Dans une étude sur l’état des lieux des banques postales et des services financiers au Maghreb (octobre 2013), l’Institut de prospective économique des pays méditerranéens (IPEMED) précisait que seuls le Maroc, la Tunisie et la Mauritanie étaient concernés car «il n’a pas été possible de traiter le cas de l’Algérie et de la Libye faute d’avoir eu accès aux informations nécessaires».
Il n’y a pas mieux pour illustrer le retard de l’Algérie dans ce domaine, où le projet de banque postale n’a pas pu depuis presque dix ans aller au-delà de la phase de gestation. Pourtant, à travers sa couverture large du territoire, la poste peut «favoriser la hausse du taux de bancarisation», note l’étude. En évoluant vers le statut de banque postale, son objectif serait «d’équiper et de fidéliser le portefeuille clients, notamment les jeunes, avec une offre de crédit». Certes, la démarche est coûteuse puisque des investissements colossaux sont nécessaires, et par ailleurs le risque est «la baisse continue du chiffre d’affaires de la poste traditionnelle à l’avantage des services financiers qui deviennent le principal pôle de profit».
Les expériences voisines, notamment marocaine, montrent pourtant que le jeu en vaut la chandelle. La Tunisie et le Maroc affichent tous deux des niveaux de bancarisation supérieurs à l’Algérie. On compte une agence pour 12.000 habitants au Maroc et une pour 9.000 habitants en Tunisie contre une pour 25.000 habitants en Algérie. Pourtant, cela n’a pas empêché ces deux pays de développer des services financiers et bancaires annexés à la poste.
Lancé en 2007 au Maroc, El Barid Bank a permis d’augmenter le taux de bancarisation de 34% en 2007 à 52% en 2010. Le «statut bancaire était un outil technique de modernisation de l’économie marocaine», lit-on dans l’étude. La volonté des pouvoirs publics locaux était «de pousser la collecte de l’épargne et la bancarisation qui représentaient un outil de lutte contre l’informel et la réduction de l’utilisation du cash». Sur le plan juridique, il était question de créer une filiale dotée d’un agrément bancaire et de transférer des services financiers de Barid Al Maghrib vers Al Barid Bank. Celle-ci vise les particuliers et les populations à «bas revenus» à travers des produits comme les crédits particuliers ou immobiliers, l’assurance-vie, ou le transfert d’argent.
Aujourd’hui, Al Barid Bank est une banque universelle à part entière, orientée aussi bien sur les jeunes que sur les retraités et utilisant le mobile banking comme outil de développement de la bancarisation. Selon l’IPEMED, «le Maroc a franchi avec succès l’étape de transformation en banque postale». Pour se transformer, il aura fallu un peu plus de trois ans et la formation de 3000 salariés aux métiers de la banque. L’une de ses conséquences était cependant une baisse de l’activité du courrier de 3% par an.
La Poste tunisienne
En Tunisie, le Centre de l’épargne postale est une activité «historique» au même titre que celle des chèques postaux et la question de transformation de la poste en banque postale est toujours en réflexion. L’étude souligne que si la Poste veut fidéliser sa clientèle et conquérir de nouveaux clients, «le meilleur moyen d’y parvenir est d’offrir des crédits (consommation et immobilier) et d’accorder des découverts, ce que son statut actuel ne lui permet pas». Ceci n’a pas empêché le Centre d’épargne postale de développer des services diversifiés aux clients avec notamment un service de transfert électronique d’argent à l’international, des services de banques électroniques et une plateforme de paiement électronique sur le Net.
D’ailleurs, la part des services financiers représentait 41,2% de l’activité de la Poste en 1999 contre 58,8% pour les services postaux. En 2012, la part des services financiers est passée à 70% des recettes globales. Pour passer à un stade supérieur et créer une banque postale, l’étude préconise notamment de coupler l’activité d’épargne avec une offre de crédit, en s’aidant notamment de «partenariats avec des banques de la place».
En Mauritanie, la problématique de création d’une banque postale est sérieusement posée. Et pour cause, «la poste mauritanienne Mauripost est le seul acteur financier public face à des banques privées majoritairement mauritaniennes qui ne couvrent pas l’ensemble des besoins», souligne l’étude. On note, en effet, un accès au crédit «limité avec des taux d’intérêt élevés», une offre aux entreprises insuffisante et un financement rural et de l’habitat quasi inexistant. Le taux de bancarisation dans ce pays est d’à peine 4%.
Dans ce cadre, la création «d’une banque publique doit servir d’aiguillon pour entraîner les banques privées vers de nouveaux marchés», estiment les auteurs de l’étude. Il s’agit surtout de mettre en place «une offre accessible sur l’ensemble du territoire à tous ceux qui ont besoin d’un service bancaire à des tarifs raisonnables comme banque citoyenne». Dans ce pays, il existe néanmoins une Caisse des dépôts créée en 2011, qui centralise l’épargne collectée par le réseau postal. Elle pourrait selon l’étude servir de tremplin au développement de nouveaux «produits d’épargne et d’investissements commerciaux».
Source : elwatan.com
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