Une vache et un verre de lait (Photo : Mychele Daniau) |
[24/02/2014 17:47:24] Paris (AFP) Les éleveurs de tous bords montent au créneau pour tenter d’obtenir in extremis une augmentation des prix du lait en 2014, avant la fin des négociations commerciales entre les industriels de l’agroalimentaire et la grande distribution jeudi.
Tous ont une même revendication: les cours du lait ont flambé de près de 10% sur le marché mondial en 2013 en raison d’une demande croissante en produits laitiers dans les pays émergents et ils veulent profiter de cette tendance favorable.
Problème: la grande distribution ne semble pas décidée à aligner ses prix de vente sur les cours mondiaux du lait. Selon les industriels du secteur (Fnil), le prix moyen des produits laitiers a même baissé de près de 1% en 2013.
Pour 2014, les perspectives ne s’annoncent pas meilleures puisque les négociations actuelles reposent sur un prix de 345-350 euros les 1.000 litres, alors que le marché mondial plaide plutôt pour un prix entre 380 et 400 euros les 1.000 litres payé à l’éleveur, selon la FNPL.
Pour ne pas rater le coche avant jeudi, les éleveurs se mobilisent donc. Ceux de la FNSEA, syndicat agricole majoritaire, ont carrément décidé de s’inviter à la table des négociations.
“Dès demain matin, nous allons nous inviter au box des négociations entre distributeurs et transformateurs” et tout particulièrement chez Leclerc et à Carrefour, a annoncé lundi au salon de l’agriculture Thierry Roquefeuil, président de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), branche spécialisée de la FNSEA.
Les éleveurs proposent même d’être les médiateurs des échanges entre distributeurs et industriels.
ésident de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), le 21 mars 2013 à Nantes (Photo : Frank Perry) |
Car ils craignent que le scénario habituel ne se répète, les industriels disant qu’ils ne peuvent “pas augmenter le prix payé à l’éleveur tant que la grande distribution ne fait pas passer cette hausse” et les distributeurs répondant que toutes les enseignes doivent s’engager, sinon il n’est pas possible de répercuter la hausse aux consommateurs. La guerre des prix fait en effet rage en ce moment dans la grande distribution.
Mais quel consommateur refuserait de payer deux centimes de plus sa brique de lait? s’interroge Thierry Roquefeuil.
Le patron des centres Leclerc a aussitôt réagi sur son blog, en affirmant acheter cette année le lait “à la hausse par rapport à 2013, tant pour le lait de vache que pour le lait de chèvre (…) y compris par rapport aux prix issus de la médiation l?an dernier”.
“Je constate, en lisant les déclarations des syndicats d?éleveurs, que toutes les hausses acceptées par E.Leclerc ne retombent visiblement pas dans la poche des éleveurs”, ajoute Michel-Edouard Leclerc, rappelant qu’il n’achète bien souvent pas son lait directement auprès des fermes, mais en passant par les industriels.
– Médiateur ou pas? –
Pour la FNPL, il faut que cette question se règle au sein de la filière, sans intervention des pouvoirs publics. “Une médiation nous décrédibiliserait” avant la fin des quotas laitiers en 2015 et désormais c’est la logique économique -et non un prix politique du lait- qui doit prévaloir, fait valoir le président du syndicat.
La Coordination rurale, syndicat agricole minoritaire, n’est pas tout à fait de cet avis. Vendredi, elle annonçait avoir saisi le médiateur des relations commerciales dans ce dossier.
“Nous demandons au médiateur d’organiser une table ronde entre les différents acteurs de la production laitière, producteurs, distributeurs et les transformateurs, pour savoir qui nous mène en bateau et quelles sont réellement les bases de leurs négociations”, avait expliqué à l’AFP Véronique Le Floc’h, présidente de l’Organisation des producteurs de lait (OPL), affiliée à la Coordination rurale.
“Le médiateur des contrats laitiers doit intervenir dans cette situation pour répartir équitablement les marges entre tous les acteurs de la filière et éviter aux agriculteurs d’être encore la variable d’ajustement”, demande le syndicat.
Au printemps dernier, les éleveurs avaient saisi le médiateur pour obtenir d’urgence une revalorisation des prix pour faire face à une hausse de charges, due en partie à la flambée des prix de l’alimentation animale.
Interrogée par l’AFP, la Confédération paysanne, syndicat minoritaire, n’a elle pas prévu d’actions sur le sujet. Mais elle rappelle qu’elle encourage les producteurs à trouver le moyen de s’unir au niveau des différents bassins laitiers afin de peser plus lourd dans le rapport de force avec les transformateurs, explique Laurent Pinatel, son porte-parole.
Les pouvoirs publics, qui défilent sur le stand des produits laitiers au salon, assurent également être mobilisés.
Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll explique qu’il “ne reste pas assis dans (s)on bureau” et qu’il est déjà intervenu sur le sujet, sans en dire davantage. Réponse peut-être d’ici à jeudi…