cet endroit?”, a-t-il lancé.
M. Rogers a estimé qu’en aucun cas cela ne pouvait être le distributeur américain récemment piraté Target, “ou d’autres sociétés qui finissent par être la cible de cyberattaques”.
Quant aux entreprises de téléphonie, qui ont déjà exprimé leurs réticences, “elles ne sont pas équipées pour faire des fouilles instantanées et ne peuvent pas exploiter cette mine de données”, a jugé l’ancien président de la Chambre des représentants, le républicain Newt Gingrich.
“Désormais, nous avons la supervision d’un tribunal, la supervision de l’Inspecteur général, la supervision interne de la NSA, celle du ministère de la Justice, celle des commissions du Renseignement du Sénat et de la Chambre. Si vous transférez tout cela au secteur privé, vous perdrez toute cette supervision”, a poursuivi Mike Rogers sur CBS.
Pour Michael Hayden, l’ancien directeur de la CIA et de la NSA, “l’inquiétude que tout le monde a est d’autoriser notre gouvernement à avoir accès à notre vie privée, ma vie privée et la vie privée de chacun”.
“La décision du président de ne pas mettre fin à la vaste collecte et au stockage des données de tous les Américains demeure éminemment troublante”, a relevé pour sa part Anthony Romero, directeur de la puissante Union américaine de défense des libertés civiques (ACLU).
“La bonne réponse ici serait d’arrêter complètement cette collecte tous azimuts, et non de garder les données sous un toit différent”, a abondé Kevin Bankston, de la New America Foundation.
Pour Greg Nojeim, du Centre pour la démocratie et la technologie, “le manque de détails et de directives dans le discours du président montre que nous ne sommes qu’au début d’un débat amplement nécessaire, et non à la fin”.