Le secteur hôtelier tunisien n’est pas sorti indemne de la tourmente de la révolution qu’a vécue le pays depuis 2011. Certaines unités hôtelières dans les différentes zones touristiques du pays ont été contraintes de fermer leurs portes.
Ainsi, 43 fermetures définitives ont été dénombrées en 2013, dans les deux zones touristiques très prisées, Nabeul et Hammamet, alors que 28 autres hôtels ont procédé à des fermetures saisonnières, selon les commissariats du tourisme dans ces régions.
Ces fermetures ont été décidées suite à une régression notable du nombre de touristes, notamment français, lequel (nombre) a été réduit de 33%; mais elles s’expliquent également par une faiblesse des démarches de marketing et, dans d’autres cas, pour des travaux de rénovation.
Pour la région de Sousse, 23 hôtels, d’une capacité globale d’environ 5.000 lits, ont été fermés, dont deux grandes unités hôtelières confrontées à des problèmes financiers, et trois autres fermées pour non respect des exigences de l’exploitation.
La Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH) devrait soumettre ce dossier et bien d’autres à la nouvelle ministre du Tourisme du gouvernement de Mehdi Jomaa, qui a réservé déjà sa première visite à la FTH.
Dans une interview accordée à la TAP, Radhouane Ben Salah, président de la FTH, a évoqué les principales priorités auxquelles va devoir s’attaquer le département du Tourisme, à savoir: améliorer l’hygiène et la propreté au sein des unités hôtelières et leurs environs, améliorer la qualité des prestations présentées aux touristes, à travers la formation des employés.
Espoir pour des hôtels en difficultés financières?
Evoquant les difficultés financières qui pèsent lourdement sur l’activité hôtelière, M. Ben Salah a expliqué que le coût de la nuitée a augmenté de 20%, en une année, alors que les prix de vente sont restés les mêmes, “ce qui a engendré des résultats d’exploitation très faibles et provoqué une détérioration de la situation financière des hôtels”.
Il a aussi cité le problème de l’endettement qui touche entre 140 et 160 hôtels en Tunisie et dont le volume est estimé à environ 3,9 milliards de dinars.
“Il s’agit, pour la plupart (3,4 milliards de dinars) de dettes structurelles qui remontent à la période d’avant la révolution”, a-t-il ajouté.
Le président de la FTH a critiqué, sur un autre plan, la surtaxation du secteur hôtelier, indiquant que la TVA appliquée sur le chiffre d’affaires des hôtels a doublé, passant de 6% à 12%, en moins de 10 ans, alors que cette taxation est de l’ordre de 7% dans les destinations concurrentes (Maroc, Turquie…).
Il a fait savoir que le ministère de Finances envisage de réviser cette taxation à la baisse pour la situer entre 7 et 9%.
Toutefois, le président de la FTH ne perd pas espoir, estimant que, pour 2014, les indicateurs vont renouer avec leur niveau de 2010 (année de référence pour le tourisme tunisien) et qu’ils s’amélioreront davantage dans les années à venir.
Pour lui, l’adoption de la constitution et la mise en place d’un nouveau gouvernement, sont des messages positifs qui contribueront à un regain de confiance en la Tunisie de la part des tours opérateurs, lesquels “vont réagir favorablement”.
Une structure de gestion des actifs hôteliers
Alors que le projet de la création d’une structure de gestion des actifs hôteliers est en cours de discussion entre la profession, la Banque centrale et le ministère de Finances, sur les modalités d’exécution, M. Ben Salah a jugé qu’il permettra de résoudre le problème d’endettement du secteur.
“Cette structure se chargera du rachat des crédits des hôtels auprès des banques pour les re-proposer ensuite aux hôteliers avec la possibilité d’un paiement sur une longue durée, soit de 20 à 25 ans et avec des conditions avantageuses”, a-t-il développé.
S’agissant de la nouvelle taxation de nuitées (loi de finances 2014), variant selon les catégories des hôtels et dont l’entrée en application est prévue pour octobre 2014, il a affirmé que la fédération va suggérer, dans la Loi de finances complémentaire, une taxation alternative à appliquer sur les entrées au niveau des frontières et des aéroports.
Il a estimé les recettes de cette taxation (des entrées) à plus 120 MDT/an, soit le double de recettes prévues par la taxation sur les nuitées (60 MDT/an), si elle est fixée à 10 euros par personne uniquement (environ 22 dinars).
De même, l’abandon de la taxation sur les nuitées permettra d’éviter la taxation des clients tunisiens et d’épargner à l’hôtelier la gestion de ce dossier un peu délicat”, a-t-il dit.
Pour ce qui est des retombées de la dépréciation du dinar (faiblesse des recettes), le responsable a appelé l’Etat à intervenir pour exiger “des contrats en devises et non en dinar” entre les hôteliers et les tours opérateurs étrangers.
Cette démarche a déjà montré ses avantages pour des destinations concurrentes, telles que la Turquie, l’Egypte, le Maroc, a-t-il dit, relevant qu’elle permettra aux hôteliers de maintenir un niveau raisonnable de recettes, quelles que soient les fluctuations de change.
Le président de la FTH a mis l’accent, aussi, sur la nécessité de diversifier les opérations de marketing et de commercialisation aussi bien via les tours opérateurs que via Internet.
“La réservation via Internet peut aller jusqu’à plus de 25% du total des réservations dans certains marchés touristiques, alors qu’en Tunisie elle demeure dérisoire”, a commenté le responsable.
D’après lui, les hôteliers tunisiens doivent aussi penser à enrichir et diversifier leurs produits et à investir dans de nouveaux créneaux et de nouveaux modes d’hébergement (hôtels de charme, camping…).
Evoquant les dépenses des touristes, le responsable a fait savoir que les dépenses extra-hôtelières ne représente que 10% du total des dépenses des touristes, alors que celles-ci dépassent le seuil de 50% dans d’autres pays.
Il a ainsi, appelé, à développer des espaces d’animation, des boutiques artisanales et des restaurants dans diverses régions touristiques du pays, pour inciter les touristes à sortir des hôtels et dépenser plus.