Alors qu’elles étaient sous Ben Ali boycottées de fait par les Tunisiens, les télévisions nationales distancent aujourd’hui –et de plus en plus- les chaînes étrangères en termes d’audience. Grâce au vent de liberté qui souffre sur le pays depuis trois ans et qui permet aux médias en général et aux télévisions en particulier d’aborder tous les sujets quand et de la manière qu’ils l’entendent et, partant, de capter l’œil du téléspectateur tunisien.
Fini l’«asile» télévisuel. C’est là l’un des –rares- fruits fort appréciés de la révolution tunisienne: alors qu’ils étaient accros, sous Ben Ali, des télévisions étrangères –arabes pour les uns, françaises, pour les autres-, les Tunisiens sont devenus depuis le 14 janvier 2011 de gros consommateurs de chaînes «Made in Tunisia». Et à en croire Hassen Zargouni, la tendance ne fait que s’accentuer d’une année à l’autre.
Ainsi, d’après les données présentées samedi 25 janvier 2014, par le directeur général de Sigma Conseil, à l’occasion de la dixième édition de l’Open Sigma, les TV bien de chez nous dominent le classement des audiences.
En pôle position figure Al Wataniya (30,3%), suivie d’Ettounissia TV (24,1%), et Hannibal TV (19,6%). La première chaîne étrangère est Al Jazeera, qui arrive loin derrière (3%), en cinquième position, talonnée par Al Wataniya 2 (2,9%), MBC 4ème (2,7%), etc.
Le classement est à peu près le même pour ce qui est de l’audience quotidienne. Le Top 5 est dominé par les cinq principales chaînes nationales, dont Al Wataniya 2, mais y figurent également MBC 4 (6ème), Al Jazeera (7ème), une autre chaîne tunisienne (Al Janoubia, 8ème), MBC 2 (9ème) et France 24 (10ème).
Comme le souligne à raison Hassen Zargouni, ce renversement de situation est imputable au vent de liberté qui souffre sur le pays depuis trois ans et qui permet aux médias en général et aux télévisions en particulier d’aborder tous les sujets quand et de la manière qu’ils l’entendent et, partant, de capter l’œil du téléspectateur tunisien.
Mais dans ce marché audiovisuel plus compétitif que jamais, les atouts diffèrent. Ainsi, c’est grâce à son journal télévisé de 20H –qui capte tous les soirs l’attention de 2,5 à 3 millions de téléspectateurs- qu’Al Wataniya 1 cartonne. De son côté, Ettounissia fait son trou grâce à «Ainsi Ma Nkoulek», l’émission la plus populaire du paysage télévisuel national.
Fait paradoxal, ce paysage reste dominé par des chaînes ayant vu le jour avant le 14 janvier 2011. Les nouvelles, elles, ont du mal à s’imposer. Notamment parce que les moyens mis sur la table sont trop faibles. «Le marché publicitaire est estimé à près de 40 millions de dinars, un gâteau trop petit pour pouvoir faire vivre tout le monde», explique le patron de Sigma Conseil. Pour qui il faut au moins dix millions de dinars pour assurer le minimum nécessaire au fonctionnement d’une télévision. Or, comme les «majors» s’adjugent l’essentiel du gâteau publicitaire, les autres ont forcément du mal à joindre les deux bouts. Surtout lorsque, comme Zitouna TV ou Al Mutawassit, elles ont une très nette coloration idéologique, note le DG de Sigma Conseil. .