«Monsieur économie» du gouvernement Ali Laarayedh sortant, en l’occurrence Ridha Saïdi, ministre conseiller auprès du chef du gouvernement chargé des Dossiers économiques, a créé, jeudi 23 janvier 2014, l’évènement en dépoussiérant pour la première fois le dossier des fameux mégaprojets touristico-immobiliers, à savoir “la Porte de la Méditerranée“ de Sama Dubaï et “Tunis Sport city“ du magnat Boukhater.
Il a confirmé les rumeurs selon lesquelles le contrat de Sama Dubaï est en train d’être résilié à l’amiable, et ce compte tenu du fait que l’investisseur émirati n’a pas honoré ses obligations contractuelles.
Quant au projet du groupe Boukhater, il a révélé qu’il est en phase d’être réactivé à la faveur d’un compromis sur la vocation du projet et le maintien des installations sportives initialement prévues.
Parcimonieux, le ministre n’a pas été très bavard quant au repreneur du projet de «La Porte de la Méditerranée».
Les initiateurs de ces mégaprojets
Pour mémoire, ces projets ont été lancés, au temps du président déchu, dans des conditions «très opaques» par des investisseurs d’affaires émiratis peu fiables. Il s’agirait, selon des informations concordantes, d’investisseurs prédateurs qui exploitaient leur parenté lointaine avec des responsables politiques pour acheter, dans le monde arabe, au dinar symbolique, les plus beaux terrains, bénéficier de juteuses incitations fiscales, obtenir l’autorisation de vendre sur plan à des étrangers et oser même solliciter des facilités bancaires locales, autant de conditions que tout investisseur local aurait pu remplir.
Ces mégaprojets ont fait l’objet de conventions adoptées au forceps par un Parlement aux ordres à l’époque et moyennant de juteuses commissions versées aux membres de la famille royale et à certains hauts cadres du pays, dont Zaba lui-même.
A l’époque du président kleptocrate, ses ministres et autres sbires (médias, cadres du Rassemblement constitutionnel démocratique…) s’ingéniaient à ressasser que ces projets étaient la panacée “miracle“ pour booster l’activité économique, accroître l’attractivité du pays, créer des centaines de milliers d’emplois et, surtout, hisser la capitale au rang de mégapole capable de rivaliser avec des métropoles méditerranéennes, telles que Marseille, Rome et Barcelone.
Bref, une autre manifestation de la folie des grandeurs de l’ancien président et de ses collabos.
Sama Dubaï, affecté de plein fouet par la crise de 2009, abandonne
S’agissant du cas de la Porte de la Méditerranée, sur un coût global de 25 milliards de dollars réalisables en 14 étapes, le groupe Sama Dubaï s’était engagé à verser, seulement, 1,3 milliard de dollars, l’équivalent du montant mobilisé pour réaliser la station touristique d’Hammamet Sud.
C’est pour dire que ce projet touristico-immobilier est tout simplement une affaire hideuse de spéculation foncière.
Heureusement, la crise de 2009 est survenue pour affecter de plein fouet le groupe émirati qui a été obligé de geler le projet. Au Maroc et en Algérie, l’investisseur émirati, confronté aux mêmes problèmes, a été tout simplement exproprié. La Tunisie, apparemment plombée par la gestion de sa révolution, n’a pas eu le temps requis pour le faire.
Pourtant, un investisseur fort crédible qui a fait ses preuves en Tunisie aurait manifesté de l’intérêt pour la reprise du projet. Il s’agit de l’entreprise tuniso-saoudienne, la Société de promotion du Lac nord de Tunis (SPLT) qui a exprimé, officiellement, le désir de prendre en charge la promotion du Lac sud de Tunis en remplacement de la société émiratie, Sama Dubaï. Rien d’officiel n’a toutefois filtré sur le résultat des négociations.
D’autres informations ont fait état de l’intérêt qu’aurait porté, pour la reprise de ce projet, un groupe d’investisseurs tunisiens –vivant en France- et italiens. Le nom de ce groupe n’a jamais été dévoilé. Conséquence: de simples spéculations. Rien de sérieux.
Au plan local, des promoteurs immobiliers font de la pression, ces jours-ci, sur le gouvernement, pour exproprier les investisseurs étrangers et les faire bénéficier de ces sites d’autant plus que les terrains constructibles se font de plus en plus rares dans le Grand Tunis.
Aboukhater se rétracte puis accepte le cahier des charges initial
Quant au mégaprojet, “Tunis Sports City”, son promoteur a informé, en 2012, les autorités tunisiennes de nouveaux changements techniques apportés au plan d’aménagement détaillé de ce complexe, qui sera édifié sur les décombres du petit bois localisé à proximité de l’ambassade des Etats-Unis sur les Berges nord du Lac de Tunis.
Des rumeurs lui avaient prêté l’intention de changer la vocation de son projet et d’en faire un projet commercial au lieu d’une cité sportive (225 hectares), d’un coût global de 5 milliards de dollars avec pour composantes un terrain de golf, un stade de 10 mille places, une piscine olympique, un stade de tennis, un club house, des centres sportifs de formation …
Si on croit Ridha Saïdi, le promoteur est revenu sur ces changements et aurait accepté de réaliser en priorité les installations sportives.
Selon nos informations, la SPLT, qui gère les berges nord du Lac de Tunis, aurait pesé de tout son poids pour obliger Aboukhater à exécuter le premier cahier des charges, car elle tenait, particulièrement, à cette composante sportive pour améliorer l’attractivité des berges nord du Lac de Tunis dans leur ensemble.
Par delà ces tractations sur fond de spéculation foncière, il nous semble logique, en cette période de transition démocratique, d’engager un débat national sur l’opportunité de tels mégaprojets, et surtout sur leur impact sur l’environnement et sur la fluidité urbaine du Grand Tunis.