élévision (Photo : Issouf Sanogo) |
[31/01/2014 07:24:34] Dakar (AFP) Une vidéo d’une sélection de candidates pour une émission de téléréalité au Mali alimente depuis quelques jours des débats dans ce pays et sur les réseaux sociaux, certains accusant ses initiateurs de faire la promotion de l’idiotie, d’autres de mettre à nu le naufrage de l’école.
Les chaînes du groupe de télévision Africable, basé à Bamako, diffusent les castings de l’émission “Case Saramaya – C’est moi la plus belle” destinée, selon la société productrice Fanaday Entertainment, à “promouvoir la mode et la culture africaine”. Le programme en est cette année à sa quatrième saison, a indiqué à l’AFP un responsable d’Africable joint depuis Dakar.
La vidéo au centre de la polémique, diffusée la semaine dernière et dont des extraits étaient consultables jeudi sur (http://youtu.be/xCwQs4X001w), montre des candidates censées être diplômées ou étudiantes avec un bas niveau de français, la langue officielle du Mali.
L’une d’elles se présente comme secrétaire de direction mais est incapable d’épeler un mot. Une autre, en faculté de médecine, parle d'”hypoglycémine” mais indique ne pas en avoir le sens “en tête”…
Depuis la diffusion de l’émission, de vifs débats animent les sites maliens et les réseaux sociaux, certains accusant les promoteurs d’atteinte à l’honneur des Maliens, tandis que d’autres les saluaient pour avoir permis de mettre sous les projecteurs l’état de déliquescence de l’école malienne.
Ce genre d’émission “n’apporte rien à la jeunesse et l’abrutit davantage”, dénonce une internaute, tandis qu’un autre peste: “Voilà ce qui arrive quand on achète les diplômes”.
Sur Twitter, @AichaToure parle de “CaseSaramayaGate” et note que les réactions d’indignation de certains sont exprimées “dans un français pire que celui des candidates”. @MrMaith a envoyé le lien de la vidéo au compte Twitter officiel de la présidence malienne en lançant: “Pardon, il faut faire quelque chose”.
“Jamais une émission de téléréalité n’a autant interpellé l’opinion publique malienne”, a souligné mercredi le quotidien privé malien Les Échos, selon lequel “le niveau des étudiants maliens est de plus en plus bas” et le casting de l’émission de téléréalité “une illustration du niveau réel de l’école malienne”.
“Les Maliens ne veulent plus de la diffusion du casting de la honte sur Africable” estimant que le programme fait la promotion “de l’idiotie”, a de son côté rapporté jeudi le site JournalDuMali.com, ironisant sur le titre de l’émission: “Case Saramaya: c’est moi la plus bête?”
Concernant le niveau des candidates, “il n’y a pas à dire, c’est une catastrophe” mais “prendre ces malheureuses comme exemple de l’échec du système éducatif malien, (…) c’est un peu expéditif”, déclare le blogueur Askia Mohamed sur sa (http://askiamohamed.wordpress.com/).
“Il ne faudrait pas généraliser. (…) Et il est terrible d’admettre que si ces jeunes filles n’avaient pas donné des réponses aussi stupides, nous ne serions pas en train de parler de l’émission en question” qui, estime-t-il, “aura au moins eu pour intérêt de lancer un débat sur l’éducation au Mali”.
Dans son programme d’actions 2013-2018 publié en novembre 2013, le gouvernement malien avait lui-même estimé que “l’école malienne traverse une crise majeure, qu’il faut conjurer”.
“La qualité de l’enseignement demeure préoccupante” au Mali, pays de quelque 16 millions d’habitants où “le taux d’encadrement des élèves est uniformément bas”, avait-il affirmé.
“Dans le domaine pédagogique, les résultats sont faibles en termes d’apprentissage. En conséquence, la proportion d’adultes sachant lire aisément après six années de scolarisation s’établit à 49%, contre près de 70% au Bénin et au Sénégal, et 80% au Togo”, avait indiqué la même source.