Les employeurs du Maghreb ne pourront pas avancer sur la voie de l’intégration tant que le politique ne s’investira pas assez. Constat parmi d’autres –mais essentiel- du 3ème Forum des entrepreneurs maghrébins qui s’est tenu les 17 et 18 février 2014 à Marrakech au Maroc. Ils ont décidé pourtant d’avancer.
Les employeurs du Maghreb réussiront-ils là où les politiques ont failli: assurer une intégration économique de cet espace né il y a 25 ans? Notons, ici, que le 3ème Forum des entrepreneurs maghrébins s’est tenu vingt-cinq ans jour pour jour (17 février 1989) après la signature du traité créant l’Union du Maghreb Arabe (UMA). Et de surcroît dans la même ville (Marrakech). Une manière sans doute de rappeler aux dirigeants maghrébins que cette Union n’a pas encore avancé comme il le faut.
L’objectif de cette rencontre était, du reste, de relancer l’intégration économique de l’UMA à travers la mise en place d’une initiative du secteur privé maghrébin: l’Initiative maghrébine du commerce et de l’investissement (IMCI).
Une IMCI qui a été conçue dans le cadre d’une étude réalisée par un cabinet danois, le cabinet Konsentino. Une sorte de feuille de route qui a été longuement débattue par les quelque 600 personnes qui ont participé au Forum de Marrakech.
Pour l’essentiel, les représentants des centrales patronales des cinq pays du Maghreb, qui ont répondu à l’appel de l’Union maghrébine des employeurs (UME) et de sa composante marocaine, la CGEM (Confédération générale des employeurs du Maroc), qui ont organisé la rencontre.
Tout un programme que cette IMCI qui passe par deux étapes à réaliser à court, à moyen et à long termes. D’abord doter l’UME des moyens capables de lui assurer une meilleure gestion de l’intégration tant souhaitée. Notamment au niveau des structures à mettre en place. Ensuite, initier un ensemble d’actions qui doivent rapprocher l’UME de la concrétisation de l’objectif d’intégration.
Pratiquer le langage de la vérité
Inutile de préciser qu’une autre partie des débats a touché à des aspects concrets: harmonisation des procédures douanières et réglementaires, développement d’un régime de transport commun, libéralisation des mouvements de capitaux…
Des débats à n’en pas finir qui révèlent à chaque fois que la construction d’un Maghreb économique est encore à faire. Et les patrons, malgré les initiatives et les programmes qu’ils peuvent mettre en place, dépendent beaucoup de la volonté des politiques et surtout des avancées qu’ils peuvent assurer en vue d’assurer cette intégration.
Inutile de préciser, là aussi, que le Forum de Marrakech n’a pas manqué de pratiquer le langage de la vérité. N’a pas été éludée, par exemple, la fermeture des frontières entre le Maroc et l’Algérie depuis 1994 (voilà vingt ans). Comme n’a pas été éludée la question des relations difficiles entre ces deux derniers pays en raison de l’ancien Sahara espagnol; les deux pays ayant des points de vue diamétralement opposés sur la question.
Mais il n’y a pas que ça: aucun sommet des chefs d’Etats de l’UMA ne s’est tenu depuis… 1994. Et de nombreux projets annoncés n’ont pas encore vu le jour. Dont notamment cette Banque maghrébine d’investissement et du commerce extérieur (BMICE), dont la convention portant création a été signée en mars 1991, à Ras Lanouf, en Libye, et que l’on ne cesse depuis de dire pour l’année prochaine à Tunis.
Six accords seulement ont été ratifiés
Des débatteurs n’ont pas manqué, dans le même ordre d’idées, de souligner que de près d’une trentaine d’accords à caractère économique a été conclue entre les pays de l’UMA, mais qu’à peine six accords ont été ratifiés.
Le résultat ne peut que s’en ressortir. Meriem Bensalah Chaqroun, la patronne des patrons marocains, se devait de rappeler, dans ce contexte, que «le commerce intra-maghrébin représente moins de 3% des échanges extérieurs des cinq pays du Maghreb. Ce taux est largement au-dessus de 60% pour les pays de l’Union européenne, de 25% pour l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-est), de 15% pour Mercosur (Marché commun de l’Amérique du Sud) et, plus près de nous, de 9% pour la CEDEAO (la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest)».
Faute de pas biens concluants sur cette voie, l’UME s’active: elle a signé, au cours de ce Forum, avec l’Union des banques maghrébines, un protocole d’accord destiné à accompagner les mesures initiatives à l’investissement dans les pays du Maghreb.
Les employeurs maghrébins ont également publié une déclaration («La déclaration de Marrakech») dans laquelle ils ont formulé un ensemble de recommandations -extraites pour l’essentiel de l’étude réalisée par le cabinet Konsentino. Et déjà fixé un rendez-vous: une première réunion de la Commission de restructuration de l’UME et de ses activités, le 20 mars 2014 à Casablanca, la capitale économique du Maroc.
Certains diront qu’il faut un début à tout!