Branle-bas de combat dans l’industrie spatiale européenne

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Astrium devenu Airbus Defence and Space (Photo : Remy Gabalda)

[13/02/2014 17:58:34] Paris (AFP) Les industriels européens de l’espace ont sonné le branle-bas de combat jeudi face à une concurrence féroce des géants américains mais aussi des nouveaux venus israéliens et coréens.

Pour conserver leurs parts de marché, le numéro un européen Airbus Defence and Space (ex Astrium) comme son rival Thales Alenia Space (TAS) appliquent des recettes similaires: amélioration de la compétitivité par une réduction des coûts et des effectifs et redéploiement des vendeurs à l’étranger, plus près des clients.

François Auque, patron des activités spatiales chez Airbus DS, explique les 15% de réduction des effectifs prévus dans ses équipes dans les deux années qui viennent par ce “contexte concurrentiel féroce”.

A la pression des concurrents étrangers, s’ajoute celle des clients gouvernementaux aux budgets en peau de chagrin qui demandent 20 à 30% de réductions sur les prix, a-t-il ajouté lors d’un séminaire sur les perspectives spatiales à Paris.

Jean-Loïc Galle, PDG de TAS, estime qu’une “révolution se prépare dans le marché du spatial mondial”.

L’année dernière, les fabricants européens sont passés pour la première fois sous la barre symbolique des 30% du marché des satellites de communication, a-t-il souligné. Dans les faits, les prises de commandes de TAS ont été inférieures au chiffre d’affaires 2013 alors qu’Airbus a enregistré de belles commandes.

– Lockheed et Boeing en “guerre commerciale” –

L’année a en revanche été exceptionnelle pour les satellites d’observation, de navigation et d’exploration, spécialité européenne. Mais, a prévenu M. Galle, “ce qu’on voit aujourd’hui sur les télécoms, on va le voir dans les cinq années qui viennent sur l’observation (…) avec une compétition acharnée, bien évidemment des Américains mais aussi des Israéliens et des Coréens en particulier”.

Le patron de la coentreprise franco-italienne a accusé les industriels américains –en clair Lockheed Martin et Boeing– de mener “une guerre commerciale” pour évincer les Européens du marché.

Selon lui, Washington a délibérément tardé à délivrer des autorisations d’exportations de composants américains sur des satellites espions français vendus aux Emirats Arabes Unis. Les autorisations sont acquises mais ce retard va obliger les deux fabricants, TAS et Airbus, à renégocier le contrat dans les prochains jours, a-t-il indiqué.

M. Galle a également reproché aux Etats-Unis d’avoir obligé TAS l’année dernière à cesser de vendre des satellites de télécommunications à la Chine. Par contre, “je prends le pari (…) que dans les deux ans qui viennent il y aura un satellite de communication civil américain qui sera vendu à la Chine”, a-t-il ajouté.

La réponse à cette pression concurrentielle, selon le PDG, passe par l’amélioration des produits, des gains de compétitivité et une réorganisation commerciale.

– Restructuration –

TAS a ainsi adopté une feuille de route pour améliorer la puissance de ses satellites de télécoms, adopter la propulsion hybride (chimique et électrique) qu’ils n’utilisaient pas et réduire leurs coûts.

L’industriel, basé à Cannes, va ainsi supprimer environ 300 postes en 2014 et 2015, sans licenciements, a-t-il souligné, mais en encourageant les départs à la retraite anticipés.

La restructuration d’Airbus Defence and Space (ou Airbus DS) a été mal reçue en France en particulier, où sont localisées la majorité des activités spatiales du groupe.

De plus, au 1er mars prochain, TAS modifiera son organisation commerciale plaçant ses commerciaux dans les régions, en Asie, à Singapour notamment, et en Amérique latine, pour qu’ils soient plus proches des clients, a annoncé M. Galle.

Airbus DS a un projet similaire de redéploiement des commerciaux plus près des clients, selon des sources haut placées dans la division.

TAS a enfin créé de nouvelles filiales à l’étranger, notamment en Russie que l’industriel considère comme le pays le plus prometteur pour sa croissance.

Il prévoit notamment de construire en coopération avec Gazprom des satellites de télécommunications mais aussi d’observation pour la surveillance de l’état de ses milliers de kilomètres de pipelines.