école élémentaire de Steuart W. Weller de Ashburn, en Virginie (USA) (Photo : Paul J. Richards) |
[07/03/2014 13:54:31] Ashburn (Etats-Unis) (AFP) Le jeu sur l’écran terminé, Sawyer et Michael, 10 ans, se congratulent. Que ces deux jeunes autistes se touchent n’était, il y a peu, pas si fréquent. Ils l’ont appris devant une console de jeu Xbox équipée de Kinect.
L’école élémentaire Steuart W. Weller d’Ashburn (Virginie), à quelque 50 km au nord-ouest de Washington, est l’une des écoles ou centres spécialisés des États-Unis à tester cet accessoire de console de jeu avec les jeunes autistes qu’ils accueillent.
Le système, lancé par Microsoft en 2010 pour les amateurs de jeux vidéo, permet de jouer sans manettes, en utilisant son propre corps grâce à un détecteur de mouvements.
Sans avoir été conçu pour les autistes, le Kinect semble désormais, selon certains experts, une piste intéressante pour aider les jeunes souffrant de ces troubles du développement, plus ou moins aigus, qui touchent un enfant sur 88 aux États-Unis, un sur 100 ou 150 en France.
Devant leur écran de télévision, Sawyer Whitely et Michael Mendoza, côte à côte, sautent, se penchent ou se baissent, des gestes que reproduisent leurs avatars lancés dans un canot virtuel sur une rivière bouillonnante.
Et quand ils ont fini, les deux jeunes garçons se frappent mutuellement la paume des mains, à l’américaine.
“Faire ce geste, se féliciter l’un l’autre, c’est quelque chose qu’on ne voyait pas souvent”, dit à l’AFP Anne-Marie Skeen, leur institutrice spécialisée, “Sawyer, maintenant, l’utilise régulièrement avec nous. Il sait que c’est une façon de dire +bon boulot!+”.
Les enseignants de Ashburn travaillent depuis deux ans, avec le Kinect, précisément sur ce déficit de communication qui caractérise l’autisme: “Les amener à se parler, à donner des instructions à un camarade, à suivre les instructions d’un autre”, détaille Lynn Keenan, enseignante et formatrice spécialisée.
Et “nous avons eu des résultats impressionnants”, ajoute-t-elle, “parce qu’ils ont vraiment envie d’y jouer”.
– Outil, pas solution miracle –
C’est cette motivation que retient lui aussi Dan Stachelski, qui dirige le Centre Lakeside pour l’autisme à Issaquah (Washington, nord-ouest). “Ils sont tellement motivés par le jeu qu’ils s’impliquent plus facilement, prennent des initiatives, et c’est ce qu’on veut les voir faire”, dit-il.
Avec le jeu “Happy Action Theater” par exemple, qui demande de lancer des balles ou de frapper des pierres, l’enfant, via son avatar, “communique avec l’environnement sur l’écran”, ajoute le président.
Plusieurs enfants peuvent aussi jouer en même temps “et pour ces gosses qui ont des difficultés à partager le même espace, qu’ils le fassent est la première étape de ce que vous voulez les voir réussir”, dit-il.
Effectivement, “de nombreuses familles sont en train de tester le potentiel” du Kinect, ajoute Andy Shih, vice-président scientifique de l’association des familles Autism Speaks, qui note aussi l’avantage du faible coût — 150 dollars — de l’accessoire.
Les résultats “semblent encourageants”, dit-il, “mais nous manquons de données scientifiques, on n’en est qu’aux tout débuts”.
La “population (autiste) est tellement diverse”, ajoute-t-il, “il y a des enfants qui parlent, d’autres qui ne parlent pas, certains ont des problèmes moteur, d’autres pas. Un seul outil ne peut pas être la solution miracle qui marchera pour tout le monde”, ajoute M. Shih.
Il ne s’agit donc pas d’un traitement mais d’un “outil qui facilite l’apprentissage”, insiste M. Stachelski.
Et pourrait même aider à établir un diagnostic. Ainsi, des chercheurs de l’université du Minnesota ont installé des Kinects dans une crèche pour détecter des signes éventuels de la pathologie, comme une hyperactivité par exemple, à charge pour un médecin de suivre ensuite l’enfant.
A Ashburn, Michael se régale surtout à sauter devant son écran, pour éviter les obstacles de la rivière: “C’est comme si on était dans le jeu, et on y est pas”, constate-t-il, et puis, “j’aime les bateaux”.