La flambée des prix de l’immobilier serait due, en partie, à la volonté des Tunisiens à acquérir un logement. «Ici à Tunis, l’acquisition d’un logement coûte très cher pour un simple fonctionnaire», regrette Samir, 41 ans, originaire de Tataouine, mais résidant et travaillant à Tunis.
Selon la dernière édition 2014 du guide de l’immobilier en Tunisie, les prix varient, à Tunis, en moyenne entre 1.200 et 3.000 dinars le mètre carré.
Dans les quartiers huppés (El Menzah, Ennasr et les Jardins de Carthage), le prix du mètre carré est négocié entre 1.500 et 1.900 dinars, alors qu’au centre-ville (avenue Habib Bourguiba et Mohamed V), ce prix varie entre 1.800 et 2.500 dinars.
Abdessalem Ben Rejeb, courtier immobilier, souligne qu’en plus de la hausse vertigineuse des prix des matériaux de construction, notamment celui du ciment qui a atteint, en janvier 2014, 7,850 dinars le sac, contre 6,250 dinars/sac en décembre 2013, les terrains bâtissables se font de plus en plus rares, surtout dans les grandes zones urbaines.
L’émergence d’une nouvelle clientèle assez riche, venant essentiellement de Libye et d’autres pays, a permis à ce secteur de connaître, au cours des trois dernières années, une effervescence.
«Il y a des clients étrangers qui préfèrent les logements standing et hauts standing alors que d’autres se contentent d’acheter ou de louer un logement moins onéreux, en mettant, toutefois, le paquet en devise», a précisé M. Ben Rejeb.
La hausse de la demande pour les logements meublés utilisés pour les longs séjours, enregistrée notamment après la Révolution, explique aussi cette croissance des prix dans les grandes villes tunisiennes.
Selon les chiffres de l’Institut national de la statistique (INS), le pourcentage des familles tunisiennes propriétaires de leurs logements est estimé à 79,2%, alors que le nombre des locataires est évalué à 373,5 mille personnes.
En dehors de la capitale, les prix des logements sont relativement moins élevés et diffèrent d’une région à l’autre, selon l’emplacement des logements et les coûts d’aménagement et de construction.
Dans les régions intérieures, il existe un autre facteur, en plus de la cherté, qui rend le rêve d’accéder à la propriété presque inatteignable: s’il demeure facile d’entamer des travaux de construction dans les zones urbaines, grâce à la proximité et la disponibilité des réseaux de la STEG, la SONEDE et l’ONAS, dans les régions intérieures, il faut, avant de bâtir, livrer bataille pour garantir l’accès aux services de ces trois prestataires publics.
Quid de l’AFH?
Actuellement, l’AFH est en train de préparer des cahiers des charges pour vendre, dans les jours à venir, aux jeunes promoteurs, 46 lotissements réservés aux logements collectifs dans les localités d’El Mourouj, El Menzah, Kairouan, Nabeul et Sahloul (Sousse), d’après une source de l’AFH, qui a requis l’anonymat.
A noter que les promoteurs ne sont pas satisfaits de la politique de planification adoptée par l’AFH, selon Fawzi Ayadi, expert en immobilier. «Une grande partie des lotissements manque de plans d’aménagement clairs surtout dans le Grand Tunis», a-t-il dit. Sans oublier que la politique de commercialisation des terrains contribue à l’amplification des coûts de la construction de logements, d’après lui. La rareté des terrains est aussi un facteur déterminant du coût de logement.
Dans la ville de Tunis, par exemple, les terrains aménagés par l’AFH sont situés dans des zones bien déterminées, où le mètre carré coûte très cher et où la demande s’accroît à un rythme accéléré.
Selon les dernières statistiques de l’Observatoire de l’habitat et du foncier (ministère de l’Equipement), le nombre des autorisations de bâtir a atteint 45.846 en 2013 contre 44.705 en 2012 alors que les besoins annuels en logements sont estimés entre 40 et 60.000 unités.
Ce déséquilibre entre l’offre et la demande a entraîné la hausse des prix des logements dont la charge foncière est arrivée à 15%, ce qui aura un impact sur la réalisation du projet immobilier, d’après Fahmi Chaâbane, président de la Chambre syndicale nationale des promoteurs immobiliers relevant de l’UTICA. Car, l’AFH choisit toujours la vente aux enchères des lotissements aménagés pour les logements sociaux, entraînant, ainsi une spéculation et partant une concurrence acharnée entre les promoteurs acheteurs. Cela a pour conséquence d’augmenter le coût de construction.
Le citoyen ne peut finalement réaliser ce rêve de devenir propriétaire qu’en passant par trois voies, le promoteur, l’AFH et les banques. Pour la première (le promoteur), il doit payer cher; pour l’AFH, il doit laisser tomber ses préférences en matière de placement de son logement; et pour la dernière voie (les banques), il doit s’engager à vie.